Jeux

Brute Force

Action | Edité par Microsoft Studios | Développé par Digital Anvil

6/10
360 : 20 juin 2003
20.06.2003 à 03h04 par - Rédacteur

Test : Brute Force sur Xbox

Brute Force. Deux mots, et tout un programme. Annoncé en 2001 peu après le lancement de la Xbox, Brute Force devait être l’après Halo, un jeu alliant réalisation magnifique, IA qui tue (au sens propre) et jeu en équipe. Depuis, de l’eau a coulé sous les ponts, beaucoup d’eau en fait, si bien que le jeu sort finalement en juin 2003 après avoir été repoussé un nombre incroyable de fois (pas autant que Duke Forever quand même). Alors Brute Force est-il aussi bon que ces messieurs de Microsoft et Digital Anvil ont bien voulu le dire ?

Quand Brutus rencontre Tex

Nous sommes en l’an de grâce 2340. Johnny Halliday vient de fêter ses 397 ans au Stade de France et le monde va mal, très mal. De vilains brigands venus de toute la galaxie ourdissent d’odieux complots pour devenir les maîtres de l’univers et la confédération terrienne est forcée d’employer les grands moyens pour faire taire la menace. La science a fait de monstrueux progrès et le clonage est enfin au point, plus besoin d’armées régulières donc, il suffit de cloner à volonté les meilleurs guerriers pour renouveler les forces. Vous faites justement partie de la Brute Force, l’élite des meilleurs des champions, et vous allez devoir, au travers d’une grosse vingtaine de missions, éradiquer les menaces qui pèsent sur la paix planétaire.

Au début, pour se faire la main, seul Tex est disponible, et au fil des missions Brutus, Flint et Hawk le rejoindront pour former un quatuor dévastateur. Petit problème, le character design est plus que foireux et des 4 personnages, aucun ne fait vraiment plaisir à voir, et donc à jouer. Tex, c’est le gros bourrin de base, un grand rassemblement de clichés : grand, (censé être) beau, musclé, vocalement viril mais au final complètement plat tant le tout manque de recherche. Et puis quand même, appeler un héros Tex, faut le vouloir à moins que ce soit en hommage au présentateur des Z’amours… Vient Brutus ensuite, et là ça fait mal. Tout courbé, blanc et vert (comme une morve) et doté de 3 neurones, le pauvre lézard n’est vraiment pas naturel, j’aurais préféré quelque chose de plus bestial. Flint et Hawk, ce sont un peu des sœurs jumelles, née sous le signe des gémeaux. Les modèles 3D sont les mêmes, seules diffèrent les couleurs de cheveux et de peau. Le character designer manque franchement d’imagination et de goût, c’est dommage car l’identification aux personnages et le plaisir de jeu s’en trouvent amoindris.




Roger Lemerre Brute Force Manager

Autant être clair tout de suite, l’aspect tactique, fièrement mis en avant pendant le développement du jeu, est un peu passé à la trappe au final. Alors qu’on nous promettait des compétences particulières aux membres de l’équipe, un jeu tactique poussé et des possibilités variées pour mener sa mission à terme, on ne retrouve au final qu’un gameplay qui force au bourrinage et un level design impropre à la mise en place de stratégies un tant soit peu recherchées. On se retrouve donc à se jeter sur les ennemis comme la vérole sur le bas clergé, et ce dans des niveaux qui ne laissent que très peu de libertés.

Pourtant, lors de quelques situations (et surtout dans le mode le plus difficile), on peut organiser des actions sympas, le sniper faisant le ménage en haut d’une montagne tandis que le reste de l’équipe fait le ménage en bas. Ces moments, réellement funs à jouer, donnent encore plus de regrets sur le reste du jeu, pas fin pour un sou.

A ce sujet, le système d’ordres de Brute Force est fort bien pensé. Avec le pad directionnel on choisit le ou les personnages qui seront affectés par l’ordre, puis on appuie sur un des boutons

du pad pour donner l’ordre. Au choix : aller vers (un curseur apparaît et les persos s’y rendent fissa), tenir position, couvrir (on vous suit plus ou moins bien) et le dernier permet de laisser l’initiative à l’IA, ce que je ne vous conseille pas de faire à moins de vouloir crever rapidement. Une dernière touche enfin, pour ordonner à untel de prendre une trousse de soin (ils le font tout seuls en général). Vraiment bien fichu, ce système est instinctif, très rapide à l’utilisation et en général très efficace. Dommage encore une fois que peu de situations requièrent l’emploi total de cette interface. La maniabilité ne pose pas trop de problèmes, on fait à peu près ce qu’on veut quand on veut, et il y a assez peu de commandes à apprendre ce qui fait qu’on a vite le jeu en main. C’est le principal.




Linéarité et classicisme, deux maîtres mots

Chaque mission est une suite de checkpoints à franchir, et le but final est en général de faire place nette, voire de récupérer ou détruire divers objets. Assez classique dans l’ensemble, mais cohérent avec l’orientation action du soft. Quelques missions secondaires sont bien de la partie, mais le jeu ne comportant pas de menu détaillant les objectifs à accomplir (ou accomplis), on ne sait pas ce qu’il faut faire et l’on se retrouve souvent avec une pénalité à la fin de la mission alors qu’on ne savait même pas qu’il fallait faire telle ou telle chose. Frustrant.

Une fois le niveau terminé, les récompenses pleuvent et une somme de monnaie vous est attribuée selon vos résultats, cette manne vous permettant par la suite de cloner vos persos morts au combat. Rassurez vous, vous gagnerez en général beaucoup plus que la somme nécessaire à cloner, de quoi faire des réserves pour les derniers niveaux, bien balèzes. On aurait apprécié une gestion plus approfondie de l’argent, avec par exemple des nouvelles armes et options à acheter entre les missions, mais au lieu de ça on se retrouve à la mission suivante avec un arsenal qu’on n’a pas choisi…

Si les premiers niveaux ne sont pas vraiment fantastiques, car oscillant maladroitement entre tactique et « bourrinisme », la seconde partie du jeu est bien plus réussie, assumant totalement son coté boucherie en quelque sorte. La tension est palpable par moments, et la difficulté, assez présente même en normal, apporte quelques grands moments de plaisir. Il faut toutefois s’être tapé une bonne demi-douzaine de niveaux ennuyeux pour voir le fun pointer le bout de son nez, mais « vieux motard que jamais » comme on dit…

Dernier point, l’IA des ennemis. Malheureusement, elle se rapproche beaucoup plus de celle de Turok que de celle d’Halo, et nombreux sont les petits trucs qui énervent. Primo, les ennemis sont omniscients, ils voient tout, même de dos, et la seule façon de les approcher sans éveiller leurs soupçons sera d’utiliser la fonction « invisibilité » de Hawk. Deuxio, ils se déplacent assez peu naturellement et les viser devient un calvaire par moments, surtout dans les combats très rapprochés quand il devient parfois impossible de les toucher sans reculer d’une dizaine de mètres. Certains, surtout vers la fin du jeu, sont surarmés et tuent 2, 3 ou 4 de vos persos en un coup, et je n’ai pas les mots pour vous dire combien c’est rageant, surtout qu’ils sont en général très vicieusement cachés dans les méandres du décor. Enfin, on n’échappe pas aux bugs, plutôt fréquents, qui feront se coincer les ennemis dans le décor, et l’IA étant comme suspendue dans ces cas là, il ne vous restera plus qu’à les abattre comme on achève un cheval blessé. Certains me diront, à raison sans doute, qu’une IA ultra évoluée aurait peut-être été du gâchis dans ce jeu, car la recette fonctionne quand même relativement bien au final.




Le goût, vous connaissez ?

La réalisation de Brute Force ne m’a pas impressionné. Pourquoi me direz-vous ? Et bien parce que le bump-mapping, je commence à bien connaître. Les développeurs ont décidé d’en mettre partout, et c’est assez réussi car la Xbox affiche le tout sans trop sourciller (en solo du moins), mais l’esthétique, la recherche visuelle a été un peu oubliée je pense. On se retrouve avec des persos très bien modélisés, mais manquant totalement de classe. Les décors sont plus convaincants, mais le level design peu recherché rend l’ensemble un peu fade, comme si cette débauche de technique n’était là que pour cacher le manque d’imagination des développeurs. Ce point, comme les autres, divisera les foules, et ceux qui ne jurent que par le bump-mapping en auront assurément pour leur argent. Certains éléments, comme des effets de particule ou de flou (quand on est proche de la mort par exemple) me paraissent beaucoup plus réussis, et donnent vie et cohérence aux niveaux traversés. En somme, l’aspect technique de Brute Force est une réussite en solo, mais l’esthétique générale du titre m’a grandement déçu (jusqu’à la jaquette du jeu, repoussante).

Côté animation, ce n’est pas encore ça. Les 4 héros sont ultra raides, comme s’ils s’étaient assis sur un balai (ouille !) et des animations et poses plus coulées auraient pu rendre le tout plus vivant. J’aurais par exemple aimé disposer de roulades, d’une part pour esquiver les tirs plus aisément, et d’autre pour donner plus de pêche aux persos. Les ennemis sont animés sommairement, et bougent on ne peut plus bizarrement, tant et si bien qu’ils sont très difficiles à sniper en mouvement, surtout que la lunette n’est pas un modèle de rapidité ni de fluidité. Le reste est plus intéressant, et on se marrera bien devant l’effet provoqué par un lancer de grenade dans un bâtiment, l’explosion faisant voler les vitres, et les ennemis au travers d’elles (avec en général une baisse de frame rate au passage).

Brute Force regorge de cinématiques, et si certaines sont impressionnantes, d’autres le sont beaucoup moins, notamment à cause du character design assez indigent (les briefings par exemple).

Au niveau sonore, c’est encore une fois mitigé. Les voix sont correctes, mais les traductions et le jeu d’acteur sont douteux. Quand on entend « Brutus, Tex et Flint, déguerpis ! », ça le fait pas trop. De même, certains dialogues entre les persos font très cheap, presque décousus tant les persos sont caricaturaux. Tex c’est « on va s’les faire ! », Brutus c’est « que crishna nous protège », Hawk : « chef oui chef ! » et Flint « les carottes sont cuites ! ». J’exagère un chouia bien sûr, mais c’est un peu ça, et puis d’ailleurs on s’en fout puisqu’on n’est pas là pour se poser des questions sur la qualité du jeu d’acteur, mais pour bousiller tout ce qui bouge.

Les musiques sont sympas dans l’ensemble, pas inoubliables mais bien dans le ton, rien à dire. A signaler que le jeu gère parfaitement le 5.1, une bonne chose pour savoir d’où on vous tire…

Xbox Live, on t’aimait bien

Mais pas assez visiblement… Alors que le type de jeu s’y prêtait bien, les développeurs ont décidé de ne pas implanter de mode multijoueurs via Xbox Live, et si le logo Xbox Live figure bien sur l’horrible boite de jeu, c’est seulement pour signaler la possibilité de downloader de nouveaux éléments utilisables offline. Dommage, mais finalement pas tant que ça, au vu des difficultés qu’à la Xbox pour gérer la présence de plus de deux joueurs sur un seul et même écran. Si vous comptez jouez à 4, allez au préalable vous inscrire sur les listes de greffes d’yeux, car le framerate, aussi plat que l’électro-encéphalogramme de Lagaf, aura tôt fait de vous transformer en Daredevil (Daredeschamps pour les provinciaux).

A deux c’est encore acceptable, et vous passerez de bons moments en coopératif, les ordres se donnant alors à l’aide de hurlements et de coups de pieds au derrière.

Le mode deathmatch est par contre beaucoup moins intéressant je trouve, la vue à la troisième personne étant peu propice aux affrontements entre humains selon moi, mais à 16, en occultant les problèmes d’animation, ça doit le faire quand même.




La chose la plus importante à retenir de Brute Force, c’est qu’il n’est absolument pas ce qu’il devait être, et qu’on se trouve devant un jeu qui ne plaira pas à tout le monde de par son côté très bourrin. La Xbox est fort bien exploitée en solo, mais elle met un genou à terre à plusieurs, on aurait préféré une qualité visuelle moindre et un framerate plus constant, dommage. L’absence de mode Live est au final assez anecdotique, par contre le manque total de style et de goût pour l’esthétique du jeu l’est beaucoup moins. Les bourrins dans l’âme apprécieront, mais on peut quand même émettre quelques réserves sur ce Brute Force, surtout quand on doit le payer 60€…

+

    -

      • Techniquement, le jeu est convaincant. Esthétiquement c'est franchement pauvre. Des cinématiques impressionnantes
      • Gameplay classique, mais le système d'ordre est vraiment bien pensé. Un peu plus de profondeur n'aurait pas dérangé toutefois...
      • Le jeu est vite redondant, mais il y a de quoi faire. Les missions à télécharger allongent la durée de vie.
      • Les voix sonnent justes mais les commentaires sont parfois malhabiles ou carrément caricaturaux (comme le jeu quoi). Les musiques sont efficaces, et le son est géré en 5.1.
      • Assez anecdotique, l'histoire s'oublie bien vite une fois le jeu terminé.
      • Brute Force devait être un excellent jeu, un hit à posséder absolument pour tout joueur. Il n'est au final qu'un bon petit jeu, bien bourrin et surtout très classique, dommage.
      • Le framerate est assez stable en solo mais chute dramatiquement à plusieurs, une honte. Les animations sont un peu raides mais c'est un peu le cas dans tous les jeux du genre.
      • Quelques missions supplémentaires à télécharger, une maigre compensation face à l'absence de coop/deathmatch online.