Test : Stranglehold sur Xbox 360
Jet Stranglehold Radio ?
Quand vous vous retrouvez face à un membre de Midway Chicago, et que vous lui demandez de décrire Stranglehold, la nouvelle production maison parue il y a un peu plus d’un mois, il ne se sent plus de joie. Ravi de pouvoirétaler ses références, le bonhommecite pêle-mêle la série des Tony Hawk (ah ?), Jet Set Radio (mais oui !) et Power Stone (vous ne rêvez pas). Même si un fan de l’époque Dreamcast ne peut être foncièrement mauvais, on se demande forcément où il veut en venir. Mais une fois engagé dans la folie destructrice de Stranglehold, les choses deviennent plus claires. Ce jeu est une ode au tir acrobatique, à la fusillade artistique, au gunfight pur, dépouillé de tout artifice. Et pour mettre en avant cet élément, Midway Chicago a décidé d’axer une grosse partie des ressources techniques du jeu sur la destruction. Nés du Massive D, un moteur hybride combinant l’Unreal Engine 3 et Havok, les décors de Stranglehold sont sans doute les plus réactifs jamais vus. Volants en éclats à l’impact des balles et des corps projetés sous le feu adverse, le bois, le béton, le carrelage sont là avant tout pour assurer un spectacle visuel constant, une valse programmée à la perfection car dépourvue de tout ralentissement parasite. Des objets destructibles, de l’action effrénée, vous aurez reconnu les gênes hérités, selon notre ami développeur, de Power Stone.
Reste le mystère Jet Set Radio/Tony Hawk à élucider. Et il n’y a pas à chercher bien loin. Stranglehold ne propose pas une jouabilité fondamentalement innovante, puisqu’elle a déjà été explorée à plusieurs reprises par le passé. On peut citer le père du genre, Max Payne, qui reste la première expérience bullet-time réussie, que ce soit en intensité ou en solidité de gameplay. Mais la fureur, le dynamisme de Stranglehold rappellent davantage les pérégrinations de Jack Slate, le héros du très sous-estimé Dead to Rights (le premier), sorti début 2005. Comme le flic en fuite de Grant City, l’inspecteur Tequila, impeccablement ramené à la vie par un Chow Yun-Fat de feu, aime en faire trop quand sa vie est en jeu. Capable de toutes sortes d’acrobaties, ce policier bourru, qui pose les pires problèmes du monde à son supérieur, l’infortuné capitaine Ed Lee, se joue des règles de l’apesanteur en multipliant sauts, équilibres précaires et visées rapides comme la foudre. Plutôt que de proposer un bête ralenti comme seule base de gameplay, Midway Chicago a choisi de combiner les phases de bullet-time à une évaluation du style des figures exécutées par Tequila. Utiliser les objets du décor – aspect un peu trop assisté – ou éliminer plusieurs vilains en un coup permet à l’inspecteur d’engranger des points, lesquels serviront soit à se soigner, soit à sortir les coups qui tuent, de furtifs moments de rage où Tequila devient subitement capable de vider une salle de toute âme indésirable en quelques secondes. Ces possibilités de tricks, en interaction avec les décors, rejoignent donc l’idée de Jet Set Radio et Tony Hawk. Comme dans ces derniers, deux aspects sont à considérer. D’abord, l’esthétisme : il est toujours agréable de chercher à réaliser les plus belles figures possibles, d’autant que Stranglehold permet pas mal de fantaisies à ce niveau-là. Mais dans les modes de difficulté supérieurs, l’utilisation de ces aides – car on peut vraiment parler d’aides alors – devient vitale. Non pas que l’IA des ennemis s’améliore sensiblement, c’est là un des gros points faibles du jeu. Mais les tirs s’intensifiant et Tequila voyant sa jauge de vie rapidement décliner, il est préférable de rester mobile et mettre fin aux hostilités le plus rapidement possible. Pour les bons tireurs, qui bénéficient d’un beau panel de possibilités de réglages (dont la suppression de l’aide à la visée), la tâche sera d’autant plus gratifiante que les adversaires, comme les décors, sont très sensibles aux dégâts et disposent d’une localisation très précise. Une balle dans le pied, la main ou la tête n’engendrera pas des réactions semblables, ce qui compense en partie les carences de QI des intervenants.
John Woo is watching
Si l’on en croit Midway Chicago, et John Woo lui-même, le réalisateur a supervisé tout le script de Stranglehold et une partie du design général, ce qu’on n’a pas trop de mal à croire, étant donné la concentration de colombesau mètre carré. Le scénario, fondamentalement pas très passionnant, se concentre sur Tequila affrontant seul la mafia, en gros, pour des histoires d’honneur et d’otages. Néanmoins, la réalisation plutôt sympa et l’invraisemblance totale des faits donne un côté second degré à l’aventure, qui finalement se laisse suivre. On parcourt des décors exotiques, avec une tendresse particulière pour les intérieurs asiatiques situés vers le milieu du jeu. La modélisation des personnages et la qualité brute des décors n’est cependant pas au niveau de l’Unreal Engine qu’on connaît, et dont les capacités ont surtout dû être réorientées vers l’interactivité des décors. On ne peut pas être fort partout.
En termes de progression, le gameplay satisfait : le système de tir pourrait être lassant sur la longueur, mais il ne le devient pas, ou du moins n’a pas le temps de le devenir, le mode solo se terminant, pour un habitué du jeu vidéo, en une à deux soirées en mode normal.
Ce qui est plus étrange, et paradoxal pour un soft estampillé John Woo, c’est les nombreuses difficultés auxquelles on se heurte avec la caméra, qui devient parfois un vrai cauchemar, lorsque les murs deviennent un peu trop rapprochés. Tequila étant extrêmement vif, on a vite fait de perdre le fil de l’action, et cela peut être fatal, et à l’origine de nombreux respawns énervants.
Sur le Live, Stranglehold garde la patte John Woo, avec toute la palette de mouvements qui reste accessible, et même un ralenti se déclenchant chez les joueurs restant le plus longtemps en vie. Ceci s’effectue malheureusement dans un bordel monstre. Trop imprécis pour du multijoueur, le système de jeu s’avère aussi déconcertant, avec des animations hachées menu qui rendent la visée incertaine. Pas étonnant qu’on ne trouve déjà plus beaucoup de monde en ligne, avec Halo 3 en face.
+
- Gameplay dynamique et furieux
- Tequila, mama mia !
- De nombreux réglages
- Destructibilité des décors visuellement et techniquement hallucinante
- Joli mariage jeu vidéo/ciné
- Action non-stop
-
- Une caméra paresseuse face à une action effrénée = confusion
- Modélisations perfectibles
- Trop vite fini !
- Mode Live trop imprécis pour s’imposer
- IA réduite au strict minimum