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03.03.2010 à 10h53 par |Source : Rédaction

Dossier > Le Néo Retro Gaming

Le jeu vidéo est en crise. Crise financière tout d’abord, mais aussi crise intellectuelle. Beaucoup d’éditeurs semblent avoir du mal à se renouveler et sortent chaque année de simples nouvelles éditions de leurs titres phares. D’autres tentent d’innover coté univers mais calquent le gameplay sur des hits concurrents ayant fait leurs preuves. L’univers vidéoludique est donc plongé dans un profond marasme et il est difficile pour les acteurs du marché de se démarquer du lot. Devant l’engouement de nombre de joueurs pour les jeux du passé, certains éditeurs se sont engouffrés dans la brèche de ce que nous appellerons ici le « Neo Retro Gaming », où comment faire du neuf avec du vieux.
Le simple remake

On le sait, le retro-gaming est en vogue, surtout depuis l’avènement d’Internet et des nombreuses possibilités d’émulation. Cette pratique pourtant interdite (quoique souvent tolérée) permet à beaucoup de joueurs de redécouvrir les hits qui ont forgé notre univers de jeu. Surfant sur cette vague, plusieurs éditeurs ont proposé des compilations de leur glorieux passé, avec plus ou moins de succès. Sega avec sa « Sega Megadrive Ultimate Collection », Namco avec son « Namco Museum Virtual Arcade », ou encore Capcom avec ses diverses collections sorties sur PSP. Mais voilà, du coté des joueurs, beaucoup grognent sur cet argent facile.

Pour les éditeurs, il ne suffit donc plus de regrouper toutes ses vieilleries sur une même galette, il faut désormais remettre les jeux au goût du jour. Tout comme pour le cinéma, la mode est au remake. Si Sega se contente du minimum syndical (un filtre de lissage, des sauvegardes, des succès et parfois du online), d’autres s’investissent un peu plus. Capcom, par exemple, propose ainsi une véritable refonte haute définition de son mythique Street Fighter II. Lucas Arts et Tozai Games, pour leur part, ont opté pour la refonte totale de leur jeu, tout en gardant la possibilité au joueur de basculer à tout moment de la nouvelle version au jeu d’origine. C’est ainsi le cas de « R-type Dimensions » et de « The Secret of Monkey Island Special Edition ». Pour Ubisoft par contre, pas question de développer un jeu en gardant les contraintes d’époques. Il faut tout refondre intégralement, et même adapter le gameplay si nécessaire. C’est ainsi que « TMNT : Turtles in time », remake de l’ancien jeu de Konami, a intégralement été refait en 3D, avec plus ou moins de succès.



Dans tous les cas l’objectif est de garder la structure du jeu de base, et les spécificités qui en ont fait un hit. L’opération s‘apparente généralement à un lifting pour redonner un petit coup de jeune et de justifier le prix demandé. Au final pour le studio en charge du projet, nul brainstorming pour trouver des idées nouvelles, ni pour trouver un scénario original ou d’idées géniales. Tout est déjà en place et il ne reste qu’à opérer. C’est donc un gain de temps et d’argent considérable qui profitent à tous. Pour les éditeurs c’est un moyen de créer des jeux simplement, à coût moindre. Pour les joueurs c’est l’assurance de voir leur titre fétiche survivre au temps, et la possibilité pour eux de le redécouvrir sous un jour nouveau.


Une nouvelle forme de Retro gaming

Pourtant, les nouveaux joueurs, arrivés sur le marché après l’ère Playstation ont encore bien du mal à s’adapter aux anciennes mécaniques de jeu. Un simple relookage ne suffit plus et il faut les sustenter avec des techniques modernes et des jeux plus évolués. Désormais, un jeu se doit d’avoir un scénario intéressant, de permettre de varier le gameplay, et d’utiliser un maximum de touches de la manette. Pourtant un tel jeu coûte cher aux éditeurs, qui aiment de moins en moins prendre des risques. Plutôt alors que d’essayer d’instaurer une nouvelle licence, ces derniers s’appuient sur des valeurs qui ont déjà fait leurs preuves. Mais voilà, comment ne pas distribuer suite sur suite dans un tel contexte ? La réponse se trouve dans les fonds de tiroir. Difficile de savoir qui a commencé, mais la mode est lancée, et tout éditeur qui se respecte cherche à trouver dans son catalogue d’antan les licences prêtes à servir de moule pour une suite contemporaine.

Beaucoup de fans d’anciens jeux rêvent d’une sequelle qui profiterait de toutes les dernières technologies. Quoi de mieux dans ce cas que de leur servir cela sur un plateau d’argent ? Pourtant, le passage d’un jeu d’une époque à une autre n’est pas quelque chose d’aisé. Beaucoup s’y sont cassé les dents. Si la technique a évolué, les notions de game design aussi. On ne fait plus un jeu de nos jours comme on le faisait autrefois. Les joueurs sont à la fois plus exigeants (sur la technique ou l’histoire) et moins regardant (sur le gameplay ou la replay value). La fonction de sauvegarde n’est plus une option, l’exploration est devenu une partie prédominante dans les jeux, la difficulté se doit d’être raisonnable, le scénario se doit d’être non seulement présent, mais également raconté avec brio dans de nombreuses cut-scenes. Bref tout doit être revu et corrigé. Pourtant lorsqu’on s’éloigne trop du matériau d’origine, la suite sera forcement rejetée par les fans qui s’écrieront « c’est Golden Axe ce truc ? » .





Sega est un des éditeurs les plus prolifique dans l’art du Neo Retro Gaming. Pourtant il est loin d’être celui qui a su le mieux appréhender l’exercice. Malgré le vivier de licences prestigieuses, Sega a malheureusement massacré nombre de celles-ci. On ne compte plus les essais ratés (Altered beast, Golden Axe, Shinobi, Shining Force…) dont les nouvelles versions n’ont plus beaucoup à voir avec leur ancêtre. A titre d’exemple, le « Altered Beast » des années 16 bits avait pour thématique la mythologie, quand l’épisode Playstation 2 se base sur d’hasardeuses histoires de manipulations génétiques. Fort heureusement l’éditeur n’a pas tout raté et quelques licences s’en sortent plutôt bien (Outrun par exemple).

Devant un tel constat, les joueurs sont à la fois impatients d’avoir une suite à leur licence fétiche, et craintifs devant le résultat possible. Si Sega ratait un Streets of Rage ou un Wonderboy (par exemple) cela serait certainement une déception de trop. Mais Sega n’est pas le seul acteur à occuper ce marché. Ainsi donc Tecmo à su ressortir « Ninja Gaiden » et « Rygar » du placard, tandis que Capcom, en sus de quelques suites sur les plateformes de téléchargement (Commando, 1943…) s’est aussi lancé dans un remake tridimensionnel de « Bionic Commando », avec un résultat finalement plutôt convainquant, qui laisse espérer un éventuel « Strider » next-gen.


Et du vieux avec du neuf c’est possible ?

En sus de cette tendance actuelle, un autre phénomène est apparu, et est amené à se développer. L’investigateur de cette tendance n’est autre que Capcom qui, avec son Megaman 9, a surpris plus d’un joueur. L’idée n’était plus de faire un vieux jeu avec les techniques de pointes, mais au contraire, de faire un nouveau jeu avec le feeling rétro. Ode aux pixels en puissance, ce jeu a su s’attirer les faveurs d’un bon paquet de hardcore gamers enfin rassasiés par ce festin de roi. Tout ou presque est comme sur la bonne vieille NES, même les bugs d’affichage, autrefois générés par les limitations de la machine, et désormais simulés pour faire « comme si ». De nos jeux modernes, Capcom n’a conservé que les succès et le contenu téléchargeable. Le jeu s’est suffisamment bien vendu pour que Capcom réfléchisse à d’autres adaptations du même genre. L’avenir nous dira donc si cette voix est viable.


En attendant, d’autres éditeurs/développeurs se sont penchés sur le sujet. C’est ainsi que Konami a développé sur la plateforme de téléchargement de Nintendo quelques hits réalisés comme à l’époque. Gradius, Contra, et bientôt Castlevania sont autant d’exemples de nouveaux jeux sentants bon l’artisanat. Est-ce une prise de conscience des développeurs que les gameplay d’époque ne soient pas compatibles avec des technologies plus évoluées, où est-ce simplement une nouvelle mode ? Toujours est-il qu’un certain nombre de studios tentent un retour aux sources. Ainsi, après plusieurs épisodes ratés en 3D, la série Worms est revenue aux joies bidimensionnelles. De même, Street Fighter IV de Capcom est bien plus proche du deuxième opus que des suivants. Autre exemple, la mascotte de Sega, après moult épisodes en demi teinte (pour rester gentil), revient aux bases (Sonic the Hedgehog 4) pour ésperons le plus de succès.

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