Test : Tropico 6 sur Xbox Series X|S
¿Un poquito igual al penúltimo?
Je pense que vous connaissez la musique des sunlights depuis le temps, mais un petit rappel ne fait jamais de mal. Vous êtes El Presidente, sorte d’ersatz de Fidel Castro aux commandes d’un petit coin de terre entouré de mer comme disait Michel Rocard, quelque part dans les Caraïbes. Il vous appartient de le faire émerger aux yeux du monde puis de le développer jusqu’à ce qu’il devienne une superpuissance. D’abord au service de sa Majesté en tant que Gouverneur, à l’époque coloniale, puis comme dirigeant d’une nation indépendante qui aura à traverser la Seconde guerre mondiale, la Guerre froide, pour finalement s’affirmer à l’heure d’Internet et de Greta Thunberg. Parce que c’est son projet, El Presidente jouit naturellement de la vie éternelle (ou du reste très longue) pour achever ses ambitions, accompagné comme toujours par le fidèle Penúltimo, lequel conserve pour notre plus grand plaisir son doublage français traditionnel, caricatural, plein d’entrain. Sur ces bases, vous avez le choix de vous lancer dans l’aventure en mode bac à sable (la carte peut alors être générée aléatoirement) ou en suivant des missions légèrement scénarisées, au nombre de 15. Dans tous les cas, vous aurez accès à un didacticiel complet et bien pensé pour les débutants dans le sens où il vous permet de mettre les mains dans le cambouis au gré d’objectifs bien précis et progressifs.
Passé l’éventuelle personnalisation de votre guide suprême, désormais possible dans Tropico 6 au même titre que celle du palais présidentiel (mais cela est tout à fait optionnel dans les deux cas), vous voilà aux affaires. Il conviendra bien sûr de permettre rapidement à vos habitants de se loger, de travailler, de passer du bon temps, d’accéder aux soins, puis à l’éducation, aux lieux de culte, etc. Tout cela en prenant un peu de temps pour garantir la sécurité, de façon plus ou moins civile, de vos chers compatriotes. En fonction de la topographie et de ce que vous disent les divers filtres à ressources naturelles, vous disposez comme dans Tropico 5 d’une batterie d’activités à mener : agriculture, production minière, élevage, pèche, etc. A vous ensuite de développer les structures qui vont vous permettre de valoriser le fruit de votre labeur -enfin, du labeur de vos concitoyens- en transformant tout cela. Du bon ruissellement comme on l’aime. En bout de chaîne, il y a bien sûr un équilibre qu’il est important de conserver, entre ce que l’on produit pour la consommation locale et la production qui se verra exportée. Il est bien évident que faire trimer la population dans des champs pour cueillir des fruits dont ils ne verront jamais la couleur peut avoir tendance à créer des tensions. N’est-ce pas ?
La politique s’invite elle aussi dans les débats, naturellement. Quel que soit le bois dans lequel est taillé votre dirigeant, il n’est pas aisé de satisfaire les besoins de tous ceux qui tirent les ficelles. Les intérêts des uns sont rarement en phase avec ceux des autres et chacun ne se prive pas de vous le faire savoir en vous bombardant de requêtes (avant d’éventuellement vous bombarder tout court). Un peu trop souvent peut-être ? Toujours est-il que c’est à vous que revient le fin mot de l’histoire et que la position du « en même temps » a ses limites. A un moment ou à un autre, il vous faudra choisir votre camp. En bref, dans les grandes lignes, on retrouve avec Tropico 6 un univers très familier si l’on a déjà joué au 5, quitte à avoir parfois l’impression de jouer à une version « premium » du précédent jeu. Si comme moi vous appréciez la formule, ça devrait le faire tout de même mais force est d’avouer que la revolución, ce n’est pas pour tout de suite. Vous remarquerez tout de même que l’on opère désormais sur des archipels, ce qui apporte un certain lot de changements dans la façon d’aborder les choses. Place aux ponts, embarcadères et à un sentiment d’exploration plus grand, un certain plaisir dans l’établissement successif de nouvelles petites colonies. Visuellement, il faut dire que ça permet de se lancer dans quelques jolies expérimentations, le jeu permettant de modifier facilement l’apparence des logements et de certaines autres bâtisses pour créer un ensemble cohérent ou non, mais caribéen à souhait. Reste à agrémenter tout cela d’un réseau de transports viables, pour les véhicules personnels mais aussi les transports en commun à mesure que vous traversez les âges.
Politique oblige une nouvelle fois, Tropico 6 vous permet d’affirmer plus encore votre bonne âme ou plus encore, votre côté obscur. Peut-être «drivé» depuis Bonifacio par Jérôme Cahuzac, le négociant vous permet de faire fleurir et prospérer vos comptes en Suisse. A vous de voir à quel point vous voulez faire de petits sur le dos du peuple et de ses impôts parce que si ce n’est certes pas légal et que cela vous expose, avoir des poches bien pleines peut faciliter quelques opérations ultérieures. Dans le même ordre d’idée -tordue- il est possible de lancer des raids contre certaines expéditions de marchandises par exemple, histoire d’en mettre un peu de côté. Être Gouverneur pour sa Majesté et travailler pour elle en même temps qu’on l’enfle de temps en temps, avouez que ça a son petit côté grisant. Il y a donc de quoi faire dans cet épisode, du reste lorsqu’il s’agit de jouer le bon vieux dirigeant peu regardant sur certaines méthodes.
Il n’en demeure pas moins vrai que, comme dit un peu plus haut, Tropico 6 se pose au final comme une version plus solide de la recette de base, sans jamais la transcender. On retrouve dans les grandes lignes les mêmes choses, les mêmes demandes des factions faites avec le même timbre de voix (jusqu’à quelque chose qui se rapproche du copier/coller). C’est toujours plaisant à jouer et l’ambiance chaleureuse qui y règne donne autant envie d’y rester quelques temps que de danser en buvant un coup. Mais comment à l’inverse pardonner certaines commandes qui gardent leur lourdeur d’antan ? L’exacte même lourdeur. L’ensemble fonctionne assez bien certes, notamment les menus radiaux activables simplement avec la gâchette. Le contrôle de la caméra peut passer une fois que l’on s’y habitue mais placer certaines construction ou pire, tracer une route droite ou poser un virage précis peut être un véritable exercice de patience. De même, on sent les limites de la manette quand il s’agit de naviguer aux niveaux (très) inférieurs des menus de gestion des bâtisses par exemple, ou ceux dédiés aux échanges commerciaux. Il vaut d’ailleurs mieux se tenir près de son écran.
On terminera sur une note légèrement souriante devant un jeu plutôt agréable à regarder sur Xbox One X, fluide, mais qui vaut surtout pour son ambiance. Nul doute qu’une certaine sensibilité à l’univers mis en avant est nécessaire pour apprécier avec les yeux, autant que les oreilles, les charmes de Tropico 6. Dommage cela dit que les temps de chargement, heureusement peu nombreux, nous donnent le temps de siffler le cocktail que l’on aura pris soin de préparer pour se mettre dans le bain (sans alcool, évidemment, nous sommes des gens sérieux).
Mise à jour du test avec l’arrivée de la version «Next Gen Edition» optimisée pour les Xbox Series S|X
Tropico 6 est sorti initialement sur Xbox One le 27 septembre 2019. Malgré une optimisation, assez sommaire sur Xbox One X, Limbic Entertainment a retravaillé sa copie pour sortir une édition dédiée aux nouvelles consoles Xbox. Cependant, pour ne pas brouiller les joueurs, cette «Next Gen Edition» bénéficie du Smart Delivery et est donc aussi lisible sur une Xbox One de 2013 (mais reste identique techniquement à la première version). Tropico 6 Next Gen Edition inclut, en plus de sa partie technique améliorée, les DLC «The Llama of Wall Street» (contenu étoffé avec une nouvelle mission, de nouveaux éléments de gameplay et de construction) et le pack «El Prez» qui contient des éléments mineurs.
D’un point de vue contenu, la différence est donc assez maigre pour justifier un nouvel achat au prix fort. Mais qu’en est-il de l’évolution technique ? On ne va pas y aller par quatre chemins, oui il y a du mieux, mais non, ce n’est pas une révolution. Vous avez le choix entre deux options graphiques, une dite «HD – graphismes améliorés» et une dite «4K – graphismes normaux». Ces 2 options sont sélectionnables même si votre écran n’affiche pas une résolution en UHD. La première chose qui saute aux yeux c’est la présence des ombres, contrairement à la version initiale qui en était presque totalement dépourvue. La gestion de la lumière est aussi plus naturelle, plus douce et mieux diffusée. Les textures sont légèrement plus fines avec le réglage dit «4K». On ne note aucune amélioration notable sur les modèles 3D eux-mêmes. Il est difficile de voir en quoi les graphismes sont «améliorés» entre l’option HD et l’option «4K», par contre l’image est bien plus agréable à l’œil avec la seconde option activée. Avec ce réglage vous obtenez une image plus nette, et bien moins aliasée (moins d’effet d’escaliers sur les arêtes des polygones) grâce à une image mieux définie. Le jeu est fluide sur Xbox Series X, peu importe l’option choisie.
Faut-il craquer pour cette Next Gen Edition quand on possède déjà Tropico 6 ? Pas nécessairement, surtout que le contenu additionnel peut s’acheter pour la version initiale pour un peu plus de dix euros. Cette Next Gen Edition est-elle à la hauteur pour ceux n’ayant jamais eu Tropico 6 ? Disons que cette version rattrape son retard technique sans briller pour autant. Comme pour la version sortie en 2019, Tropico 6 Next Gen Edtion peut vous séduire avec son concept, son ambiance, son humour, pas (trop) pour sa technique. Finalement, on trouvera juste dommage de ressortir un jeu, alors qu’une simple mise à jour avec une bonne communication aurait pu relancer les ventes de la première version tout en satisfaisant les joueurs de la première heure.
Galerie Comparative Tropico 6 Xbox One vs Tropico 6 Next Gen Edition Xbox Series X
+
- L’ambiance Tropico fonctionne toujours très bien
- Œuvrer sur des archipels, un ajout intéressant
- Agréable à regarder, plaisant à jouer
-
- Globalement peu révolutionnaire
- Toujours les mêmes soucis que dans le 5