Jeux

Project Spark

Inclassables | Edité par Microsoft Studios | Développé par Team Dakota

10/10
One : 10 octobre 2014 360 : 10 octobre 2014
08.10.2014 à 20h26 par

Test : Project Spark sur Xbox One

Imaginationland à la sauce Spark ?

Les jeux servant à créer d'autres jeux se font rares sur nos consoles de salon. Le succès des LittleBigPlanet a cependant prouvé qu'un marché était bien présent dans cette catégorie atypique, où tout le monde peut s'amuser aux aventures des autres. Fort de ce constat, Team Dakota sort son Project Spark après une bêta douloureuse qui a duré sept mois, promettant un environnement simplifié afin de permettre aux joueurs la création de titres 2D comme 3D de tout genre sur Xbox One. Avec pour seule limite leur imagination, nous dit-on. Mystification ou mythe de Prométhée à portée de pad ?

«Quel genre de Spark êtes-vous ? Joueur ? Créateur ? Ou les deux ?». Ce sont par ces interrogations que le narrateur à la voix de velours (Benoît Allemane en V.F) nous accueille lors de la cinématique d’introduction. Project Spark est en effet découpé en trois catégories lorsque l’on accède à son menu principal. La première, « jouer », propose comme son nom l’indique de s’amuser aux créations chapeautées par d’autres utilisateurs. Un section qui à elle seule peut expliquer le téléchargement -gratuit- du logiciel, tant on peut y trouver de quoi s’occuper de plus ou moins longues minutes dans la pléthore de mondes déjà disponibles. Des filtres de recherche sont heureusement présents pour jouer directement aux mieux notés, ou à ceux conseillés par les développeurs eux-mêmes. Bien sûr, il y a plus de lard que de cochon dans ces univers à se mettre sous la dent, mais certaines œuvres forcent le respect, comme un Slender qui fait vraiment sursauter, un Final Fantasy-like avec son système de combat, un Tetris aussi prenant que l’original ou d’autres niveaux parfois totalement originaux ou inspirés de jeux ou de films cultes (Titanfall, Jurassic Park, Gears of War ou encore Fable pour ne citer qu’eux). Autant d’exemples à se mettre sous la dent afin de jauger les possibilités folles de Spark, d’autant plus qu’il est possible d’ouvrir ces projets qui ne nous appartiennent pas pour voir comment s’est débrouillé son auteur avec le Kode (le langage de scripting de Spark). À condition de posséder tous les objets présents dans le niveau que l’on souhaite éditer.

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Avec la possibilité de sauvegarder des objets fabriqués voire même les intelligences artificielles conçues par d’autres créateurs, le mode «jouer» et ses options d’édition permettent de comprendre plus efficacement la création de niveaux sous Spark. Signalons également le sous-mode «crossroads», option qui génère un jeu d’aventure/action (d’autres genres arriveront plus tard) à base de choix du joueur (type d’ennemis, place du village, genre de boss final, etc) et dans lequel les textes sont éditables. Enfin, «quête de champion» est une histoire en épisodes créée par la Team Dakota, apportant ainsi un background à l’univers Spark, ainsi que des héros à faire monter en XP (utilisables en «crossroads») en solo comme en coop. Le premier épisode disponible est d’ailleurs d’une qualité étonnante et montre à lui seul ce qui peut être possible de faire sous Spark, en plus d’enseigner quelques bases du Kode. La seconde rubrique principale, sobrement intitulée «créer», octroie au joueur les pleins pouvoirs en le faisant partir de zéro pour qu’il puisse bâtir son univers polygone par polygone, événement par événement. Les plus impatients utiliseront le «créer» qui apporte tout un tas de préfabs afin de développer un titre (simple) en cinq minutes chrono. La troisième rubrique, «marché», se laisse parcourir afin d’effectuer des micro-paiements et ainsi mettre la main sur des objets, des personnages, des sons et autres textures qui ne seraient pas présents de base. Les DLCs s’annoncent d’ores et déjà nombreux, ce qui peut contrebalancer la gratuité de ce Project Spark sur le Store.

« Bien sûr, il y a plus de lard que de cochon dans ces univers à se mettre sous la dent fabriqués par d’autres créateurs, mais certaines œuvres forcent le respect »

Les éléments payants du free-to-play de la Team Dakota sont donc principalement cantonnés aux objets qui peuvent venir joliment orner le monde que l’on créé, ou pour dépasser quelques limites de voxels/polygones comme débloquer des «quêtes de champion». Les outils, eux, restent les même pour tous et se révèlent suffisamment efficaces pour permettre la construction d’univers sans sourciller de colère ou d’ennui. Que le joueur veuille créer des lacs, puis ajouter un îlot, creuser des cavernes, former une vaste plaine ou placer des plates-formes suspendues en l’air, tout est faisable rapidement avec Spark grâce à ses tools de sculpture. En cas d’erreur, de simples pressions sur la touche «affichage» annule les dernières actions validées par le joueur. Un petit coup de peinture pour changer de l’herbe en glace voire en sable, ou pour placer rapidement faune et flore, et le tour est joué ! Un niveau tout droit sorti de notre imagination est là, prêt à accueillir héros, monstres, objets, sons et multiples bonus, tous accessibles dans une galerie appropriée, s’ils ont évidemment été achetés au préalable. Des éléments qui peuvent bien sûr être collés entre eux, déplacés en groupes, copiés. L’édition de personnages/objets est possible sur Spark. Dans la section «apparence» des propriétés en effet, il est possible de changer les couleurs de chaque plage de texture qui compose un élément. Cependant, la création pure de personnage demeure une sinécure. Le joueur peut effectivement s’amuser à fixer différents objets sur les parties du squelette qui composent un héros, ce qui rend la manipulation réalisable mais fastidieuse. Avec beaucoup de patience et d’entraînement, les plus futés créeront des monstres composés de barrières en bois et autres polygones accolés, ou encore un héros avec un saut à la place de la tête si l’épopée le nécessite.

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Project Spark n’a pas vraiment été pensé pour que le joueur puisse créer ses propres assets, afin de privilégier les éléments payants du store. Il donne tout de même des possibilités bienvenues pour les plus courageux qui veulent contourner les limites. Dans les faits, et à la vue des nombreux mondes disponibles et de nos dizaines d’heures d’utilisation, le titre de la Team Dakota permet de mettre aux mondes des univers variés, dotés d’une patte artistique «à la Fable» si l’on utilise les assets fournis sans passer des heures à les modifier. Tous ces outils et options peuvent être partagés jusqu’à quatre lors de la création en multijoueurs sur le Xbox Live, une idée absolument excellente puisqu’elle occasionne de la coopération dans le développement de projets, aux idées ubuesques d’un vendredi soir arrosé.

« Que le joueur veuille créer des lacs, puis ajouter un îlot, creuser des cavernes, former une vaste plaine ou placer des plates-formes suspendues en l’air, tout est faisable rapidement avec Spark grâce à ses tools de sculpture »

Des héros, des monstres, des items, c’est bien. Un scénario, des mécanismes, bref, un jeu qui roule, c’est mieux ! Hack’n slash, FPS, aventure, RPG, shoot, course, plate-forme… tout est faisable avec un peu d’imagination. Afin de faire fonctionner tout le petit monde que l’on vient de créer pièce par pièce, il va falloir mettre les mains dans le code, ou plutôt le «Kode» puisqu’il est ainsi nommé. Autant être clair d’emblée sur ce point, si Project Spark promet la création pour le meilleur et pour le plaisir, c’est à la condition de passer quelques bonnes heures à fouiner, essayer, lire, comprendre. Le tutoriel, s’il montre quelques bases, n’effleure qu’une infime partie des folles possibilités du logiciel (même si de futures sections sont promises). La progression se fait à la dure, en posant des questions sur les forums, en fouillant sur le net et en ouvrant des niveaux déjà publiés par d’autres. Alors oui, le système de scripting orienté objets à base de cerveaux à programmer est très visuel, avec des icônes sympathiques et des explications plus ou moins détaillées, mais sans un fort investissement personnel, le joueur risque de passer à côté du nectar de ce Spark.

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Basé sur ce qui se fait dans le monde professionnel, le «Kode» est en fait une succession de lignes formées d’éléments (ici visuels) capables d’enclencher une série d’actions via une syntaxe millénaire : QUAND (when) > ALORS (do). Vous souhaitez créer un personnage qui bouge lorsque le joueur touche le stick gauche ? Rien de plus simple, il suffit d’entrer cette ligne grâce à la roue prévue à cet effet dans le cerveau du personnage que le joueur va diriger : QUAND > Stick gauche > ALORS > Déplacer. Évidemment, les cerveaux peuvent être amenés à être bien plus complexes selon la tâche à exécuter. Heureusement, une galerie de comportements déjà paramétrés est disponible pour gagner un maximum de temps. Une fois la gymnastique comprise et répétée, les variables, booléennes, trigger zones et autres timers passent d’épouvantails à meilleurs adjuvants pour concrétiser ses idées. À ce titre, Project Spark devrait être enseigné à l’école afin de montrer comment se font les jeux vidéo. En exposant les bases du level design en passant par la syntaxe d’un code et les joies de la motion capture (via Kinect), le jeu de la Team Dakota est aussi complet qu’intelligent dans ce qu’il entreprend. Espérons que son côté gratuit ne le fasse pas passer pour un simple petit titre sans grande prétention aussitôt essayé aussitôt jeté.

« Si Project Spark promet la création pour le meilleur et pour le plaisir, c’est à la condition de passer quelques bonnes heures à fouiner, essayer, lire, comprendre »

Même si Project Spark peut être acheté en version boîte, il est avant tout un titre digital qui ne cesse d’évoluer. En contenu, bien sûr, grâce aux DLCs, mais aussi dans son modèle économique et ses correctifs. Depuis la bêta à laquelle nous avons intensivement participé, nous avons effectivement constaté plusieurs évolutions dans son système free-to-play et sur le choix de ce qui doit être payant ou non. Par exemple, au début de la bêta, presque tous les objets payants pouvaient être achetés à la fois via des tokens (de vrais euros) ou des points d’expérience économisés. Aujourd’hui, la plupart des gros packs ne peuvent être acquis qu’avec de la monnaie réelle. Rien ne nous assure que dans un avenir proche (ou non) certaines conditions abordées dans cet article seront au final toujours d’actualité. Nous avons également souffert de quelques bugs heureusement régulièrement corrigés, même si ces patchs apportent parfois d’autres soucis, comme nous l’avons constaté sur cette version «release». Ce qui est tout à fait normal pour un soft de ce genre, bien que cela soit toujours plus ou moins énervant. Ces précisions faites, il est temps pour vous, chers lecteurs, de retrousser vos manches et de fabriquer les jeux de demain ! Avec la version nue mais gratuite à télécharger sur le Xbox Live ou via le kit de démarrage vendu une quarantaine d’euros bourré de DLCs (dont le très pratique Massive World Builder Pack). La communauté Spark ne demande qu’à grandir afin de livrer tout son potentiel. Pour finir, il est important de signaler que chaque jeu créé sous Xbox One est jouable sur PC/tablettes Windows 8, et vice-versa. Sans oublier que grâce aux sauvegardes sur le Cloud, un projet peut être commencé sur One puis continué sur ordinateur, par exemple. Sacrément bien pensé.

10/10
Orienté vers un public voulant à la fois jouer à des choses nouvelles et souhaitant s'exprimer dans la création de jeux vidéo, Project Spark est tout simplement ce qui se fait de plus abouti dans son genre. Proposant des outils efficaces de création ainsi qu'un grande flexibilité dans la manière de donner vie à des expériences aux genres variés, le titre de Team Dakota se paye le luxe de sortir dans une version gratuite qui permet de s'amuser aux jeux des autres et de créer ses propres aventures sans dépenser un seul euro, tout seul ou à quatre sur le Xbox Live. De quoi progresser sans frais avant de craquer pour les nombreux DLCs ajoutant principalement des éléments graphiques. Si l'investissement en temps qu'il demande pour être convenablement compris peut en rebuter certains malgré les nombreuses informations semées dans son interface, sa profondeur et son intelligence ne pourront que convaincre ceux qui auront décidé de passer quelques soirées dessus. Un indispensable.

+

  • Des outils de Level Design simples et efficaces
  • Le scripting, flexible, complet, logique
  • Peu de limites
  • La création en multijoueurs
  • Plein de choses à jouer
  • C'est gratuit !
  • Possibilité d'ouvrir/éditer les niveaux des autres...

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    • … Même si cela nécessite souvent des micro-paiements
    • Demande de fouiller un peu partout pour comprendre et progresser
    • Quelques baisses de framerate et légers bugs
    • Un style graphique "à la Fable" difficilement contournable