Test : Lies of P sur Xbox Series X|S
Au bouleau !
C’est au fond d’un wagon, dans un train à quai, que commence Lies of P. Le joueur contrôle Pinocchio, dans une version revisitée du conte imaginé par Carlo Collodi à la fin du XIXème siècle. Ne vous attendez donc pas à retrouver des similitudes avec le grand classique de Disney, ici l’œuvre italienne sert surtout de prétexte pour offrir un jeu d’action à la troisième personne. En quittant notre le train, notre héros est amené à prendre les armes, avec un premier choix à faire avant de se lancer dans l’aventure. Par l’intermédiaire d’épées et de sabres posées sur une table, le titre de Round8 Studio nous invite à définir notre style de jeu de départ, avec la possibilité d’opter pour la force brute ou la rapidité d’exécution, alors que le troisième et dernier choix contentera ceux qui souhaitent couper la poire en deux.
L’action de Lies of P débute réellement à la sortie du train, avec deux automates qui ont décidé de vous mettre des bâtons dans les roues. L’occasion de vous familiariser avec le gameplay du titre, qui reprend absolument toute la recette des Souls. Attaque, parade, esquive, voici le trio de possibilités qui vous accompagnera dans tous vos combats, avec l’obligation de faire preuve de précision et de timing pour éviter de voir trop souvent l’écran de Game Over. Car, comme beaucoup de jeux du genre, Lies of P est punitif et ne vous laissera finalement que peu de répit, avec cette capacité d’apporter une expérience émotionnelle très contrastée chez le joueur. Alors que l’essentiel du jeu vous demandera de composer avec de la frustration, et des envies d’abandonner face à un ennemi qui semble imbattable, la réussite d’une séquence compliquée est inversement proportionnelle, laissant pointer de vrais sentiments de fierté et de joie. Un titre impossible à mettre entre toutes les mains donc, d’autant que celui-ci se pose dans le haut du panier en termes de difficulté.
Pour tenter de s’en sortir, il devient alors indispensable de maitriser l’ensemble des mécaniques de jeu imaginées par Round8 Studio. Autant le dire tout de suite, si vous êtes un adepte des Souls, vous ne serez absolument pas dépaysé puisque Lies of P reprend absolument tout du matériau d’origine. Les feux de camp sont ici des Stargazer, et les Ergos remplacent les âmes. Le principe est exactement le même, ce qui signifie que chaque mort vous ramène au dernier Stargazer visité, en vous délestant de l’intégralité de vos Ergos, un élément indispensable qui sert de monnaie d’échange pour améliorer les stats du héros. Chaque mort et activation d’un point de passage est également synonyme de réapparition des ennemis. Heureusement, il est possible de récupérer votre stock d’Ergos perdu en atteignant l’endroit de votre précédente mort, à condition de ne pas mourir avant, sous peine de perdre le fruit de votre labeur de manière définitive. Un principe qui force toujours autant à opter pour la prudence, avec une tension qui s’installe, proportionnellement au nombre d’Ergos à récupérer.
Des mécaniques très classiques pour le genre, au point de se confondre complètement avec les productions de From Software. Malheureusement, les seuls élément de différenciations imaginés par Round8 Studio se trouvent dans des fonctionnalités peu engageantes, généralement peu ou mal expliquées qui plus est. Pire, à mesure de la progression les systèmes s’accumulent couche après couche, pour un ensemble difficile à digérer. A commencer par les combinaisons d’armes, qui permettent d’associer la lame d’une arme avec le manche d’une autre arme, mais sans grand intérêt. Dans le même ordre d’idée, l’Organe-P est un arbre de compétences mal fichu, que l’on remplit un peu au hasard, pour se donner bonne conscience. C’est dommage, d’autant que la difficulté à se débarrasser de certains ennemis, dont les boss, est alors en partie imputée à ces systèmes qui auraient mérité d’être mieux expliqués pour pouvoir juger de leur pertinence.
A défaut de pouvoir optimiser sa build, on se heurte évidemment à la difficulté du jeu. On apprécie toutefois de pouvoir invoquer un spectre durant les combats de boss histoire de focaliser les attaques dévastatrices sur un faire-valoir temporaire. Mais on aurait préféré pouvoir profiter de cette petite aide en dehors des boss, d’autant que certains ennemis sont particulièrement coriaces. La faute en partie à un gameplay qui manque d’un peu de souplesse, avec des attaques et des esquives trop rigides, même en prenant garde de ne pas porter trop d’équipements. En avançant dans l’aventure, les développeurs ont eu la très mauvaise idée d’incorporer quelques phases de plateformes, avec la nécessité de marcher sur des poutres tandis que des ennemis vous balancent des projectiles. Evidemment, une chute entraine une mort inévitable et un retour au dernier Stargazer visité.
Petite déception également du côté du level-design. Si Lies of P tente d’emprunter l’idée des raccourcis des Souls, l’idée est mal exploitée et ne parvient jamais à s’émanciper de cette sensation de suivre un couloir qui n’offre que peu de libertés d’exploration. Pour accentuer la difficulté, les Stargazers sont parfois très éloignés les uns des autres, et pas toujours très bien placés. C’est un peu plus réjouissant du côté du bestiaire, avec des ennemis au design varié et aux capacités bien différentes. On apprécie aussi de pouvoir rencontrer quelques personnages dénués d’agressivité, dont certains proposent de petites quêtes secondaires.
Techniquement, Lies of P impressionne. L’équipe de Round8 Studio a su pleinement tirer à profit l’Unreal Engine 4, pour un résultat digne de certaines grosses productions. Les textures sont propres et cohérentes, tandis que les passages en intérieur sont riches en détails. De leur côté, les animations bénéficient d’un très grand soin et au final on regrette simplement des effets de particules qui auraient mérité d’en mettre plein la vue, et des effets de lumières inégaux. Il est certain que ces petits détails n’auraient pas été soulignés si le studio avait pu mettre la main sur l’Unreal Engine 5.
Côté direction artistique, le titre s’inspire ouvertement de la Belle Epoque, et nous fait visiter des lieux biens différents, allant des grands bâtiments hausmanniens, aux hangars industriels, en passant par une cathédrale. Le travail de modélisation est exceptionnel et invite clairement le joueur à s’arrêter pour s’émerveiller devant certains décors absolument somptueux. On regrette tout de même que Steelrising soit passé avant lui, avec son architecture datée de la Révolution Française et ses automates.
La musique se fait discrète, et s’apprécie d’autant plus lorsque l’on récupère un vinyle à insérer dans le gramophone de l’hôtel Krat. On regrette peut-être un sound-design en retrait, qui aurait mérité de participer un peu plus à l’ambiance générale du titre. Aucun bug à déplorer de notre côté, tandis que les temps de chargement sont suffisamment courts pour éviter de rajouter de la frustration à chaque échec.
+
- Du Souls pur jus
- Graphiquement très joli
- Bestiaire bien fourni
- Animations réussies
- Quelques quêtes annexes
-
- Manque de souplesse dans le gameplay
- Phases de plateformes éclatées
- Plusieurs mécaniques inappropriées
- Level-design archi basique
- Sound-design trop discret