Test : Slitterhead sur Xbox Series X|S
Un voyage au Japon qui ne laissera personne indifférent
Ne tournons pas autour du pot : Slitterhead n’est pas un jeu comme les autres et il s’adresse probablement à un public de niche friand d’œuvres japonaises. Le titre de Toyama débute par une cinématique qui nous plonge immédiatement au cœur d’une ville occupée par des créatures répondant au nom de Slitterhead. Ces dernières se montrent menaçantes vis-à-vis de certains humains dont elles aspirent le cerveau. Heureusement pour eux, c’est à ce moment-là que nous, un esprit répondant au nom de Hyoki, débarquons sur place avec un seul et unique objectif : éliminer ces créatures répugnantes. C’est d’ailleurs la seule chose dont nous nous souvenons et c’est là l’un des enjeux du titre : comprendre ce que fait notre personnage sur place. Ajoutez à cela le pourquoi de la présence de ces monstres et une prémonition des plus inquiétantes, et vous aurez toutes les questions auxquelles nous tâcherons de répondre au cours de notre aventure.
Une aventure qui vous occupera pendant une bonne dizaine d’heures de jeu et qui réservera quelques moments surprenants. Les cinématiques sont d’ailleurs plutôt bien réalisées et la mise en scène souvent maitrisée. On regrette simplement que le tout soit fortement dilué dans une structure de jeu assez archaïque qui nous revient d’un autre âge. Attention également au fait qu’il s’agit clairement d’un jeu à destination des adultes : Slitterhead est violent, gore à souhait et traite ou abordes des sujets tels que la prostitution, la mafia, la sexualité… Vous voilà prévenu.
Car il faut être honnête, Slitterhead est un jeu clivant. Au-delà de son intrigue singulière et intéressante, il prend la forme d’un titre découpé en multiples missions. Ces dernières nous emmènent toutes au cœur de la ville, à des moments différents, ce qui peut créer rapidement un sentiment de déjà-vu. Une fois chacune d’entre elles achevées, vous retournez sur le menu de base qui vous invite à discuter avec certains personnages rencontrés, ceux que l’on nommera désormais des êtres rares. Ces discussions sont inévitables car elles débloquent les missions suivantes, tout en proposant de donner du corps à l’histoire de nos collaborateurs. Et si elles s’avèrent intéressantes dans la plupart des cas, certaines d’entre elles sont plutôt anodines. Pire, l’absence de doublage rend les choses compliquées, surtout que l’on doit se contenter de simples bruitages plutôt lassants, pour ne pas dire étonnants. Dommage, car un jeu de cet acabit aurait mérité de bénéficier de doublages de qualité.
Au-delà de la possibilité de tailler le bout de gras avec nos amis les êtres rares, les menus nous présentent un autre intérêt : choisir sa mission et améliorer nos personnages. Chaque mission achevée nous permet de glaner quelques points de compétence, ce qui nous offre l’opportunité d’améliorer certaines caractéristiques telles que les armes, notre vie ou encore la régénération de certains membres (ce sur quoi nous reviendrons d’ici peu). Ces points peuvent être obtenus de plusieurs manières : en achevant les dites missions ou en trouvant certains objets cachés. C’est d’ailleurs de ce côté-là que se cache la rejouabilité du titre. Si vous souhaitez rendre vos personnages plus performants ou débloquer de nouvelles tenues, il vous faut absolument recommencer les missions et fouiller chaque zone. C’est un peu redondant, sauf dans certains cas où il est possible d’atteindre des objectifs de plusieurs manières possibles. On aurait simplement aimé que ce soit plus souvent le cas.
Passons maintenant au cœur du jeu, à son gameplay. Pour faire simple, l’esprit que vous incarnez a la capacité de prendre possession de tous les êtres humains dans les environs. Il peut donc passer de l’un à l’autre d’une simple pression sur une touche, ce qui lui permet de se déplacer rapidement et d’explorer l’environnement facilement. Cette capacité indispensable doit être également utilisée pendant les affrontements. En effet, au-delà de son système de combat classique, le véritable intérêt de Slitterhead vient du fait que vous pouvez / devez utiliser tous les êtres humains à votre disposition pour vaincre vos adversaires. Cela signifie que chaque personne dont vous prenez le contrôle dispose de sa propre barre de vie, de ses compétences et d’une arme de sang qu’elle génère instantanément. Vous pouvez attaquer (attaques légères ou lourdes) mais également esquiver et parer. La parade est d’ailleurs au cœur du gameplay puisque vous devez maintenir la gâchette gauche et, à l’aide du stick droit, l’incliner dans la direction de l’attaque ennemie, le tout dans le bon timing. Une erreur et vous prenez de lourds dégâts. Si vous réussissez par contre, vous renforcez votre personnage et remplissez une jauge qui, une fois pleine, ralentira le temps afin que vous puissiez attaquer librement. Cela crée une certaine tension durant les combats que l’on apprécie tout particulièrement.
Et ce n’est pas tout. C’est ici qu’entrent en jeu les êtres rares, ces personnages dotés de capacités spéciales une fois possédés. Limités en nombre, vous ne pouvez partir en mission qu’avec deux d’entre eux. Parfois, le choix vous est imposé par le scénario, parfois vous êtes libre de sélectionner celui que vous souhaitez embarquer. Bref, en fonction des deux personnages élus, les armes et compétences vont varier. Certains sont capables de relever les êtres humains tombés au combat, tandis que d’autres peuvent utiliser une arme à distance qui consomme du sang, votre vie. Le style de combat au corps-à-corps varie également puisque certains êtres utilisent une lance, tandis que d’autre emploient leurs poings, une épée, des griffes… C’est vraiment là que brille Slitterhead : grâce à cette polyvalence dans le gameplay et ce changement de possession permanent. Votre adversaire fonce sur vous, quittez le corps et allez prendre le contrôle de celui qui se trouve dans son dos. Tout le monde est mort ? Relevez-les. Vous êtes seul ? Appelez d’autres humains à l’aide et, grâce à un autre pouvoir, équipez-les tous d’une arme afin qu’ils foncent sur votre adversaire. C’est grisant, varié et terriblement fonctionnel tout en étant original. On ne peut ici que saluer la créativité des développeurs.
Et si le système de combat ne vous a pas convaincu, sachez que Slitterhead ne se contente pas que de cela (même s’il s’agit d’une grosse partie du gameplay). Vous aurez, au cours de votre aventure, l’opportunité d’explorer chaque recoin de la ville. Pour y parvenir, vous devez changer de corps régulièrement, découvrir des endroits d’où il est possible de se projeter ou encore parler et écouter les PNJ qui s’y déplacent. Cette exploration – parfois obligatoire dans le cadre de l’histoire – peut se montrer intéressante dans la mesure où elle vous permet de récupérer des souvenirs du Hyoki (ce qui offre des points de compétences) ou de trouver des défis qui consistent à affronter certains monstres. Là aussi, vous pouvez glaner différentes choses, comme des tenues par exemple. Autres phases de gameplay proposées par le jeu : l’infiltration. Certaines missions – en général en lieux clos – vous imposent d’avancer sans vous faire repérer. Ici, on se retrouve avec un système de jeu relativement classique où vous devez observer les chemins suivis par vos adversaires avant de vous engouffrer dans les brèches qu’ils laissent derrière eux. Ca n’invente pas la roue, mais ça a le mérite de proposer quelque chose d’un peu différent. Même constat pour les courses-poursuites qui s’avèrent plutôt laborieuses et qui, de toute façon, finissent presque toujours de la même manière : votre proie, une fois sa vie suffisamment baissée, se rend à un endroit défini où le combat final de la mission se lance. Un peu trop prévisible à notre gout.
Nous approchons tout doucement de la fin de ce test, et il ne nous reste plus qu’à aborder la question du bestiaire. Ce dernier, à l’image du jeu d’ailleurs, alterne entre l’originalité de ses créatures, les Slitterhead, et des soldats plus classiques. On ne s’attardera évidemment pas sur ces derniers, pour laisser la place aux monstres qui prennent plusieurs formes, allant de la simple saucisse sur pattes (on n’exagère pas, on vous l’assure !) à de gigantesques insectes à l’allure monstrueuse et répugnante. On se rappelle d’ailleurs ici de l’interview de M. Toyama et de la question qui portait sur ces derniers. Sa réponse était assez explicite puisque l’inspiration des monstres vient de « l’intérieur du corps humain ». Une explication qui peut vous paraitre insensée de prime abord mais qui prend tout son sens dès les premières minutes de jeu. Bref, au-delà de la surprise initiale et des premiers combats, on aurait tout de même aimé que Bokeh Game Studio aille au bout de son délire en nous proposant des adversaires un peu plus variés, et plus dérangés. En effet, au fil des missions, ce sont souvent les mêmes créatures qui reviennent à l’écran. C’est dommage car il y avait clairement la place pour faire quelque chose de plus fou encore.
Sur le plan technique, le jeu nous avait fait peur, notamment quand nous avions vu la première bande annonce de gameplay. Une sensation qui a rapidement disparu pour laisser place à un jeu de qualité. La direction artistique est excellente et sert une ambiance remarquable qui nous place dans des situations variées et glauques on ne peut plus réussies. Ajoutez à cela de jolis effets de lumière, des couleurs saturées qui conviennent parfaitement à la ville, et vous obtenez un résultat réussi ! On regrette simplement le fait que les environnements restent restreints en nombre et que tout cela soit assez limité par des niveaux en couloirs. Pour le reste, aucun bug n’est venu ternir l’expérience de jeu qui s’est montrée parfaitement fluide sur Xbox Series X. En ce qui concerne la partie sonore, par contre, c’est une autre histoire. Si les morceaux de musique s’avèrent vraiment excellents et contribuent largement à l’ambiance proposée par le jeu, l’absence de doublage reste vraiment un problème pour un jeu de ce type. Encore une fois, on aurait vraiment aimé que le studio fasse un peu plus…
+
- Direction artistique réussie ;
- Possession grisante ;
- Gameplay varié ;
- Bestiaire audacieux au premier coup d'oeil ;
- Histoire intrigante ;
- Techniquement irréprochable;
- Personnages sympathiques.
-
- Rapidement répétitif ;
- Absence de doublage ;
- Bestiaire qui manque de folie ;
- Environnements restreints ;
- Structure archaïque.