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24.11.2004 à 10h49 par

[Edit] Quand Libération et France Télévisions dérapent en reprenant une blague de Xbox Mag

L'affaire est assez incroyable pour nous. On en rit (beaucoup), mais en même temps c'est tristement grave pour l'état du journalisme. Une blague parue il y a plusieurs mois sur Xbox Mag a fini en info sur Libération, puis au journal télévisé de 20 heures de France 2.

Petite explication des faits. Le 21 novembre dernier au journal télévisé de France Télévisions, le journaliste traite du suicide collectif survenu début novembre au Japon. Son reportage commence par un commentaire illustrant une salle de jeux tokyoïte : 147 otakus se seraient suicidés en gobant des poches de sillicone suite au report du jeu «Mort ou Vif» en février dernier (comprenez Dead or Alive). Evidemment, cette histoire a alerté des joueurs puisque personne n’avait entendu parler de cette «info». Certains ont fait quelques recherches, et ont ainsi retrouvé un article paru le 1er novembre dans Libération, qui se termine par «l’info» suivante :

«En février 2003, l’annonce du report de la vente du jeu vidéo de combat Dead or Alive a traumatisé les otaku (fadas de jeux vidéo). Furieux, 147 d’entre eux, collégiens ou lycéens, se sont suicidés en gobant des poches de silicone.» Seulement voilà, cette info n’en est pas une, puisque les dates, les chiffres et la méthode de ce suicide sont presque mot pour mot tirés de cette phrase : «La nouvelle a provoqué un drame au pays du soleil levant : 147 otakus se sont suicidés en gobant des poches de silicone pour protester contre ce report de la part de Tecmo». La ressemblance est plus que frappante.

Mais d’où vient-elle cette fameuse phrase ? Eh bien de là. Comme vous le remarquerez, il s’agit d’une news sur le report de Dead or Alive Ultimate au Japon que nous avons publiée. Cette phrase est présente en zone de «header», et est bien évidemment une blague de Ed Warner, qui emphasait sur le fait que les héroïnes de Dead or Alive Ultimate étaient siliconées. Pour le moment on ne sait pas encore exactement comment cette blague a pu être prise au sérieux ni comment elle est arrivée au journaliste de Libération (un ami ? l’a-t-il lue sur Xbox Mag ?). Très sincèrement, on ne comprend pas comment un journaliste peut la relayer sans prendre le soin de vérifier qu’elle est vraie (étant donné que bien évidemment aucun site dans le monde n’a parlé de l’affaire). Cette situation nous semble tout de même abracadabrantesque, et est tout de même assez flippante sur le niveau de journalisme atteint dans cette affaire. A côté de cela, nous sommes bien tristes de constater que certains ont profité de cette fausse info pour en faire une vraie info dommageable aux jeux vidéo eux même, ce média si méprisé et ô combien dangereux.

De notre côté nous tentons d’entrer en contact avec les  rédactions de Libération et de France 2, et espérons vivement que l’information y sera ouvertement démentie et qu’un mea culpa sera fait.

24/11/2004 – Mise à jour 1 :

à cette heure l’histoire fait grand bruit. Nous ne sommes pas certains que le serveur d’Xbox Mag tiendra tellement l’info est relayée partout. Voici une mise à jour des avancées : La rédaction de Libération nous a appelés cet après midi et nous a confirmé la publication demain, dans le journal, d’un eratum. De son côté, le journaliste de Libération ayant rédigé l’article en question nous a appelés de Tokyo pour nous expliquer qu’il avait commis une erreur. Il a vu cette «info» dans un journal anglophone et n’a pas pris le temps de la vérifier. Fatigue ? il ne sait pas, mais le fait est qu’il est conscient de l’erreur commise, et du tort que cela causera à Libération et à la profession dans son ensemble. Pour le moment nous n’avons en revanche aucune information de la part de la rédaction de France Télévision, qui va bien être obligée de s’expliquer tôt ou tard de la présence de cette «info» dans un document du journal de 20H. Nous en profitons pour remercier tous ceux qui prennent soin de relayer cette affaire et lui permettre de ne pas rester endormie.

24/11/2004 – Mise à jour 2:

l’article a été mis à jour par la rédaction de Libération sur le site internet du journal. Nous tenons tout de même à rappeler que nous n’avons pas «lancé» de blague en vue de désinformer le lecteur. La blague en question n’était pas traitée comme un vrai sujet d’actualité, mais était bien une vanne comme on aime pour faire marrer nos lecteurs et détendre l’atmosphère. Il n’y avait aucune volonté de désinformer qui que ce soit ou même de lancer une fausse rumeur sur internet (d’ailleurs ça signifierait que la vanne sur les soutifs géants 4 lignes en dessous a eu moins de succès, étonnant).

26/11/2004 – Mise à jour 3 :

Nous avons eu confirmation du passage ce dimanche sur France 5 d’une brève concernant cette affaire à Arrêt sur Images (12h30). Aujourd’hui nous avons pu nous exprimer brièvement sur Europe 1 à l’émission de Jean Marc Morandini (on essaiera de vous donner une version MP3 sous peu). Normalement ce dimanche France 2 annoncera en fin de JT de 20h l’erreur commise concernant les suicidés fictifs. En revanche on ne sait toujours pas s’ils reconnaîtront que la désinformation dans leur reportage ne s’arrêtait pas aux jeux vidéo, mais avait continué en prenant Kenny comme emblème des suicidaires, soit disant parce que celui-ci «se suicide tout le temps dans South Park». Evidemment ce n’est pas vrai, mais il faut croire qu’à France 2 on n’est plus à ça près. Du grand journalisme on vous dit…

01/12/2004 – Mise à jour 4 :

France 2 a annoncé dans son journal télévisé du 29 novembre dernier un erratum qui est loin de nous satisfaire. Non seulement celui-ci ne reconnaît pas la faute du journaliste de France 2 en incriminant «des journaux japonais anglophones» s’étant trompés (évidemment tout le monde sait que la source de France 2, c’était Libération et pas de prétendus journaux anglophones), mais en plus l’erratum ne parlait que de «147 suicides», sans même préciser que les jeux vidéo n’avaient rien à voir avec les suicides collectifs, comme cela avait été avancé dans le reportage. De notre côté, nous serons présents en direct ce samedi à l’Hebdo du Médiateur sur France 2 à 13h20, où nous serons en face du journaliste de France Télévision auteur du reportage et pourrons mettre au clair cette histoire invraisemblable.

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