Jeux

Undisputed

Sport | Développé par Steel City Interactive

7/10
One : 11 October 2024 Series X/S : 11 October 2024
08.10.2024 à 08h32 par

Test : Undisputed sur Xbox Series X|S

Fight Night boumayé !

À sa sortie sur la première Xbox il y a plus de 20 ans, Fight Night 2004 avait fait sensation. Avec son gameplay révolutionnaire, son contenu varié et sa bande-son charnue, il avait même réussi à séduire un large panel de joueuses et de joueurs et à s’imposer comme une référence. Trois épisodes inégaux s’étaient succédé sur Xbox 360 jusqu’à l’excellent Fight Night Champion en 2011, toujours disponible sur le Xbox Store. Depuis, la franchise créée par EA a déserté le marché et les adeptes du noble art sont orphelins. Heureusement, Undisputed débarque sur Xbox Series avec pour ambition de reprendre enfin le flambeau de la simulation de boxe sur console. Un pari audacieux que nous allons jauger dès maintenant !

En 2004, outre son gameplay et sa bande-son, le charme de Fight Night tenait à son contenu. Le jeu proposait en effet d’incarner de nombreuses légendes de la boxe, à commencer par l’immense Mohamed Ali qui était la vedette du jeu à l’origine de la série, à savoir Foes of Ali commercialisé en 1995 sur 3DO.

Undisputed s’inscrit dans cette tradition avec 70 stars sous licence dont Joe Frazier, Sugar Ray Leonard, Joe Louis, Mohamed Ali, Rocky Marciano, Arturo Gatti ou Nigel Benn, mais aussi des figures plus contemporaines telles que Oleksandr Usyk ou Katie Taylor. C’est d’ailleurs un des atouts majeurs du jeu développé par Steel City Interactive : offrir un roster mixte, solide et très dense. Et si Katie Taylor, Jessica McCaskill, Chantelle Cameron et Jelena Mredenovic sont, pour l’heure, un peu esseulées parmi leurs homologues masculins, on espère retrouver très bientôt des championnes comme Amanda Serrano, Mizuki Hiruta, Evelyn Bermudez, Mikaela Mayer, Rhiannon Dixon ou Ellie Scotney grâce à des mises à jour régulières.

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Le studio britannique sis à Sheffield a d’ailleurs mis les petits plats dans les grands en travaillant directement avec des stars du ring afin de les modéliser et enregistrer leurs mouvements pour un total de 60 coups, esquives, feintes et contres reproduits fidèlement. Non content de signer des partenariats avec la WBO (World Boxing Organization), ou la BBOC (fédération de boxe anglaise professionnelle au Royaume-Uni), et divers sponsors incontournables (Empire Pro Tape, Everlast, Rival, Cleto Reyes et Adams Footwear), Steel City Interactive a aussi pris soin de s’appuyer sur les données du site Boxrec qui répertorie toutes les statistiques, les classements, les calendriers officiels et les performances des pugilistes professionnels.

Cette approche louable et sans concession a de quoi séduire les amateurs ; encore faut-il que le gameplay suive. Or, Undisputed impressionne d’emblée de ce côté-là en s’appropriant et en remettant au goût du jour le fameux Total Punch Control de Fight Night qui permettait d’utiliser le joystick de droite en lieu et place des seuls boutons ABXY pour distribuer les coups de façon très instinctive. Il est évidemment toujours possible de combiner touches, gâchettes et joystick de gauche pour esquiver et parer les attaques avant de placer un contre assassin à l’issue d’une feinte bien sentie, mais ce qui fait la différence, c’est la facilité déconcertante avec laquelle les coups sortent et s’enchaînent entre deux postures de défense : jab, crochet, contre, garde haute ou basse,  esquive, coup au corps, changement de pied d’appui, tout vient intuitivement manette en main, à des années-lumières d’un UFC ! Dès lors, les vingt ans qui nous séparent du premier Fight Night nous collent littéralement un uppercut. C’est beaucoup plus fluide, délié et naturel. La précision chirurgicale dans le maniement du joystick qu’exigeait autrefois le bébé d’Electronic Arts s’efface ainsi au profit d’une mécanique de gameplay modernisée et parfaitement rodée à laquelle on adhère au premier round ! De ce point de vue, Undisputed s’affirme comme un véritable renouveau du genre et permet à des joueurs occasionnels de se rapprocher un peu des pros du joypad et de progresser sensiblement plus vite. Entendons-nous bien. Le jeu n’est pas plus facile que ne l’étaient ses prédécesseurs, tant s’en faut ! Il exige de la rigueur en matière de timing et de placement. En revanche, il se révèle bien plus accessible, ce qui change beaucoup de choses.

Du reste, les animations des boxeurs, des frappes, des étourdissements, ou des déplacements n’appellent que peu de critiques. Les temps de chargement sont brefs et pour tout dire, les combats sont aussi plaisants qu’intenses. Recevoir une raclée virtuelle n’a sans doute jamais été aussi agréable ! À ce propos, le nerf de la guerre se résume souvent à de la patience ou de la tactique à l’instar de Ali contre Foreman en 1974. Partez bille en tête face à un technicien et vous vous épuiserez avant de perdre. Tergiversez trop longtemps avec un puncheur et vous finirez au tapis au détour d’un enchaînement complet ou d’une esquive bien préparée. À l’inverse, en soupesant vos décisions, en faisant preuve de ténacité et de résilience, voire en étant opportuniste à l’occasion, vous remporterez quelques victoires sur le fil après de rudes batailles et vous en tirerez énormément de plaisir.  Surtout dans la peau d’un outsider, évidemment.

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De fait, le tour de force de Undisputed est de ne rien céder à la profondeur initiée par Fight Night tout en rendant le gameplay beaucoup plus souple qu’autrefois. C’est d’autant plus gratifiant que les opposants sont variés, avec des styles très marqués et crédibles, tout particulièrement avec les légendes de la boxe. Entre l’explosivité surhumaine d’un Frazier, la vivacité des enchaînements d’un Sugar Ray Leonard ou les déplacements félins et la puissance d’un Mohamed Ali, les combats changent du tout au tout. Ce qui fonctionne dans un contexte donné ne fonctionne pas dans un autre et vous oblige à adapter votre approche des combats. Cet aspect très immersif confère au titre une grande richesse ainsi qu’un énorme potentiel de rejouabilité. Par ailleurs, les modes de jeu sont suffisamment étoffés pour contenter les joueurs les plus exigeants : combat rapide, en ligne, carrière, combat de titre (oppositions rêvées d’icônes du ring), parties classées, affrontement en local, etc. Tout y est !

Malheureusement, les serveurs n’étant pas encore ouverts nous n’avons pas été en mesure de tester le jeu en ligne et au delà de cet aspect, Undisputed souffre aussi d’une finition bâclée. Les boxeurs sont bien modélisés, les options de personnalisation pléthoriques, mais certaines textures sont insuffisamment détaillées, et surtout, la gestion de la lumière et le rendu de la peau ne soutiennent pas la comparaison avec les ténors actuels du marché des triples A auquel le jeu se destine. Divers artefacts apparaissent parfois en bord d’écran en mettant l’action en pause et globalement les menus sont inutilement touffus et minuscules, souvent redondants et pas toujours très bien agencés. Et si la caméra offre plusieurs options en fonction de la vingtaine d’arènes de combat (proche, dynamique, à distance), seul le réglage d’origine convainc vraiment… De même, le sound design manque de profondeur et de finesse, la bande-son est un peu redondante et pas franchement renversante non plus en dépit des 18 titres qu’elle comporte (Buggy Malone, Sway Dasafo, 30H Black, Murkz, Verse), et ce, qu’on soit fan de Rap et de R’n B ou pas. Il faut bien avouer qu’en son temps, Fight Night faisait mieux de ce côté-là.

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En outre, et c’est peut-être le point le plus plus décevant, la partie dévolue à la gestion du mode carrière ne soulève pas l’enthousiasme. On peut certes choisir son entraîneur, son préparateur physique et son manager dans une liste de noms qui grossit progressivement en donnant accès à des performances de plus en plus pointues, mais ce volet est très superficiel. Autant que le choix ou la négociation des contrats. Qui plus est, définir le programme de ses entraînements est intéressant à condition de laisser le choix d’y prendre physiquement part ou de créer une routine qui s’opère instantanément avant de passer à la suite. Eh bien non ! Undisputed vous impose de cliquer bêtement sur la même option de menu pour simuler l’écoulement du temps qui passe entre deux combats ou deux blessures… Ça pouvait passer en 2004, aujourd’hui c’est franchement insupportable.

Reste l’éditeur de personnage qui se révèle très complet à défaut de briller par sa pertinence ou son ergonomie. L’essentiel est clairement sur le ring de toute façon, en faisant abstraction de l’arbitre (le même quel que soit le combat et dont les mains sont celles d’un enfant de dix ans), et de temps à autre en oubliant aussi le décor un peu cheap et le public léthargique, surtout lors des premiers affrontements. Ensuite, on retrouve un peu de relief. La qualité des environnements et des éclairages s’améliore, les commentaires — en anglais uniquement — deviennent plus prenants même s’ils se répètent souvent. Ça n’est pas rédhibitoire évidemment, mais tout de même, on n’a plus l’habitude de ce genre d’approximations de nos jours. On dirait que l’équipe n’a pas eu le temps de peaufiner toutes les facettes du jeu et qu’elle a dû faire des concessions en agrémentant le tout de quelques jolis cache-misère pour l’habillage des menus. C’est dommage, et on a une impression de sécheresse dans la proposition. Un goût d’inachevé en quelque sorte.

7/10
Undisputed privilégie donc le fond à la forme. C’est une position délicate, car à l’heure du photoréalisme tous azimuts, les carences et les imperfections passent de plus en plus mal, et il n’est pas certain que tous les joueurs y trouvent leur compte. Pour autant, c’est aussi un choix cohérent et courageux qui prône l’essence de la simulation comme argument principal et s’affranchit de l’approche « film interactif ». Dans cette logique, le titre édité par Deep Silver va jusqu’au bout, quitte à prendre le risque de s’éloigner du grand public. Ce sera peut-être payant sur la durée, mais Undisputed devra tenir ses promesses en matière de contenu en ligne pour asseoir sa popularité auprès des fans et s’imposer comme héritier incontestable de Fight Night. Pour l’instant, il mène aux points, et c’est déjà pas si mal !

+

  • Contenu dense et varié
  • Gameplay remarquable
  • Style personnel des stars du ring
  • Progression très gratifiante
  • Richesse et durée de vie
  • Modes de jeu pléthoriques

-

    • Graphismes et éclairages datés
    • Environnements assez ternes
    • Sound design fade
    • Bande-son décevante
    • Petits bugs persistants