Dossier

Comme chacun sait, Microsoft éprouve de grandes difficultés à ne serait-ce qu’intégrer sa console dans le paysage vidéoludique nippon. Alors que la Xbox est talonnée, voire certaines semaines dépassée par la PS One ( !), nous sommes en droit de nous demander si l’aventure japonaise n’est pas d’ores et déjà terminée. Après 2 mois passés au pays du soleil levant, voici quelques éléments d’analyse sur la situation.

Le marché japonais

Le Japon. Il n’y a pas si longtemps le premier marché mondial du jeu vidéo, celui qui lui a offert ses lettres de noblesse, et surtout celui dont sont originaires les plus grands constructeurs. Dorénavant on parle du Japon comme d’un éventuel bon dernier, peut être dépassé par l’Europe. Oui, le Japon traverse une crise, mais même si cela ne date pas d’hier (début des années 90), le marché du jeu vidéo semble lui plus enclin à devoir se remettre en question. Dans un cadre manquant de repères, savoir que l’on possède la même chose que son voisin a quelque chose de rassurant, de communautaire. A l‘heure actuelle, on ne peut pas dire que les japonais achètent une console de jeux vidéo. Ils achètent une PS2. Même Nintendo, le géant de Kyoto, se trouve dans la tourmente et ne parvient pas à imposer sa Gamecube, loin derrière les ventes d’une PS2 hégémonique. Cela se remarque surtout dans les ventes de softs. N’est-il pas étrange que des jeux PS2, s’adressant pourtant à un nombre conséquent de consommateurs, ne parviennent que très rarement à dépasser le million des best sellers ? Les japonais achètent effectivement assez peu de jeux comparativement à ce que l’on pourrait attendre, et surtout ont des habitudes de consommation qui diffèrent des occidentaux. Les adultes jouent peu aux jeux vidéo, ou alors se satisfont des game centers (salles d’arcade). Ceci étant, si on en trouve beaucoup plus qui restent passionnés de jeux que dans nos contrées, ils semblent beaucoup plus focalisés sur une série que vraiment sur les jeux vidéo dans leur ensemble (qui a dit Final Fantasy et Dragon Quest ?). De plus, l’arrivée des portables nouvelle génération semble particulièrement chambouler les habitudes de consommation des japonais, qui passent assez peu de temps chez eux et beaucoup dans les transports.

Quelle place pour la Xbox ?

Et oui, alors même que Nintendo peine à maintenir sa position, la situation de la Xbox ressemble davantage à la tragédie grecque qu’à de la romance bluette. Mais pourtant Microsoft fait de nombreux efforts, ne serait-ce qu’au niveau de la représentation de la console. Ainsi, il est très aisé de trouver de la Xbox dans les grands magasins de l’électronique (certains magasins de Akihabara lui réservent même un étage, comme pour ses concurrentes), même si la situation est légèrement plus préoccupante dans les petits magasins, où la PS2 s’étale de tout son orgueil. Ainsi, vous trouverez aisément dans les rues de Tokyo des bornes de démo Xbox à côté des bornes PS2 et Gamecube. Et cela est dû à un deuxième effort : tout faire pour proposer des jeux compatibles avec les goûts japonais. Seulement voilà, ce petit jeu est à double tranchant. Car ne mettre en avant que les jeux typiquement japonais, c’est faire face de plein fouet à la concurrence PS2. Pourquoi acheter une Xbox si les jeux qu’elle propose ne diffèrent pas des jeux PS2 ? Surtout lorsque l’on considère que les japonais ne sont pas spécialement attachés à l’aspect graphique (la plupart joue en RCA sur de petites TV, et le mot aliasing ne leur évoque rien). Contrairement à une idée reçue, les japonais ne sont pas si anti américain, et ce n’est pas leur fantasme d’île coupée du monde qui les empêche d’utiliser Windows comme tout le monde. La culture américaine, même si elle a moins d’emprise là-bas qu’en Europe, reste très présente et ne témoigne pas de leur présumée aversion pour l’étranger. Alors pourquoi Microsoft n’ose pas davantage jouer la carte de la différence avec des jeux plus occidentalisés ? Les japonais que j’ai rencontrés et qui possèdent une Xbox se plaignaient du manque de jeux à la Morrowind, ou bien encore de retards conséquents pour des titres tels que Hunter. En ne mettant en avant que les titres japonisants, Microsoft s’ôte peut être une carte qui lui serait utile, voire importante. Evidemment, des titres comme Tekki sont primordiaux pour l’image de la console, et l’absence de RPG est une grosse tare, mais ne serait-il pas envisageable de mettre plus en avant des titres généralement absents du marché nippon ? Dans un sens, mieux vaut être un bon 3ème qui s’assume qu’un absent voulant être calife à la place du calife…

Pour l’instant, Microsoft a choisi son camp, et rien ne préfigure d’un renouveau dans les mois qui viennent, la Xbox semblant condamnée à un bien triste sort sur l’archipel. Alors pourquoi tant d’efforts ? Je pense que l’enjeu reste d’intégrer Microsoft au paysage vidéoludique dans les consciences japonaises, et que si combat il y aura, ce ne sera pas réellement avant la Xbox 2.

La situation japonaise ne semble pas en voie de se renverser pour Microsoft, sur un marché qui devient énigmatique et ne répond plus à la logique établie. La PS2 a d’ores et déjà gagné la guerre sur cette génération de consoles, et rien ne semble taillé pour lui disputer sa suprématie. Microsoft doit pourtant maintenir ses efforts, même si une stratégie de différenciation pourrait s’avérer payante, qui sait. Microsoft devrait une fois pour toutes définir clairement ce que représente la Xbox là-bas, lui trouver une identité cohérente. Car si la Xbox éprouve toutes les peines du monde à trouver sa place, sa suivante ne pourra se le permettre.

Nous vous rappelons qu’ont participé à ce dossier différents journalistes français. Vous pouvez accéder à leur avis en cliquant sur les liens suivants :

«La Xbox est leur plus gros challenge, à plus forte raison sur le marché japonais. Si je ne les vois pas inverser la tendance avec la première génération, je les crois encore capables de redresser la barre avec la seconde.»lire la suite…

suite

«La motivation des personnes travaillant à MS Japon n’a rien de communicative. Des titres comme DOA X se feront certainement des adeptes mais le phénomène ne peut être que très ponctuel.» lire la suite…

«La Xbox est donc totalement morte au Japon et, quelles que soient leurs qualités, il est vraisemblable que les prochaines consoles de Microsoft devraient suivre le même chemin, pour les mêmes raisons !» lire la suite…

Avec tous nos remerciements à Berreb, RaHaN, Vincent et

AHL.