Jeux

Lost Records: Bloom & Rage

Aventure narrative | Edité par DON'T NOD | Développé par DON'T NOD

8/10
One : 18 February 2025 Series X/S : 18 February 2025
03.03.2025 à 14h46 par

Test : Lost Records: Bloom & Rage sur Xbox Series X|S

K7 part 1 : lenteur et exception

Le studio français DON’T NOD est en grandes difficultés depuis quelques semaines, quelques mois. Des grèves ont lieu au sein des équipes, tandis que certains de leurs titres (Jusant et The Banishers, notamment), en dépit de leurs indéniables qualités, peinent à convaincre et trouver de l’intérêt auprès des joueurs. Une situation complexe qui confère à Lost Records: Bloom & Rage un statut particulier. Le titre narratif qui marche aux côtés d’un certain Life is Strange a donc une double mission : se vendre correctement et nous livrer une histoire forte et mémorable. La question étant désormais de savoir s’il a les épaules pour…

Lost Records: Bloom & Rage est donc un titre narratif qui a pour particularité de se découper en deux parties distinctes que l’on nommera K7. La première est d’ores et déjà disponible tandis que la second débarquera sous la forme d’une mise à jour qui sera téléchargeable le 15 avril 2025. Cela signifie donc que le test que vous allez lire maintenant ne concerne que la partie 1 du jeu. Une information capitale qu’il est nécessaire d’avoir en tête puisque la dimension narrative est l’aspect le plus important de Lost Records: Bloom & Rage. Autre point à préciser d’emblée : nous ne dévoilerons rien d’important concernant l’intrigue.

Commençons donc ce test par le scénario et les protagonistes que nous allons suivre pendant quelques heures. Notre périple débute avec Swann, une femme d’une quarantaine d’années qui débarque dans un bar perdu, au milieu des bois. La raison ? Le message mystérieux de l’une de ses amies d’enfance qui lui demande de venir, alors qu’elles ne se sont plus vues depuis 27 longues années. C’est logiquement avec une certaine inquiétude et appréhension que nous rentrons dans l’établissement et retrouvons notre amie. Quelque échanges nous plongent ensuite dans le passé où nous découvrons la vie de notre adolescente solitaire, mal dans sa peau, filmant tout ce qu’elle voit et observe chez elle, dans sa ville et dans les environs. Ce passage de l’âge adulte à l’enfance va jalonner l’ensemble de l’aventure. Les transitions sont bien amenées et notre curiosité est sollicitée de bout en bout, et même bien au-delà.

La première partie du jeu va soulève toutefois davantage de questions qu’elle n’y répond. L’ensemble est franchement bien mené et l’histoire est intelligemment construite. Encore une fois, sur le plan purement narratif, DON’T NOD démontre une nouvelle fois – si besoin est – qu’il maitrise parfaitement leur sujet. La seule chose que l’on reprochera au jeu, c’est son rythme. Sur les 6 à 7 heures qu’il nous a fallu pour achever cette première K7, il y a des lenteurs qui cassent le rythme, surtout au cours des deux premiers tiers. La dernière partie est mieux maitrisée, passionne, intéresse, et crée vraiment chez le joueur l’envie de connaitre la suite, et donc la fin de l’histoire.

Lost Records 4

Cette lenteur, ce faux rythme, sert surtout à poser un cadre, une ambiance, à rencontrer / découvrir les différents protagonistes du jeu. Ainsi, au cours de l’été 95, Swann va faire la connaissance de trois autres jeux filles, Autumn, Nora et Kat, avec qui elle va se lier d’amitié et vivre des vacances ensoleillées. D’autres évènements vont évidemment venir ternir ce constat de départ forcément trop lisse, sans que nous vous en révélions la teneur afin de garder l’effet de surprise. Ce que l’on peut vous dire, par contre, c’est que la sœur de Kat et son copain, Corey, vont occuper une place importante dans l’histoire. Ils sont d’ailleurs à l’origine de la rencontre entre les trois filles, ce qui n’est pas un élément anodin, vous en conviendrez. Bref, les prises d’images de Swann qui filme tout ce qui est possible et imaginable nous offrent des moments de complicités avec chacune des filles. On apprend à les connaitre, mais surtout à nous attacher à ces différentes personnalités. La véritable réussite de Lost Records: Bloom & Rage, au-delà de nous proposer une histoire intéressante, ce sont ses personnages aussi différents qu’authentiques. On s’identifie à leurs problèmes, on les comprend et on ressent / revit les émotions qu’elles ont vécues en tant qu’adolescente. Il n’en demeure pas moins qu’il est indispensable, pour apprécier pleinement tout cela, accepter une mise en scène lente, terriblement lente. Le jeu est extrêmement bavard et il arrive souvent que l’on ne fasse rien pendant de longues minutes. La limite entre le jeu interactif et le film est de plus en plus ténue (comme dans les titres de The Dark Pictures, par exemple). Cela étant, si vous savez où vous mettez les pieds et que c’est un genre que vous adorez, Lost Records: Bloom & Rage se place immédiatement dans le haut du panier.

Du côté du gameplay, on peut différencier deux phases bien distinctes : l’exploration et les dialogues. Dans la première des deux, vous contrôlez Swann, avec la possibilité de vous balader dans des zones restreintes où vous pouvez interagir avec toute une série d’objets qui se trouvent dans les environs. Plus intéressant et plus original, vous pouvez également filmer toute une série de scènes qui vont être catégorisées dans le jeu : le chat, chaque personnage, un lieu en particulier, un évènement… Tous vos petits « films » sont alors enregistrés et vous pouvez, dans le menu prévu à cet effet, créer un petit montage en supprimant les vidéos de mauvaise qualité, en modifiant l’ordre… Cet aspect est assez optionnel et n’intéressera probablement que les afficionados, mais cela reste vraiment fun de revoir les extraits que nous avons sélectionnés défiler sur l’écran. Encore une fois, sauf à de rares moments, vous pouvez faire l’impasse sur ces options liées au camescope et vous concentrer sur l’histoire. C’est à vous de voir ce que vous souhaitez faire, ou non.

Lost Records 2

Deuxième partie importante du game-design : les dialogues. Au cours des échanges, vous avez l’occasion de faire des choix qui vont avoir un impact sur le déroulement de l’histoire, mais également sur la relation entre les personnages. Ces choix sont cruciaux et orientent certaines actions / réactions. Une fois la première partie terminée, vous avez d’ailleurs l’occasion de voir toutes les possibilités et de mesurer l’impact que vos décisions auront eues sur chacune des filles, et ce que ce soit dans le passé ou dans le présent. C’est intéressant et comme souvent intelligent. Seule réserve que l’on émettra : l’impact que tout cela aura sur l’ensemble de l’histoire. Étant donné que nous ne disposons pas de l’intégralité du jeu, il est impossible de connaitre l’influence qu’auront nos choix, nos décisions, sur la seconde partie.

Bien entendu, un jeu comme Lost Records: Bloom & Rage va, au-delà de nous proposer une histoire et des personnages intéressants, nous inviter dans un univers singulier. Ce dernier prend place – principalement – dans les années 90 et ceux et celles qui y ont grandi auront le plaisir d’y découvrir une kyrielle d’éléments qui y font référence. Cela passe par les environnements, mais aussi par des jouets, des gadgets que l’on a tous plus ou moins connus durant notre enfance. C’est savoureux, d’autant plus que le titre profite d’une direction artistique colorée d’une rare finesse qui nous immerge très rapidement au cœur du jeu. On apprécie certains panoramas et les quelques moments de contemplation sont un régal. On sent que les développeurs ont eu envie de nous faire profiter de l’ambiance qui, pour le coup, atteint des sommets. Que ce soit à l’intérieur du garage, dans la chambre de Swann, dans les bois au coucher du soleil ou encore pendant la nuit, on apprécie tout ce que l’on parcourt, tout ce que l’on voit. Cet aspect artistique se répercute également sur les personnages qui sont physiquement et moralement très différents, ce qui est un indéniable plus, évidemment.

Terminons ce test par la partie technique du jeu. Cette dernière est solide, pratiquement irréprochable. On a bien quelques moments – notamment quand on revient dans le présent – où les textures peinent à apparaitre. Mais hormis ces détails, Lost Records: Bloom & Rage est l’un des jeux narratifs les plus propres et le plus jolis à voir. Sur le plan sonore, le titre propose un doublage en français et en anglais. Dans un premier temps, nous étions partis sur la langue de Molière mais les nombreuses imprécisions quant à la synchronisation labiale nous ont fait changer d’avis en cours de route. Nous vous conseillons fortement de partir sur l’anglais pour une expérience plus immersive, et plus réussie. Enfin, comment ne pas aborder les thèmes musicaux d’un jeu comme Lost Records: Bloom & Rage. Comme pour Life is Strange, le bébé de DON’T NOD bénéficie d’un soin tout particulier sur la partie musicale. Les morceaux contribuent largement à l’ambiance du jeu, ajoutant çà et là une petite couche d’émotion supplémentaire. C’est, une nouvelle fois, une indéniable réussite.

8/10
Il faudra attendre la sortie de la seconde K7 pour donner un avis définitif sur l’histoire de Swann et de ses amies, mais en l’état, DON’T NOD nous propose vraiment une expérience des plus réussies. L’histoire intrigante – bien que très lente – bénéficie de personnages colorés et authentiques auxquels on s’attache au fil des heures. L’univers dépeint est magnifique et l’immersion est au rendez-vous (sauf en VF). Nous attendons désormais impatiemment la mi-avril pour découvrir la conclusion de cette histoire qui pourrait vraiment s’avérer mémorable.

+

  • Ambiance au top ;
  • Personnages attachants et authentiques ;
  • Visuellement réussi ;
  • Techniquement solide ;
  • Histoire intrigante mais incomplète ;
  • Conception originale des vidéos ;
  • Direction artistique au sommet ;
  • Musiques magnifiques.

-

    • Synchronisation labiale ratée pour la VF ;
    • Lent...
    • Très lent...
    • Pas de fin, logiquement ;
    • Choix ayant un impact sur les deux parties ?