Test : The Occupation sur Xbox One
Un putsch raté ?
Sorti le 5 mars 2019 sur Xbox One et dans nos mains depuis à peu près autant de temps, The Occupation a donc tardé à se montrer dans nos colonnes. Oui ce fut long pour un jeu qui ne dure que quatre heures. Mais il y a une explication à cet avis en retard, pour une production signée White Paper Games qui nous a fait passer par tous les stades émotionnels. Il y a d’abord celui de la curiosité devant un jeu d’aventures à la première personne qui part sur des bases scénaristiques fortement intéressantes. Nous sommes en 1987, dans une Angleterre dystopique et sous tension. L’immigration est aussi grandissante que l’inconfort qu’elle créé dans l’esprit de la population locale. Les habitants vivent avec un sentiment d’oppression qu’une certaine organisation politique s’emploie à exploiter pour que soit adopté l’Union Act, projet de loi visant la fermeture totale des frontières du pays. En pleine crise politique et sociale, les choses prennent une tournure dramatique alors qu’une explosion retentit dans les locaux de Bowman-Carson, ladite organisation militant pour la fermeture des frontières. Et pour que la boucle soit bouclée, il s’avère que le principal suspect… Est un immigré. Comme par hasard ! Dirait-on sur le réseau social de votre choix.
Alors il y en a qui se disent, à l’image de Harvey Miller, journaliste, grand reporter spécialiste du Moyen-Orient et principal protagoniste de The Occupation, que l’évidence doit bien cacher quelque chose de plus profond. C’est ainsi qu’il est reçu dans les locaux de l’institution, pour y rencontrer tour à tour certains de ses responsables et leur poser quelques questions. Mais surtout, pénétrer dans les locaux de cette drôle d’organisation est l’occasion pour Miller d’enquêter et de prouver qu’Alexis Dubois, l’accusé, n’est peut-être pas le responsable de l’attentat. C’est dans ce contexte sous haute tension, fort bien amené et consolidé par des passages intermédiaires aux commandes d’un autre personnage que se dessine l’expérience assez inédite voulue par The Occupation. La grosse originalité du titre est qu’il se déroule en quatre heures réelles (lors des passages avec Miller) et que cette restriction est instaurée et gérée de façon très intelligente. Prévoyant, Miller se présente ainsi chez Bowman-Carson à 15 heures, pour un premier rendez-vous une heure plus tard. Une fois passées les formalités d’accès, on lui autorise la visite des zones accessibles au public pendant l’heure restante et à partir de là, nous autres fureteurs professionnels, avons donc une autant de temps pour ne pas respecter les consignes et trouver autant de preuves que possible pouvant remettre l’enquête sur le droit chemin.
Dans les yeux de Miller, on est alors largué dans cette bâtisse immense et il nous appartient d’en découvrir les secrets. Un beeper nous indique quand rejoindre le téléphone public le plus proche pour recevoir quelques informations de la part de notre assistante mais pour l’essentiel, c’est à notre sens de l’observation qu’il faut se fier. Un casier ouvert, une affiche, une note glissée dans une boite aux lettres, l’écoute discrète d’une conversation… Les lieux regorgent d’informations pour qui saura les observer. Mais comme souvent, c’est derrière les portes closes que se cachent les plus grands secrets. A vous de déterminer un moyen d’entrer : trouver une carte d’accès, dénicher un code ou passer par les conduits d’aération, tous les moyens sont bons. Enfin, tant que vous ne vous faites pas prendre, car la sécurité ne sera pas compréhensive plus d’une fois. A mesure que l’on cumule des indices, les pistes se ferment et d’autres s’ouvrent. On se rend compte alors que le temps file à grande vitesse et qu’il y a de fortes chances que l’on ne puisse tout découvrir d’un coup. Puis la montre affiche l’heure et il est temps de filer pour le rendez-vous formel avec l’une des trois figures de Bowman-Carson. A ce stade, les questions qu’il est possible de poser et surtout la capacité du journaliste à tirer les vers du nez de son interlocuteur dépend des éléments que l’on a récolté dans l’heure précédente.
La force de The Occupation, c’est de parvenir à adapter en toutes circonstances le scénario de cet univers incroyablement bien construit. Il n’y a pas de Game Over a proprement parler, les choses évoluent en fonction de ce que l’on est capable de dénicher, des choix que l’on peut opérer à certains moments. Et aussi de notre propension à nous faire chopper par Steve, ce garde patibulaire mais néanmoins jamais très loin de là où l’on se trouve. Sous cette forme d’infiltration qui rappelle la formule adoptée par Deus Ex (les armes en moins), on tique parfois et on s’agace en constatant que ce fichu Steve a un comportement difficilement déchiffrable, lui qui arrive comme par hasard dans la même pièce que nous au bout de deux minutes alors que l’on a pris un raccourci et que lui se trouvait à priori très loin à ce moment-là. Un indicateur écrit signale sa présence dans le coin et mieux vaut alors trouver un endroit pour se planquer, le temps que les choses se tassent. On regrette alors que cela se limite à se mettre sous une table ou si on a de la chance, à prendre la tangente via un conduit d’aération. N’imaginez pas entrer dans un placard, créer une diversion avec un objet ou mettre à profit les zones d’ombre. On a affaire à de l’infiltration aux mécaniques très basiques, ce que l’on peut regretter pour un titre qui mise justement sur la capacité du joueur à singer Sam Fischer dans ses moments pacifistes.
L’ambiance de crise politico-sociale, le timer, Steve, les coups de téléphone à vite intercepter, les énigmes à la difficulté bien calibrée : ça fait pas mal de choses promptes à faire de The Occupation un titre marquant. Oui mais voilà, le jeu de White Paper Games a un défaut et il est bien gros. Au point de nous avoir laissé sur le carreau plusieurs semaines, nous demandant si nous allions pouvoir rédiger autre chose pour The Occupation qu’un avis d’abandon à publier dans la partie nécrologie d’un quotidien. Pour que vous mesuriez l’étendue du problème, un petit retour en arrière s’impose. A sa sortie, The Occupation souffrait d’un défaut de fabrication majeur, à savoir un décalage assez important entre la position du curseur sur un objet et l’affichage de l’action possible avec celui-ci. C’est pénible, c’est bancal, mais ça reste jouable. L’ennui, c’est qu’en essayant de régler le problème avec la mise à jour 1.0.0.6 une semaine après la sortie du jeu, le développeur a provoqué l’exact opposé ! Le décalage se fait alors plus grand, certaines interactions deviennent impossibles et pire encore, le jeu se fige et se coupe au bout de 10 minutes. Une horreur absolue lorsque l’on sait que The Occupation sauvegarde seulement entre les chapitres, lesquels peuvent parfois durer une heure. Bref, c’est la catastrophe.
Mais heureusement -et il est important de le savoir si comme nous vous aviez abandonné le jeu- la mise à jour 1.0.0.8 est là et elle a réglé les problèmes de curseur et d’écran figé. Ainsi, nous avons pu aller au bout de The Occupation. Ouf. Pour autant, ce thriller si beau sur le fond et artistiquement soigné n’en demeure pas moins un jeu blindé de bugs en tous genres. Si on peut enfin le terminer, il faut toujours composer avec des chutes de framerate parfois très importantes, des interactions qui demandent plusieurs essais, des collisions hasardeuses, des sous-titres parfois minuscules (proprement illisibles) et successivement en français et en anglais (théoriquement, le jeu est en VOSTFR avec une partie sonore par ailleurs soignée et très adéquate). Nous avons même eu droit sur notre dernier run à un chapitre qui a refusé une première fois de se charger. Oui, ça fait beaucoup de bugs. Trop ?
+
- Concept très intéressant
- Univers superbement façonné
- La gestion du temps, très intelligente ici
- Beaucoup de possibilités à explorer
- Artistiquement et graphiquement plaisant…
-
- … Mais blindé de bugs en tous genres
- Framerate inconstant
- Mécaniques d’infiltration trop légères…
- … Et pourtant prépondérantes dans la progression
- Il a fallu des semaines pour que le jeu devienne jouable