Jeux

Ori and the Blind Forest

Plate-formes | Edité par Microsoft Studios | Développé par MOON Studios

10/10
One : 11 mars 2015
17.03.2016 à 23h55 par - Rédacteur

Test : Ori and the Blind Forest sur Xbox One

Attendu comme l’exclusivité phare de la Xbox One en ce début d’année 2015, Ori and the Blind Forest s’est enfin offert à nous. Fer de lance de Microsoft dans le combat que le géant se livre avec son principal concurrent sur le terrain désormais très fertile du jeu indépendant, le plateformer onirique signé Moon Studios s’avance tout de même avec des arguments techniques prompts à faire pâlir certaines productions estampillées AAA. Reste maintenant à s’assurer que la magie opère manette en mains, au fil de cette aventure mélancolique et touchante… Piquante dans tous les sens du terme.

Le programme ID@Xbox recèle de quelques perles et Microsoft a eu rapidement conscience qu’Ori and the Blind Forest avait ce petit quelque chose en plus qui mérite de lui donner une certaine visibilité. C’est ainsi que l’on accueille avec beaucoup d’attentes ce jeu un peu indépendant avec quelques airs de grosse production, portant sur ses jeunes épaules la lourde tâche d’offrir à la Xbox One un solide argument de vente. Cette quête s’apparente peut-être un peu à celle d’Ori, petite bête rappelant Stitch qui aurait avalé un ver luisant. Arraché à son foyer, adopté puis une nouvelle fois exclu du bonheur parce que la forêt va mal, parce que son cœur, l’Arbre des esprits, se meurt sans Ori. C’est grâce à l’aide de Seyn, esprit luisant et virevoltant qui rappellera un peu du compagnon de fortune d’Amaterasu dans Okami, qu’Ori va retrouver l’énergie qu’il lui faut pour se lancer dans une grande opération sauvetage de la forêt, et faire face aux multiples périls qui la jonchent. Nous découvrons ainsi un univers en 2D dont la structure s’apparente à celle d’un Castlevania (ou encore de Strider pour parler Xbox One) : avec une grande carte faite de zones aux influences variées toutes reliées entre elles, où les passages se créent au fil de l’évolution du personnage et où la recherche des secrets plus ou moins bien dissimulés représente une activité à part entière. La différence avec le mythe créé par Konami, c’est qu’Ori and the Blind Forest offre une approche plus dynamique : toujours en mouvement, on ne fait pas un pas sans rencontrer un danger. Aussi, les talents du joueur comme ceux que l’on octroie progressivement au personnage sont déterminants pour la survie de celui-ci.

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Passé la séquence introductive (dont je passe volontairement les détails pour ne pas gâcher ce moment), on prend possession d’un personnage encore quelque peu limité dans ses mouvements : tout juste peut-il sauter et utiliser une flamme pour se défendre à une distance modérée. Les capacités d’Ori se développent ensuite autour de deux axes. Il y a d’abord les compétences principales qui se déverrouillent aux moments clés de l’aventure : au nombre de huit, ces nouveaux pouvoirs enrichissent à chaque fois l’expérience avec la capacité à s’accrocher aux murs par exemple, à planer ou à renvoyer les attaques ennemies. On constate que les développeurs ont soigné cette partie de l’évolution d’Ori, en offrant un rythme de déblocage très équilibré au regard du déroulement de l’aventure. Egalement, aucun de ces ajouts ne saurait nuire à l’une des grandes qualités du soft, à savoir la précision de son gameplay. S’il faut bien quelques sauts et autant d’échecs pour s’habituer au poids du personnage, et s’il est nécessaire d’expérimenter la compétence de frappe pour en tirer tout son potentiel, on n’est que bien rarement pris à défaut par les commandes. L’autre axe d’évolution du personnage emmène d’ailleurs progressivement une certaine souplesse d’exécution, en offrant – contre des points d’expérience – la possibilité de débloquer un double puis un triple saut, d’améliorer la résistance d’Ori, de rendre ses coups plus puissants. On peut aussi développer une série de compétences dédiées à l’exploration et aux objets secrets.

« Et autant vous prévenir sans détour : vous allez mourir souvent dans Ori and the Blind Forest. Bien plus que dans les autres jeux auxquels vous avez joué cette année sur Xbox One »

Ori monte ainsi continuellement en puissance, à mesure que la forêt se fait de plus en plus menaçante. Et autant vous prévenir sans détour : vous allez mourir souvent dans Ori and the Blind Forest. Bien plus que dans les autres jeux auxquels vous avez joué cette année sur Xbox One. C’est que sous ses airs poétiques, le soft de Moon Studios est un jeu de plate-formes qui laisse peu de place aux approximations. Les ronces géantes, la glace, la lave, les flammes… Il y a toujours un élément bien douloureux qui attend celui qui s’écarte un peu trop du chemin. Les ennemis ne sont pas non plus très tendres avec Ori et composent un bestiaire tout à fait honorable, sans grande originalité certes, mais regroupant tout ce qu’il faut pour compliquer la vie du petit héros attachant. Mais tout cela, en soi, n’est rien de plus que la normalité pour un jeu du genre ; ce qui représente la véritable difficulté d’Ori and the Blind Forest, c’est la nécessité d’agir avec une grande précision dans des moments où rien ne pousse à faire les choses calmement. Le bon vieux « die and retry » est de mise dans cette forêt. Il devient rapidement difficile voire impossible de se frayer un chemin dans les niveaux sans en expérimenter au moins une fois les multiples pièges.

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Ainsi va la difficulté. Les débuts du jeu se contentent de bouger un peu les habitudes du joueur qui aurait pris goût à la facilité. Et puis doucement on commence à ressentir le danger, on paye le prix de l’apprentissage des nouvelles compétences ; puis on découvre avec stupeur que les développeurs ont prévu encore quelque chose d’encore plus difficile que « ce passage » que l’on croyait on ne peut plus délicat ! Pourtant, on n’abandonnerait Ori and the Blind Forest pour rien au monde. On est constamment sur le fil du rasoir, à l’extrême limite où le challenge pourrait laisser place à la frustration, mais c’est plutôt la recherche de la réussite, le plaisir d’y arriver qui prime. Il y a d’ailleurs un élément de gameplay qui vient contribuer à cela, à savoir le système de sauvegarde. Ainsi, en échange d’un point d’énergie servant d’ordinaire à provoquer une attaque explosive ou à ouvrir des portes spéciales ouvrant vers des zones où trainent quelques bonus, Ori crée un point de sauvegarde instantanément. Cette gestion originale de la sauvegarde se révèle tout simplement excellente en modifiant profondément l’approche du challenge : il faut veiller à ne pas en abuser sous peine d’être à sec dans un moment crucial, mais également à ne pas oublier d’en placer régulièrement sous peine de devoir repartir pour un – trop – long tour.

« Artistiquement, nous savions depuis les premières présentations que ce jeu a quelque chose de grandiose ; manette en mains, s’ajoute à cela le ressenti que provoque l’ambiance mélancolique, parfois triste, de la découverte du monde d’Ori »

Oui, Ori and the Blind Forest est une expérience qui demande de l’engagement de la part du joueur, pas mal de concentration et une bonne dose de volonté pendant la dizaine d’heures qu’il occupe. Mais comment pourrait-on refuser de se lancer dans une aventure aussi sublime ? Artistiquement, nous savions depuis les premières présentations que ce jeu a quelque chose de grandiose ; manette en mains, s’ajoute à cela le ressenti que provoque l’ambiance mélancolique, parfois triste, de la découverte du monde d’Ori. La bande-son appuie encore un peu plus sur l’accélérateur émotionnel avec une palette de mélodie parfaitement dans le ton, extrêmement prenante. Mais Ori and the Blind Forest est aussi un jeu magnifique d’un point de vue technique. En dehors de quelques ralentissements (sans conséquences, ils ne poussent pas à la faute), le soft est un plaisir pour les yeux qui ne se prive pas de varier les expériences visuelles pour ne jamais que l’on ne sente une quelconque redondance. Il y a néanmoins une contre-partie à cela : la richesse visuelle, l’enchevêtrement des décors sur plusieurs plans à tendance à nuire à la lisibilité de l’action. Préparez-vous à laisser quelques cheveux en route… Mais bon, on le répète même si vous l’avez compris, Ori and the Blind Forest mériterait que l’on devienne chauve. Sans aucun remord.

Ori and the Blind Forest : Definitive Edition

C’est donc un an après nous avoir émerveillé qu’Ori and the Blind Forest revient sur Xbox One avec une Definitive Edition. N’allez pas chercher l’amélioration graphique qui accompagne généralement les titres affublés de ce genre d’appellation (mais on note tout de même la quasi-disparition des chutes de framerate) : vous serez d’une part certainement d’accord pour dire qu’Ori n’en a pas du tout besoin ; d’autre part, c’est sur le contenu que Moon Studios a travaillé pour donner à son chef d’oeuvre une nouvelle raison d’être admiré.

Il faut savoir avant toute chose que cette Definitive Edition se veut totalement indépendante de la version d’origine. Pas de panique donc si l’ancienne sauvegarde n’apparaît pas, c’est normal. Les vétérans sont donc invités à revivre une nouvelle fois l’extraordinaire périple d’Ori afin d’en découvrir ses nouveautés, du moins jusqu’à un certain point. Deux nouveaux environnements s’offrent ainsi au joueur qui peut en découvrir une première partie après seulement une petite heure de jeu, soit le temps nécessaire pour récupérer la capacité permettant de grimper sur les murs. L’accès à la seconde partie, directement liée au premier environnement, nécessite cependant de posséder la capacité d’écrasement. Si vous avez fait le jeu l’année dernière, vous savez qu’il vous faudra souffrir un petit peu avant de découvrir l’intégralité de ces nouveaux lieux.

On en apprend un peu plus sur l’histoire des personnages et on fait face ici à de nouveaux défis au coeur d’un level design qui démontre, s’il le faut, qu’on ne manque pas d’inspiration chez Moon Studios. On évolue ainsi dans un univers très sombre, en se repérant à l’aide d’une sphère lumineuse que l’on transporte et qui a tendance à créer de drôles de réactions sur les éléments du décors. Plus loin, la dextérité du joueur est mise à l’épreuve ainsi que sa capacité à se déplacer rapidement. Explorer ces zones vaut surtout pour les récompenses qui attendent au bout, bien que l’on regrette qu’elles arrivent finalement assez vite : pas plus d’une heure et demi seront nécessaires pour faire le tour des nouvelles zones.

Ori and the Blind Forest Definitive Edition accueille deux nouvelles compétences (le dash et le jet de sphères lumineuses) qui sont naturellement mises à contribution pour se frayer un chemin dans les nouvelles zones ; mais elles se révèlent aussi très utiles dans les environnements tirés de l’aventure de base où elles facilitent un peu la vie (pas de pitié pour les corbeaux). Si toutefois cela ne suffisait pas aux moins patients (ou au contraire, aux très courageux), Ori and the Blind Forest Definitive Edition intègre le choix du niveau de difficulté, allant de facile jusqu’à la mort subite. Oui, une vie, une seule. De facile à difficile, on gagne ou perd en puissance et il en va de même pour les ennemis. Mais n’espérez pas voir la tâche facilitée de manière significative : vous ne courrez pas plus vite et il faudra encore user de concentration et de patience pour voir le bout de cette aventure fabuleuse.

10/10
En rentrant dans le cercle très fermé des jeux à effet « whaou » quand on découvre leur plastique, suivi du double effet kiss cool que provoque la participation à une aventure aux mécaniques maitrisées de A à Z, Ori and the Blind Forest se pose tranquillement comme un incontournable de la Xbox One. Le genre de jeu qui remplit parfaitement son rôle d’exclusivité phare, le genre qu’un gamin des années 1990 aurait fièrement jeté au visage de son adversaire dans la guerre des consoles, avec l’assurance d’une défense inébranlable tant Moon Studios a su faire preuve de soin pour développer son bébé. Parfois difficile, il révèle pourtant bien plus passionnant qu’il ne peut être frustrant. Et c’est aussi ce dosage quasi parfait du challenge qui finit de nous imposer à nous, humbles joueurs, l’envie de profiter de chaque instant d’une aventure belle et mélancolique, d’une qualité que l’on ne recroisera pas avant quelques temps. Avec sa Definitive Edition, Ori and the Blind Forest sublime un tableau déjà splendide. Nouveaux environnements (certes un peu vite explorés) et compétences se montrent intéressants et parfaitement intégrés à l'aventure d'origine, sans pour autant être vraiment indispensables pour qui a déjà vécu l'expérience Ori. Du coup, on en vient presque à jalouser celle ou celui qui s'apprête à découvrir Ori and the Blind Forest avec cette Definitive Edition : l'émerveillement sera total.

+

  • Artistiquement comme techniquement sublime
  • Gameplay maitrisé et les ajouts sont habillement distillés
  • Challenge bien dosé
  • Système de sauvegarde ingénieux
  • Bonne durée de vie
  • Bande-son magistrale

-

    • Manque parfois de lisibilité
    • Quelques ralentissements
    • Il faut aimer se faire du mal