Débat de la semaine : le jeu vidéo est-il un art ?
C’est la couverture du dernier Canard PC, elle-même relayée par le blog de Playtime, qui ravive le débat cette semaine en superposant la tête de Mario sur le corps de La Joconde et en demandant si le jeu vidéo peut être assimilé à de l’art. Si la question avait été posée il y a quelques années, elle en aurait faire sourire plus d’un et, même aujourd’hui, on parle davantage de «loisir numérique». Or, l’appellation «œuvre (d’art)» serait toutefois bénéfique puisqu’elle légitimerait le contenu du jeu, en le protégeant comme on préserve un patrimoine. Ainsi, les créateurs de softs pourraient lutter plus efficacement contre la reproduction, la tricherie, le piratage au même titre que les artistes musicaux ont, par exemple, des droits établis auprès de la SACEM.
Pourtant, beaucoup semble ne pas vouloir comparer une production vidéo ludique à une peinture ou une sculpture simplement parce que le jeu traîne cette réputation de loisir – avérée cependant – et que l’on oublie facilement le plaisir qu’il procure aux yeux comme cela pourrait être le cas avec une œuvre picturale. Certes, il n’y a pas de musée du jeu vidéo à proprement dit et l’on ne notera jamais une peinture de Pablo Picasso, de Vassili Kandinsky ou même d’un inconnu !
Etablissons plutôt notre parallèle avec un art plus «récent», le septième en l’occurrence, puisqu’à bien des égards la création d’un jeu vidéo ressemble à celle d’un film. Comme pour son homologue des salles obscures, le jeu vidéo nécessite de nos jours un budget important, dépassant même parfois celui de certaines productions hollywoodiennes. L’équipe de développement intègre un scénariste, un producteur, un spécialiste des décors, un dialoguiste, des acteurs qui prêteront leurs voix, des faiseurs d’effets spéciaux…sans omettre d’importants dispositifs marketing.
En outre, les films aussi sont «notés» (que ce soit dans un magazine ou sur un site Internet) et dans les deux cas, la moyenne obtenue influence presque toujours les entrées / ventes. Le blog de Playtime fait d’ailleurs référence à une étude produite par l’Electronic Entertainment Design and Research (EEDAR) datant de septembre dernier et stipulant que les titres obtenant un résultat de plus de 90% sur 100 s’écoulent à plus de 531 % que la moyenne. Pourtant (et pour reprendre notre pirouette), si l’on entend de bonnes critiques concernant une exposition d’œuvres dites traditionnelles, on visitera plus volontiers certains sites ou musées parce qu’ils font partie du patrimoine de l’humanité.
Quel titre accorder alors au jeu vidéo, sachant qu’il n’y a pas de critères spécifiques pour qualifier une œuvre d’art ? Allons nous vers une reconnaissance plus affirmée envers ce type de création ? En un sens oui, indéniablement, notamment grâce à la distinction de Chevalier dans l’Ordre des Arts et des Lettres obtenue par trois créateurs français ou à l’anoblissement de Peter Molyneux outre-Manche. Néanmoins, est-ce le potentiel créatif qui est récompensé ou le potentiel pécuniaire au vu des résultats pharamineux engendrés par cette industrie. Le débat n’est pas prêt de s’arrêter et chacun y va de ses critères (scénario, graphismes, gameplay, genre…) pour avancer ses arguments. Avant de nous présenter les vôtres, nous vous invitons à lire ceux postés lors de cette discussion sur Wikipédia ainsi que l’article de Raton Laveur. Enfin, pour dernière information, les huitième et neuvième arts étant respectivement le dessin animé et la bande dessinée, le jeu vidéo devrait hypothétiquement devenir le dixième.