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Eiyuden Chronicle: Hundred Heroes

RPG | Edité par 505 Games | Développé par Rabbit & Bear Studios

9/10
One : 23 avril 2024 Series X/S : 23 avril 2024
22.04.2024 à 08h47 par - Rédacteur en Chef

Test : Eiyuden Chronicle: Hundred Heroes sur Xbox Series X|S

Le JRPG 100 compromis

En récoltant près de trois millions d'euros lors de sa campagne Kickstarter lancée durant l'été 2020, Eiyuden Chronicle: Hundred Heroes a prouvé que l'amour des joueurs pour le JRPG était tenace, et d'autant plus lorsqu'on leur susurrait le nom de Suikoden à l'oreille. A tel point que les développeurs japonais de Rabbit & Bear Studios se sont permis de retarder le projet en sortant un spin-off sous-titré Rising en 2022, avant de nous servir le plat de résistance. Et pour le coup, on a droit à de la grande gastronomie, très inspirée par les recettes du passé.

Ce n’est pas pour rien que l’étiquette de la franchise Suikoden colle autant à la peau de ce Eiyuden Chronicle: Hundred Heroes. Alors que la licence de Konami est enfermée à double-tour dans un placard dont la clé a été balancée dans l’océan, le créateur originel de la série Yoshitaka Murayama décide de monter son propre studio pour poursuivre son œuvre sans avoir à passer par l’éditeur japonais. Une excellente idée qu’il n’aura finalement pas vécu jusqu’à son terme puisque le producteur nippon nous a malheureusement quitté il y a quelques semaines. En dépit de cette tragédie, Eiyuden Chronicle: Hundred Heroes sort dans une forme aboutie et qui ne manque pas de rappeler sa source principale d’inspiration dès les premières minutes de jeu, en reprenant la caractéristique principale de la série Suikoden : un nombre de personnages jouables énorme et des combats au tour par tour capables d’accueillir jusqu’à six d’entre eux.

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Côté scénario, Eiyuden Chronicle: Hundred Heroes nous place aux côtés de Nowa, une jeune recrue de la Garde. Sa première mission envoie son équipe en co-expédition avec des membres de l’Empire, dans le but de trouver une lentille runique primitive dont la puissance pourrait changer la face du monde. Les joueurs qui ont fait Eiyuden Chronicle: Rising y retrouveront le même lore en toile de fond, avec ces lentilles capables d’attribuer des pouvoirs magiques, tandis que plusieurs personnages font leur retour à l’image de Garoo, Mellore ou encore Gocteau. Les liens entre les deux titres restent toutefois suffisamment discrets pour ne pas mettre de côté les joueurs qui débuteraient la franchise avec cet épisode bien plus complet que son prédécesseur. Si le doute était encore permis, avec Hundred Heroes on s’aperçoit assez rapidement que Rising n’était en réalité qu’un petit avant-goût de ce qui nous attendait, avec deux titres finalement très différents sur le fond, et même dans la forme.

Là où Rising optait pour des déplacements en 2D et des combats dynamiques façon A-RPG, Hundred Heroes se rapproche bien plus des JRPG traditionnels de l’ère 32-bits avec de la 3D pour les environnements et des affrontements au tour par tour. Au final seul le bestiaire et les personnages (héros et PNJ) sont en 2D, pour un résultat qui rappelle un peu les dernières productions HD-2D à la Octopath Traveler, mais avec une pixellisation bien moins accentuée. Un mélange qui fonctionne très bien ici, pour un rendu général s’étalant du très soigné, au superbe et une version Xbox Series X qui ne souffre d’aucun souci de résolution. Les décors et les intérieurs sont fouillés et bien détaillés, tandis que les compositions musicales rappellent des thèmes plus old-school pour une aventure qui réalise finalement un sans-faute du côté de sa direction artistique. Les animations sont également d’excellentes qualité et concrètement on prend beaucoup de plaisir à évoluer dans cet univers plein de vie imaginé par Yoshitaka Murayama.

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Globalement, on n’aurait d’ailleurs qu’un seul vrai reproche à faire à cet Eiyuden Chronicle: Hundred Heroes. En misant sur la pléthore de personnages jouables, le groupe peut être constitué de six héros pour les combats. Un chiffre qui tranche avec les productions standardisées qui nous ont habituées à des groupe de trois à quatre personnages maximum. Si l’idée est intéressante sur le papier tout en permettant de faciliter le turnover et d’éviter ainsi de laisser des héros au placard, elle montre ses limites dans le jeu, et notamment sur le temps de préparation à chaque tour. Même si les choix se limitent aux traditionnelles commandes attaque, magie, défense objets et fuite, le système parait particulièrement lourd de prime abord. Heureusement, les développeurs ont pensé à inclure un mode «auto» qui permet de laisser la main au jeu, avec la possibilité de doser les actions de chacun en élaborant des stratégies via le menu. De quoi accélérer des débats parfois trop longs et fastidieux, pour mieux reprendre la main lors des phases de boss, nettement plus ardues et qui disposent de quelques variantes appréciables avec la possibilité d’interagir, parfois, avec des éléments du décor. A noter la présence d’une barre d’ATB (Active Time Battle) qui permet d’organiser au mieux les actions à réaliser, notamment quand il s’agit de prodiguer des soins.

Pour le reste, c’est clairement un titre qui ravira les amateurs du genre. Disposant d’un excellent rythme, le jeu de Rabbit & Bear Studios nous promet de voyager à travers diverses régions, tout en variant ses environnements avec la montagne enneigée, le canyon tortueux, la forêt d’arbres géants, de petits villages et de grandes villes, entre autres. Des lieux connectés par une carte à parcourir librement. Sans être extraordinaire, le level-design des donjons est satisfaisant, et n’oublie pas de ponctuer l’avancée à travers de longs couloirs de mécanismes à activer pour continuer d’avancer. Déplacer un chariot de mine, se transformer en glaçon inarrêtable pour franchir un ravin ou faire pivoter des parois pour se créer un chemin dans un temple runique, tout est fait pour éviter la redondance, tout en alternant ces phases avec la rencontre d’ennemis de façon aléatoire. C’est simple, et même si on a déjà vu bien mieux ailleurs (avec Sea of Stars pour citer un titre récent), c’est plutôt efficace. Pas de jaloux concernant la jouabilité puisqu’il est possible de se déplacer et de naviguer dans les menus avec, au choix, le stick gauche ou le BMD (bouton multi-directionnel) ce qui devrait combler les puristes.

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Sans aller chercher l’innovation à tout prix, Eiyuden Chronicle: Hundred Heroes se veut également très traditionnel dans ses mini-jeux. En bon nombre, on regrette tout de même que la plupart ne présentent pas un énorme intérêt, et un gameplay généralement très limité. Entre le jeu de pêche qui mise sur vos réflexes et les batailles de toupies façon Beyblade qui ne procurent aucun plaisir, on déchante un peu quand vient le moment de sortir la tête des combats et des donjons. Même chose avec les séquences de batailles pas hyper passionnantes et qui voient s’étirer en longueur des affrontements chaotiques même si on souligne la volonté d’avoir voulu densifier le contenu du titre. Heureusement, le jeu de cartes et la reconstruction du château se veulent déjà un peu plus intéressants. Sans tomber dans le jeu de gestion pur et dur, la possibilité de développer le camp de l’Alliance devient rapidement addictif, avec la nécessité de trouver des ressources et en obligeant à trouver certains partenaires précis pour permettre l’ouverture de divers établissements comme la boutique d’armures, le restaurant ou encore les sources d’eau chaude.

Et trouver un maximum de compagnons devient rapidement une priorité, que ce soit pour occuper les différents postes du château, ou pour venir grossir les rangs de notre petite armée hétéroclite. Au fil de notre voyage et du scénario, on rencontre ainsi des personnages qui rejoignent automatiquement le groupe en place, tandis que la trame scénaristique vous impose régulièrement d’intégrer un ou plusieurs membre aux phases de combats. Plusieurs héros sont en revanche facultatifs et donc ratables, et ne se joindront à la cause de Nowa que si le joueur parvient à répondre à leurs attentes, là aussi diverses et variées. Un face-à-face à remporter, un objet à récupérer ou un ami à sauver, on prend plaisir à satisfaire les requêtes pour accueillir de nouveaux partenaires de route. Mieux encore, certaines attaques appelées «combo de héros» nécessitent d’avoir plusieurs personnages disposant d’affinités ou de points communs particuliers pour être déclenchées. Un point qui vient renforcer ce besoin presque viscéral de recruter absolument tous les héros, aidé de la voyante capable de localiser approximativement ceux qui manquent encore à l’appel.

9/10
Il n'y aurait sans doute pas pu avoir plus bel hommage à Suikoden que ce Eiyuden Chronicle: Hundred Heroes. Au-delà de ses combats un peu poussifs, le titre de Rabbit & Bear Studios s'est parfaitement imprégné de ce qui faisait la force de la franchise de Konami avec un nombre de personnages à recruter hallucinant et un parfum d'aventures bien présent. Deux éléments qui rendent l'expérience particulièrement addictive et donnent l'envie d'y retourner dès la manette lâchée. Eiyuden Chronicle: Hundred Heroes constitue qui plus est une bonne porte d'entrée pour les joueurs qui souhaitent découvrir le genre du JRPG au tour par tour, et un véritable indispensable pour les habitués.

+

  • De nombreux personnages à recruter
  • Direction artistique très réussie
  • Donjons et environnements variés
  • Aventure à la fois old-school et moderne
  • Gestion du château addictive
  • Très généreux dans son contenu
  • Design des persos globalement sympa
  • Deux modes de difficulté

-

    • Combats qui manquent de rythme
    • Plusieurs mini-jeux trop moyens