E3 2005 : le bilan
L’E3, c’est vraiment grand, et c’est bruyant
Commençons par vous parler de nos premières impressions sur le
salon en lui-même. Autant le dire d’emblée, nous avons été quelque peu déçus par
la taille du show. En fait, après avoir entendu tellement de fois que le
convention center était absolument énorme et qu’il fallait presque y aller en
skate à moteur, Zac et moi sommes un peu retombés sur terre. Et pour cause,
puisque l’E3 ce sont deux halls et un (très) grand couloir, et qu’il vous faut
moins de 2 minutes montre en main pour traverser chaque salle. Le gigantisme
vient surtout des nombreux rendez vous qui s’arrangent pour toujours être de
l’autre côté de là où on est. Ceux qui ont pu assister à des salons de l’auto
auront donc vu encore plus massif, mais ne nous y trompons pas, ça reste énorme.
Enorme parce que d’une part, les stands sont proprement hallucinants. Les deux
plus énormes restent les stands de Microsoft et de Sony (EA était pas mal aussi
avec son écran à 360°), véritables lounges géants sur un étage avec moult bornes
de démo et salles de projection. Mais globalement tous les stands de gros
éditeurs sont étourdissants de gigantisme et de raffinement. Sans compter une
déco de malade mental, toujours plus grande, toujours plus classe. Quand on sait
que ces véritables pièces d’architecture sont aussi éphémères que trois
papillons (le salon ne dure que trois jours), on se demande comment une
industrie qui va soit disant moyennement peut se permettre de telles
extravagances. Sans compter les différentes soirées et autres conférences
privées. Très franchement, on en vient à se demander à quoi tout cela peut bien
servir, puisque finalement ce que les spectateurs retiendront, ce sont surtout
les jeux présentés. De là à parler de grand gaspillage, il n’y a qu’un pas, que
pour ma part je n’hésiterai pas à franchir…
Enorme également parce que
l’organisation parvient à contenir plus de 70 000 personnes dans ce convention
center, et que croyez moi à certains moments il peut être difficile d’approcher
une borne de démonstration (c’est là qu’on apprécie le pass presse, véritable
Graal pour accéder au nez et à la barbe de tout le monde aux différentes
présentations).
Enorme enfin, parce que quoi qu’on en dise, l’E3 reste très
loin devant toute autre manifestation de jeux vidéo, et c’est bel et bien là que
toute l’industrie se rassemble.
Des conférences inégales
Cela a été dit et redit, cette année les conférences se sont
révélées inégales. Déjà avec Microsoft qui a totalement raté la possibilité de
faire de sa conférence un évènement, avec un discours confus, longuet et
hautain,mais AUCUNE présentation concrète de jeu ou démo qui tue. Alors
que tout le monde pensait qu’ils auraient dans leur manche quelque chose de
vraiment évènementiel, on a dû se contenter de trailers trop rapides et d’une
maigre annonce de FFXI sur Xbox 360, jeu qui d’ailleurs sera une copie carbone
de la version PC et sous exploitant complètement la console. Alors certes,
Square sur Xbox c’est quand même pas rien, mais le résultat était limite
pathétique sur scène, avec en gros rien à montrer. Idem pour EA, qui était venu
défendre mollement la console de Microsoft. Et au final ces deux acteurs majeurs
de l’industrie se sont révélés bien plus passionnés à la conférence de Sony,
signe qu’il y avait quand même un malaise chez Microsoft. Et ce ne sont pas les
piètres qualités de showman de Pete Moore et Robbie Bachs (mais virez les de
scène bordel !), ni la « coolitude » de Jay « djeun ‘s » Allard assis devant une
horde de figurants gémissant à chaque annonce, qui auront permis d’oublier une
conférence complètement à côté de la plaque pour un lancement de
console.
Chez Sony, on nous l’a jouée rebelote. La conférence en a mis plein
la vue, et même si pour le moment rien de concret n’a été montré hormis une démo
mi précalculée mi temps réel de l’unreal engine 3 et une sympathique
présentation des possibilités de l’Eye Toy, il n’empêche que tous les
participants sont repartis avec les yeux qui brillaient suite aux magnifiques
démos de Killzone 2 et cie. Evidemment tout cela n’était que poudre aux yeux
puisqu’il ne s’agissait même pas de démos faites avec un moteur de jeu, mais
qu’importe, la moitié des ignares de la salle est repartie en croyant qu’il
s’agissait bien des premières images de jeux PS3. L’autre moitié est repartie
avec un léger doute certes, mais tout de même la sensation que Sony allait
frapper très fort. Et tout le monde semble convaincu de la supériorité technique
de la console sur la Xbox 360, alors même que pour le moment aucun benchmark
n’est possible vu qu’aucune des deux n’a de hardware finalisé. Il n’empêche,
cela a suffi pour lire et entendre dans les mass médias que la PS3 était deux
fois plus puissante que la Xbox 360. Ca rappellera de sombres souvenirs aux
possesseurs de Dreamcast, même si bien évidemment on ne peut que souhaiter que
cette fois Sony ne nous ait pas menti et que la PlayStation 3 sera bien
l’évènement qu’ils nous prédisent. En tout cas ce qui est certain, c’est que le
géant japonais a su impressionner, Microsoft pas. Le problème, c’est que
visiblement la stratégie du « on raconte plein de trucs qu’on peut pas encore
prouver » semble marcher vu les relais dans les grands médias (dont un soutenu
par Jeux Video.com tout de même). Et ça n’indique qu’une chose : si ça marche,
ça va vraiment se généraliser, et c’est tout sauf souhaitable.
Nintendo
enfin, qui n’a fait que présenter ses licences habituelles et s’est montré très
réservé sur sa prochaine Revolution, « pour ne pas se faire piquer l’idée »
(mouais).Quant à la Gameboy Micro, on se demande encore ce qui est passé par la
tête des dirigeants de Nintendo, tellement cette console ne nous semble servir à
rien avec son écran qui fait mal aux yeux. Reste la présentation de Zelda,
convaincante mais pas non plus révolutionnaire. On attendra donc avec impatience
l’E3 2006, où l’on en saura davantage sur la Revolution, qui suscite une grande
curiosité chez les joueurs que nous sommes.
Une Xbox 360 présente, mais qui aurait pu mieux faire
Quand on regarde ce qui était montré au public sur les stands
de l’E3, on se dit que finalement Microsoft ainsi que les éditeurs n’étaient pas
prêts pour montrer des jeux qui tuent. Si nous avons pu apprécier la délicatesse
des graphismes en haute définition, il faut reconnaître qu’il aura fallu
attendre les show très privés de Gears of War et d’Oblivion pour enfin en
prendre plein la tronche et réaliser que la nouvelle génération en a vraiment
dans le bide. Ainsi, si pas mal de jeux ont l’air d’être de bons jeux, aucun ne
nous a laissé la sensation d’être une killer ap, le jeu qui déclenchera des
explosions fantasmagoriques chez les joueurs. Seul Gears of War nous semble pour
le moment en mesure d’incarner le gouffre indispensable entre les deux
générations de consoles, et il s’agit d’une licence trop nouvelle pour vraiment
attirer les non passionnés. Il faudra donc attendre le X05 en septembre prochain
pour enfin découvrir des jeux tournant sur autre chose qu’un kit de
développement alpha à 30% des capacités finales. Et peut être poser la main sur
le très attendu PGR 3, ou encore voir un premier trailer « poseur de mâchoire »
de Halo 3 (miam !).
Evidemment, nous sommes tous conscients que ce qui était
présenté était loin d’être définitif, et que d’ici quelques mois des versions
plus avancées devraient être en mesure de nous mettre tous d’accord. Et quand
bien même, seul Microsoft a pu présenter des jeux jouables sur le salon, rendant
l’expérience Xbox 360 plus prégnante que les maigres vidéos PS3 ou le néant
total Revolution.
Ainsi, bien qu’un peu en deçà de nos attentes, la
présentation de la Xbox 360 aura permis un premier contact, en attendant de
pouvoir y voir plus clair. Surtout que l’un des gros atouts de la console, à
savoir un nouveau Xbox Live très performant, n’a pas pu être vraiment montré. Et
pour être honnête, cette console a le mérite d’être sympa et attirante avec son
design doux et personnalisable, comme si on l’avait déjà adoptée et qu’elle
pouvait vite devenir un objet à la mode. C’est plutôt bon signe.
Quels jeux retenir ?
Une chose est certaine, LE jeu du salon, celui qui nous aura
vraiment marqués et dont on n’en peut plus d’attendre les premières versions
jouables, c’est Gears of War. Peut être encore inconnu de la plupart, le titre
développé par Epic s’est révélé à la fois techniquement impressionnant,
esthétiquement magnifique, et ludiquement très prometteur. Il s’agit sans nul
doute du premierjeu qui fera ressentir aux joueurs le fossé qui existe
entre la Xbox et la Xbox 360, et si Microsoft arrive à le sortir à temps il
risque de mettre une sacrée pression à Sony. Pour dire, toutes les images que
vous pouvez voir traîner sur le net (hormis les dessins) sont des images ingame.
Pour certains c’est difficile à croire, mais c’est juste totalement vrai.
D’ailleurs aucun autre jeu du salon ne pouvait tenir la comparaison
graphiquement parlant, pas même les plus beaux jeux PC.
Hormis Gears of War,
l’autre très bonne surprise n’était autre que la suite de Morrowind, à savoir
Oblivion. Beau et visiblement très profond, si le jeu de Bethesda sort à temps
(c’est-à-dire à Noël), nul doute qu’il fera tourner pas mal de têtes, et
offrirait en plus un jeu profond dès les premières semaines d’existence de la
Xbox 360, ce qui est toujours bon à prendre.
Autre jeu très attendu, King
Kong, qui sortira sur Xbox et Xbox 360 (et PS2/GC évidemment). On vous en a déjà
parlé, pour le moment il est encore difficile de juger de la qualité de
l’aventure vidéoludique, mais l’univers qui nous a été montré semble vraiment
trippant et hautement immersif. C’est clairement l’un des jeux à surveiller de
près, peut être même le carton de l’année. Quand on voit à côté un Far Cry
Instincts très convaincant et un Prince of Persia 3 très aguicheur, on se dit
qu’Ubi Soft est définitivement très en forme cette année.
Enfin, on notera un
Electronic Arts sans surprise mais très efficace avec ses suites sur Xbox 360,
et un Sega enfin prêt à varier un peu les plaisirs avec un Condemned prometteur
et un Full Auto au capital fun indéniable.
Chez Microsoft, c’est un
convaincant Kameo qui aura tenu le haut du pavé sur le stand, alors que Perfect
Dark Zero n’était montré que confidentiellement et qu’il semble avoir encore
besoin de quelques mois de développement pour faire éclore son potentiel. En
revanche, la déception du salon reste Half Life 2, dont la version Xbox est très
loin d’être techniquement à la hauteur de son homologue PC.
Et après ?
Finalement, cet E3 édition 2005 est vraiment apparu comme un
salon de transition, avec des consoles nouvelle génération encore à leurs
balbutiements, la Xbox 360 étant clairement la plus avancée (et pour cause, elle
doit être chez vous dans 6 mois). Manifestement les éditeurs préfèrent
maintenant présenter leurs grands projets dans leurs salons respectifs, avec par
exemple Microsoft qui attendra le X05 pour se lâcher (du moins c’est ce qu’on
nous a fait comprendre). Peut être ont-ils peur de voir leurs annonces se faire
étouffer par la concurrence. On peut le comprendre, après une conférence
Microsoft totalement éclipsée par la conférence Sony, alors que fondamentalement
la Xbox 360 reste une console plus que prometteuse, avec une vision de
l’évolution du marché vers l’ouverture et la personnalisation plutôt pertinente.
Il n’empêche qu’on ne peut être que déçu, alors qu’on s’attendait à en
prendre plein la gueule de la part des trois constructeurs. A côté de ça on a
surtout vu une débauche marketing plutôt écoeurante, une enfilade de suites et
très peu de projets originaux, comme si toute l’industrie était en stand bye
niveau créativité. Seul Spore (prévu sur PC, par le créateur de The Sims), que
nous n’avons pas vu mais qui a visiblement époustouflé toute la presse PC,
semble en mesure de faire avancer l’industrie du jeu vidéo. A part ça, tout le
monde a un peu le cul entre deux chaises, avec une peur des coûts
d’investissement se soldant par une créativité bridée, et l’envie d’en mettre
plein la vue par ailleurs. Du côté des joueurs, on se dit qu’il va falloir
patienter quelques mois avant de voir des jeux offrant une expérience de jeu
autre que des jeux actuels en haute définition. Et c’est là que la sortie rapide
(et pas si prématurée que ça vu la stagnation totale sur les consoles actuelles)
de la Xbox 360 risque de lui offrir un avantage : entre des coûts de
développement moindres que sur sa principale concurrente et pas mal de mois
supplémentaires accordés aux développeurs pour la dompter, la console de
Microsoft a des chances de proposer rapidement une ludothèque de qualité.
En
attendant d’en avoir la confirmation, la guerre des annonces toutes plus
agressives les unes que les autres ne fait que commencer, avec trois
constructeurs luttant âprement pour régner sur la prochaine génération. Certains
y laisseront immanquablement des plumes, et nous espérons que cette concurrence
saura produire une émulation positive, et incitera les grands noms de ce milieu
à oser la différence et l’originalité. Pour le moment autant être honnête, c’est
pas gagné.
Au passage on vous rappelle que
vous pouvez lire ou relire nos comptes rendus sur tous les jeux qui nous ont
marqués durant ce salon. Ca se passe
jour) . Le détail de la conférence Microsoft est lui aussi
accessible,
à cet endroit .
Par ailleurs, Zac vous propose son portfolio d’images sélectionnées
pour tous ceux qui voudraient voir des images de l’E3 et de
Los Angeles.
Merci à tous de nous avoir lus et à l’année prochaine pour un
E3 qu’on espère plus riche en annonces et découvertes !