Test : Dead Space (X360) sur Xbox 360
C’est dans la combinaison rouillée d’un certain Isaac Clarke que l’aventure Dead Space débute. Mécano du futur, il est envoyé avec deux ou trois autres de ses camarades inspecter un vaisseau à la dérive dans l’espace qui ne donne plus aucun signe de vie, l’USG Ishimura (mourra pas ? Ok, fallait qu’on la sorte). Par vaisseau, il faut comprendre gigantesque station spatiale, capable d’abriter un millier d’ouvriers. Des trouffions qui, bizarrement, ont dû trop picoler la veille, puisqu’aucun d’eux ne daigne répondre aux multiples appels radios émis. C’est que dans l’espace, les soirées mousses doivent avoir une sacrée gueule !
Pas calibré casual pour un sou, le jeu demande à plusieurs reprises d’évaluer une situation avant de se lancer dedans tête baissée. En situation de combat par exemple, le joueur doit être capable non-seulement de maîtriser les commandes de son personnage (ce qui nécessite déjà un certain temps d’adaptation avec tous les raccourcis possibles), mais surtout de sélectionner les bonnes armes et aptitudes pour affronter les mutants. Car les ennemis dans Dead Space ne se trouent pas, ils se découpent. Adieu donc les armes perforantes que l’on a l’habitude de retrouver dans les jeux du genre (flingues en tête), place désormais aux outils du parfait petit boucher du futur : Cutter plasma, trancheur, découpeur, les membres nécromorphes vont voler ! Heureusement d’ailleurs puisque c’est la seule manière efficace de ralentir puis de tuer ses adversaires.
Space Clarke
Derrière son charisme intersidéral qu’un certain Master Chief n’aurait rien à envier, Isaac, sous son armure lourde de mécanicien du futur, cache des talents bien particuliers. Il est tout d’abord capable de ralentir momentanément le temps de manière ciblée (mais cela coûte de l’énergie, à recharger avec des objets spéciaux ou grâce à une « pompe à stase »). Utile lorsqu’une porte nous menace de nous couper en deux à cause d’un court-circuit. La télékinésie fait aussi partie de la liste des aptitudes, permettant ainsi de déplacer divers objets lourds. Des « pouvoirs » à utiliser à certains moments clés dans l’aventure, pour des situations que nous n’oserons pas qualifier d’énigmes.
Heureusement, il est possible d’utiliser ces compétences spéciales à tout moment dans l’aventure, et donc pendant les combats. C’est justement là qu’elles prennent véritablement leur importance. Lorsque plus de cinq mutants commencent à s’inviter par surprise dans le placard qui sert de salle de sauvegarde, le petit réflexe santé du matin « ralentissement ciblé » peut vite s’avérer plus vital qu’un Actimel, alors qu’un peu de télékinésie bien utilisée peut rapidement réchauffer l’atmosphère, en envoyant par exemple un baril explosif sur les nécromorphes. Lorsque le personnage entre dans une zone sans gravité, un système s’enclenche automatiquement permettant ainsi à Isaac de marcher sur les murs, les plafonds, ou de se jeter dans un gigantesque saut sur une paroi au loin. Certaines de ces zones sont d’ailleurs privées d’oxygène. Il faudra alors prévoir à recharger son costume en O² grâce à des pompes placées ici et là, ou en emportant dans son inventaire des recharges mobiles, histoire de pas crever étouffé comme une bourrique.
La gestion de ces « points de force » est donc l’élément central du système d’évolution de Dead Space. Ils peuvent également servir à ouvrir certaines portes, ce qui les supprimera de l’inventaire, confinant certains choix aux limites du cornélien. Signalons également le grand retour des coffres de stockage, étant donné que l’inventaire est limité selon le niveau de l’armure. Les armes enfin, au nombre de sept, disposent chacune de deux types de tirs distincts, de quoi pimenter encore un peu les affrontements. Pad en main, le soft demande en tout cas un léger temps d’adaptation, puisque tous les boutons de la manette ont une fonction, voire une double fonction lorsque tel bouton est maintenu en même temps.
Comme nous le disions, Dead Space s’adresse avant tout aux joueurs aguerris. Le plus fort, c’est que malgré la puissance présumée des armes, malgré les compétences spéciales du héros, malgré la possibilité de donner coup de poing et coup de pied, il est juste impossible de se sentir en sécurité. Les adversaires sont retors, et les affrontements sont rarement de tout repos, toujours redoutés. Si bien que les rencontres se suivent mais ne se ressemblent pas, grâce en partie au génial système de démembrement, aux fonctions multiples des armes, et au bestiaire fort intéressant et vraiment dégueulasse, peu avare d’entrées en scène aux petits oignons quand une nouvelle créature pointe le bout de ses entrailles sanguinolentes.
Carpenter Mecanic
Dead Space ne ressemble pas seulement à un film de genre lorsqu’on le regarde, il est aussi profondément inspiré des musts cinématographiques. En plus d’emprunter généreusement les meilleures idées vidéoludiques de la concurrence, le soft d’EA rend en effet de nombreux hommages à différentes œuvres du septième art. Les couloirs aux lumières stroboscopiques d’Alien, le vaisseau torturé (et le pitch) aux limites d’Event Horizon, les monstres directement sortis des immondices humano-extra-terrestres de The Thing, la voix de l’I.A centrale doublée par Enrico comme ce que l’on a pu entendre dans Un Ticket Pour l’Espace (oh ça va, on déconne), les exemples sont nombreux.
Pourtant, l’univers créé se révèle curieusement crédible et uniforme, à l’inverse des habitants protéiformes qui l’habitent. Un univers plausible et terrorisant, magnifié par une technique stratosphérique. Le jeu se déroulant en intérieur, les développeurs ont ainsi pu maximiser le rendu des textures et des effets visuels. Résultat ? Graphiquement parlant, Dead Space impressionne (oui, on peut encore l’être de nos jours, du moins avant Gears of War 2), avec des textures au top du top et une multitude de détails graphiques du meilleur goût (poussière ambiante, goutes qui tombent contre la tuyauterie, reflets). L’architecture même des niveaux respire l’ingéniosité et l’esthétisme spatial. Les ponts, les murs, les plafonds ont une gueule recherchée, avec une géométrie agressive et des surfaces creusées qui laissent apparaître divers tuyaux, câbles, et autres joyeusetés qui ne manqueront pas d’effrayer inutilement les plus pétochards qui y verront des tentacules de mutants avant l’heure. Les effets spéciaux ont eux aussi bénéficié d’un soin maladif, en particulier ceux jouant avec la réticule de la caméra (vive l’autofocus). Il est tellement bon de voir que ce bon vieil effet de lens flare a lui aussi réussi à évoluer avec le temps, pour un résultat enfin bien supérieur à ce que l’on a l’habitude de voir au cinéma, et sa limitation première qu’est la réticule de la caméra physique.
Dead Space est donc une expérience impressionnante, maîtrisée par ses géniteurs mais indomptable pour les joueurs que nous sommes. Les créatures de l’enfer surgissent toujours au pire des moments. Si bien que l’on se met à flipper dès que l’on passe près d’une conduite d’aération, comme à la bonne vieille époque des fenêtres du premier Resident Evil. Tout est fait pour que l’on flippe un maximum. Les portes par exemples, qui se referment automatiquement dès que l’on se trouve un peu loin d’elles, empêchent le camping rassurant. Le jeu est éprouvant et plutôt difficile. Il est tout à fait possible de se trouver en rade de munitions si l’on en gaspille trop dans la panique, chose finalement assez rare une fois de plus dans les jeux d’aujourd’hui, un peu comme dans un Bioshock qui proposerait moins d’armes et moins de munitions encore. Heureusement, le jeu gère les bonus lâchés par les monstres détruits et cachés dans les boîtes de manière intelligente. Isaac ne pouvant porter sur lui que quatre armes (à sélectionner grâce aux directions de la croix directionnelle), les munitions qu’il pourra ramasser dans les dédales crasseux de l’Ishimura seront toujours en adéquation avec ce qu’il possède dans son inventaire. Si le lance-flammes est par exemple déposé dans le coffre/stock et qu’il prend la poussière car non-équipé par le joueur, alors il sera impossible de ramasser (gratuitement) des combustibles dans l’aventure, le jeu attribuant automatiquement les munitions des armes accessibles via l’inventaire actif du joueur. Une excellente idée qui permet de gérer ses réserves de munitions sans faire d’éternels allers-retours vers les coffres.
Que rajouter de plus devant tant d’éléments qui montrent clairement que Dead Space est un jeu réfléchi et travaillé, aussi bien sur son ambiance que dans ses mécanismes de jeu. Alors oui, le scénario est un peu basique et les objectifs manquent souvent d’originalité (trouver une clé pour ouvrir telle porte, ça n’a jamais été terriblement bandant), malgré quelques passages ponctuels plus diversifiés. Le jeu demande aussi de faire des allers-retours un peu trop appuyés dans les couloirs hi-tech du vaisseau, ce qui pourra en faire tilter quelques uns, mais le plaisir de l’angoisse est là, et on ne peut s’empêcher d’attendre avec impatience la prochaine fois que l’on se retrouvera dans une situation impossible. Une réussite intersidérale.
+
- Game design couillu et au poil
- Techniquement de haut vol
- Plein de bonnes idées
- Un 5.1 géré comme jamais
- Durée de vie conséquente
-
- Quelques allers-retours qui font tache
- Missions et scénario basiques