Jeux

Roadcraft

| Edité par Focus Entertainment | Développé par Saber Interactive

8/10
One : 20 May 2025 Series X/S : 20 May 2025
26.05.2025 à 15h03 par - Rédacteur

Test : Roadcraft sur Xbox Series X|S

Chaussures aux pieds, ceinture bouclée, casque en place

Depuis la révélation MudRunner, sorti entre autres sur Xbox One en 2017, une relation singulière s’est tissée entre Saber Interactive et les joueurs : un lien forgé dans la boue, l’effort et la fascination pour les monstres de métal. Le studio n’a cessé depuis d’enrichir son concept, atteignant son apogée avec SnowRunner, avant de poursuivre sa route avec Expeditions. Avec RoadCraft, Saber débloque le différentiel : place aux bulldozers, compacteurs et grues géantes pour une expérience pensée pour les grands enfants qui n’ont jamais cessé de rêver de déplacer des montagnes. Ou du moins, de construire les routes qui y mènent.

Roadcraft nous place à la tête d’une entreprise dont la vocation est aussi précieuse que singulière. Une boîte de courageux hommes et femmes de terrain qui se donnent pour mission de reconstruire ce qui a été détruit par des catastrophes naturelles, de redonner vie à des terres tristement dévastées par des ouragans, des tremblements de terre et autres inondations. Déblayer, recréer des pistes, détruire et reconstruire sont quelques-unes des nombreuses activités qui nous attendent durant les dizaines d’heures d’occupation que nous propose le jeu. Roadcraft affiche 8 cartes qui s’étendent en moyenne sur 4 km² et s’inspirent de paysages (dévastés) du nord de l’Afrique, de l’Europe de l’Est et des contrées les plus hostiles des Etats-Unis. De quoi donner aux décors de Roadcraft une bonne dose de variété pour un ensemble qui se révèle graphiquement satisfaisant.

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Le jeu reprend le moteur déjà à l’œuvre dans SnowRunner et voit les choses en grand ici, avec un effort porté sur les détails : la végétation, la myriade d’objets qui jonchent le sol et surtout les divers degrés de représentation de la boue sont portés sur Xbox Series X avec une relative efficacité. Deux modes graphiques sont proposés : un mode Qualité en 30 fps, plus stable et visuellement immersif, et un mode Performance en 60 FPS, plus fluide mais entaché de clipping notable. On recommande sans hésiter le mode Qualité, mieux à même de restituer l’ambiance et les subtilités des environnements. Sans atteindre les sommets de la version PC, RoadCraft s’en sort honorablement sur Xbox, avec un rendu global solide et agréable à l’œil.

Ce bon travail de modélisation s’applique dans les mêmes proportions aux nombreux véhicules proposés par Roadcraft. Et forcément, en se posant comme une simulation de construction dans des milieux pas comme les autres, Roadcraft dispose d’un impressionnant garage. De quoi faire saliver l’enfant qui est en nous, avec d’une part tout ce que l’on attend forcément d’un jeu comme celui-ci. Camion-benne, bulldozer, grue mobile, pick-up, compacteur, finisseur, véhicule de transport, absolument tout y est. Mais le plus marquant vient de tous ces autres véhicules, dont on avoue ne pas forcément avoir toujours soupçonné l’existence jusqu’ici : une base mobile d’opérations sur chenilles, un immense poseur de câbles, un broyeur de souches ou encore des grues lourdes sur chenilles complètent ce parc de véhicules résolument complet.

On comprend aisément que Roadcraft nous invite à expérimenter des tonnes de choses et que l’on ne coupe pas à une longue période d’apprentissage. Chaque véhicule dispose naturellement de ses propres commandes, allant du très simple avec le compacteur par exemple, à quelque chose de plus complexe à prendre en mains. On pense forcément aux grues – mobiles notamment – qui requièrent un certain nombre d’automatismes à intégrer avant d’en faire usage correctement. Dans tous les cas, on apprécie le soin apporté aux bruitages, et en particulier celui des moteurs. On parviendrait presque à sentir les effluves de gasoil.

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Roadcraft, c’est le mariage globalement réussi entre MudRunner et Construction Simulator. On conserve d’un côté l’idée de devoir conduire sur des tracés dignes des plus belles heures des Convois de l’Extrême. Chaque première étape d’un projet de reconstruction passe par la prise des commandes d’un véhicule léger (un 4×4 en somme) de la catégorie « Scout ». Equipé d’un détecteur d’objets et d’un analyseur de terrain indiquant la profondeur de ce qui aurait pu ressembler de loin à une « flaque », le Scout nous permet de visualiser les futurs accès possibles pour les autres véhicules et de définir les aménagements indispensables. Aux commandes de ce 4×4, on retrouve alors l’expérience propre à Mudrunner, cette quête qui nous porte vers les chemins les plus extrêmes pourvu qu’ils débouchent jusqu’à destination. Et puis à côté de cela il y a donc tout l’aspect construction. Certains zones trop endommagées ou boueuses pour les véhicules lourds doivent être aménagées : à nous de livrer le sable, l’étaler, appliquer du bitume et le compacter. Parfois il faudra construire un pont, et donc s’assurer de livrer les matériaux nécessaires sur le chantier. On touche alors à d’autres types de camions, à des grues et autres. La découverte est ainsi régulièrement renouvelée, en même temps que le besoin de se pencher sur de nouvelles fonctionnalités et les intégrer.

On n’est bien sûr pas totalement largué dans la nature. Des objectifs précis ponctuent la progression et l’ensemble est d’ailleurs particulièrement encadré durant une bonne grosse dizaine d’heures. Ce tutoriel est plutôt bien pensé car bien que très long, il s’intègre naturellement dans la campagne et ne bloque aucunement notre possibilité de faire les choses un peu à notre manière, ou de tester parfois des entreprises improbables. Cet accompagnement permet toutefois de couvrir un autre point essentiel de l’expérience Roadcraft, à savoir son aspect « gestion ». En résumé, une partie de l’objectif consiste en la remise en route des sources d’énergie de la région et des structures d’approvisionnement et de recyclage. C’est un moyen de gagner de l’argent (pour agrandir la flotte) et des ressources pour les projets de construction. Une fois les accès débloqués, on peut créer des routes qu’empruntent alors les camions gérés par l’IA, par exemple entre l’entrepôt de stockage et un chantier pour y amener des ressources essentielles à la conduite des travaux.

S’il est possible en théorie de tout faire soi-même, cette automatisation de l’approvisionnement est essentielle dans un jeu où il y a déjà tant à faire. On définit donc sur la carte le tracé d’un point A à un point B et on observe (avec plusieurs angles de caméra possibles) l’évolution du convoi. En cas d’obstacle, il convient au minimum de modifier légèrement la position du tracé ou carrément d’effectuer des travaux d’aménagement sur la route. Cette partie du jeu est à la fois assez simple à prendre en main et terriblement chronophage. D’abord parce que les passages successifs des camions créent des déformations de terrain et surtout parce que l’IA aux commandes des camions est beaucoup plus artificielle qu’intelligente. Ne comptez pas sur elle pour entreprendre la moindre modification de tracé, même de quelques millimètres si un obstacle se présente. Elle va tenter de forcer le passage bêtement, jusqu’à ce que le jeu nous informe que le convoi a échoué.

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Il faut avoir un œil partout dans Roadcraft. C’est probablement là où le bât blesse lorsque l’on évolue en solo. Le jeu est jouable à 4 en coopération en ligne et c’est ici que se révèle sa véritable nature. La multitude d’objectifs à remplir dans ce genre de conditions extrêmes impliquant des déplacements forcément lents se gère bien dans le temps lorsque l’on est plusieurs, et tout de suite moins facilement en solo. Rien n’est certes impossible à accomplir seul, il faut en revanche pouvoir y consacrer beaucoup de temps. Certaines petites tâches répétitives prennent parfois un air fastidieux. Jouer à Roadcraft, c’est s’engager dans une relation de très longue durée où chaque bon moment est intense mais se mérite.

Pour autant, il n’est pas un jeu foncièrement difficile. Il est même plutôt permissif. On retrouve beaucoup de petites aides invisibles, lorsqu’il faut par exemple placer un tuyau sur une conduite ou lisser un tas de sable, le jeu se chargeant de l’aspect finition. Il est également toléré de déposer sur une aire de réception une dalle de béton depuis une grue, sans prendre la peine d’y aller avec des pincettes. Parfois ça va encore plus loin, comme pour le remplissage de la benne avec du sable : il suffit d’être dans la zone d’une carrière de sable et d’une simple pression sur la flèche du bas, du sable tombe du ciel. Considérant également que Roadcraft n’intègre pas de dégâts sur les véhicules ou quelconque gestion du carburant, on n’éprouve pas de réelle difficulté à avancer, bien que l’on ne puisse nier que tout cela représente d’un certain point de vue une entorse au réalisme.

8/10
Roadcraft représente une addition bienvenue au sein de la famille MudRunner. Bien que plus permissif que ses ainés, il en conserve l’essentiel des qualités pour nous inviter à redécouvrir, aux commandes de véhicules divers et variés, l’exigence et le plaisir de la conduite en milieux extrêmes. C’est surtout en tant que simulation de construction que le jeu trouve sa singularité, en équilibrant habilement profondeur de gameplay et accessibilité. Il ne faut toutefois pas se méprendre : malgré son approche plus permissive, RoadCraft reste un titre qui demande de l’implication, de la méthode, et parfois une bonne dose de patience — particulièrement en solo, où certaines missions peuvent rapidement sembler écrasantes. Inversement, Roadcraft dévoile véritablement sa grandeur lorsque partagé avec les bons amis. On y retrouve alors l’essence de la coopération et la promesse de très longues heures à refaire le monde, au sens propre.

+

  • Concept qui fonctionne parfaitement bien
  • Flotte de véhicules très fournie
  • Parfois complexe mais jamais difficile
  • Conduire dans la boue n’a rien perdu de son charme
  • Grosse durée de vie
  • Coopération à 4 en ligne
  • Techniquement satisfaisant

-

    • Rythme très lent
    • Parfois décourageant en solo face aux nombreuses tâches à accomplir
    • Certaines commandes demandent du temps d’adaptation
    • IA souvent en RTT