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Condemned 2 : Bloodshot

Survival Horror | Edité par Sega | Développé par Monolith Productions

8/10
360 : 28 mars 2008
07.04.2008 à 08h01 par |Source : http://www.xbox-mag.net/

Test : Condemned 2 : Bloodshot sur Xbox 360

Sorti pendant les balbutiements de la Xbox 360, le premier Condemned avait réussi à se faire une jolie réputation au sein des amateurs de FPS horrifiques. Jouant plus sur son ambiance oppressante que sur le spectaculaire, le soft ne pêchait que par un gameplay trop dirigiste pour ses ambitions de l’époque. Sa suite entre nos mains, il ne nous reste plus qu’à prier pour que la longue agonie dans laquelle s’est embourbé l’agent Thomas n’engendre pas une mort foudroyante plus tôt qu’espéré.


Ma 6T va cracker

Ethan Thomas était un flic modèle, peut-être un petit peu trop aux yeux de ses supérieurs qui l’ont lâché sur une enquête qui causera sa perte. Mentale tout d’abord, puisque le flic, à force de frapper les junkies hostiles des bas-fonds à coup de barre à mine, s’abandonne à la démence et aux assauts de visions cauchemardesques. Un chemin tortueux qui s’embourbe dans la terreur totale, au fil des rencontres éprouvantes avec diverses monstruosités humaines errantes.

Physique ensuite, puisque tous ces incidents traumatisants ont laissé Thomas sur les nerfs, rejeté par ses pairs, perdu dans les rues brumeuses d’une ville qu’il a auparavant défendu. C’est en alcoolique crasseux et grossier que le joueur retrouve alors un Ethan encore sonné par les événements de sa précédente mésaventure. Les premiers pas dans la peau du clodo Rambo servent de tutorial de choc, histoire de se faire aux nouvelles commandes du personnage, avant de rentrer quelques secondes plus tard directement dans le sujet. Des hallucinations cauchemardesques, un personnage faussement humain qui semble tirer les ficelles, et la présence plus inquiétante encore d’une mystérieuse huile noire qui recouvre les murs de la ville ont vite fait de rappeler à Thomas ses anciens démons.

Sur fond de poussée insurrectionnelle des rebus de la société qui ne pensent qu’à la détruire, il va falloir repartir au combat pour essayer d’éclaircir tout ce merdier. Une quête d’abord personnelle, Thomas voulant en découdre une bonne fois pour toute avec les immondices dont il est victime. Collective ensuite, grâce à un certain soutien extérieur qui espère de lui une totale coopération quant à une ancienne affaire normalement bouclée et enterrée qui revient sous le feu des projecteurs.

La partie exploration de Condemned 2 : Bloodshot se veut quasi-inchangée par rapport à celle de son grand frère. Le but est toujours d’avancer tant bien que mal dans des labyrinthes plus ou moins urbains, et ce en explosant les divers adversaires à coup de planches cloutées ou autres tuyaux arrachés aux murs, tout en exécutant des missions plus ou moins secondaires. Ces dernières diffèrent cependant de celles du premier Condemned, puisque mieux incrustées dans le scénario et les niveaux. Adieu doncles oiseaux et plaques métalliques à retrouver, les quêtes optionnelles peuvent désormais changer d’une mission à l’autre.

Après quelques heures de jeu, on peut déjà remarquer les graphismes réussis du dernier soft de Monolith. Le jeu est beau, si l’on peut parler de beauté dans ce monde moisi, et la caméra pro-FPS, où chaque mouvement du personnage se répercute sur sa façon de voir les choses (à la Jericho), ajoute un grand plus à l’immersion. Les textures sont détaillées, les effets réussis, surtout en ce qui concerne la gestion des ombres. L’ambiance sonore cartonne elle aussi avec des musiques, d’ambiance comme orchestrales, de grande qualité, et les possesseurs de 5.1 seront au paradis, ou plutôt en enfer. La révolte urbaine environnante se suit par l’intermédiaire de diverses radios et télévisions, qu’il faudra auparavant régler en trouvant le bon angle avec l’antenne. Une astuce bien vue pour la narration de l’histoire, déjà bien plus dense dans son contenu que celle du premier volet. A noter tout de suite, et bien malheureusement, un sous-titrage français juste honteux pour un titre de ce calibre, avec parfois des paragraphes entiers de discours non traduits. Rageant, surtout lorsque cela arrive pendant de très importantes révélations. Les boules pour les anglophobes.

Les deux pieds, les deux mains dans la merde

L’agent Ethan Thomas a eu le temps de réfléchir durant ses mois passés dans la rue, et c’est avec un gameplay totalement revu et corrigé que l’on reprend son contrôle. Sa retraite dans les ordures lui a tout d’abord permis de se perfectionner dans le combat à mains nues. Habile avec ses poings comme avec des armes de fortune intelligemment ramassées, le clochard roublard peut désormais s’adonner aux joies du combat à combos. Chaque gâchette représente un coup de poing assigné à sa place sur le pad. Un coup du droit sur une simple pression sur la gâchette droite donc, un crochet du gauche pour celle de gauche. Facile. Les deux gâchettes enfoncées permettent de se protéger, et ainsi de déséquilibrer un ennemi qui aurait précédemment frappé, pour mieux lui asséner un coup fatal par la suite.

Plus intéressant, deux crochets bien placés à la suite offrent la possibilité de donner un coup plus puissant, souvent synonyme d’ennemi totalement assommé par la suite. Dans cet état, en position agenouillée pour l’adversaire, le joueur peut alors effectuer une sorte de fatalité à son assaillant. La nouveauté par rapport au premier volet, c’est que ces « finish him » sont désormais contextuels, c’est-à-dire en fonction de l’environnement dans lequel le joueur se trouve. Le shooté à genoux donc, la fatalité permet de le saisir et de le traîner jusqu’à une endroit clé symbolisé par une tête de mort flottante. Une fois à proximité, l’action se lance d’elle-même, de quoi devenir spectateur d’une mort bien violente, façon crâne enfoncé dans un écran de télévision ou explosé contre le pan d’un mur.

Ces divers excès de violence pure augmentent alors une jauge dans le haut de l’écran. Chargée à bloc, elle donne la possibilité au joueur d’effectuer grâce à une double pression sur une des gâchettes une série de mouvements tueurs au corps à corps, à effectuer en composant une bonne série de touches façon QTE. Les affrontements dans Bloodshot deviennent alors très stratégiques à jouer, en plus d’apporter une belle profondeur au tout. Des combats à la fois intéressants et flippants, grâce à une maniabilité précise mais ne donnant jamais un total sentiment de sécurité.

L’autre gros point entièrement dépoussiéré du gameplay vient de la partie enquête policière. L’arrivée sur une zone de crime/à indices est désormais matérialisée par l’apparition d’une icône en forme d’oiseau sur l’écran. En appuyant sur le bouton A, Ethan range son arme pour passer en mode recherche d’indices. Un réticule apparaît alors à l’écran, permettant de zoomer si besoin pour relever différentes preuves, comme les traces de balle sur un cadavre ou la manière dont le sang a coulé sur le sol. Au joueur ensuite d’interpréter ce qu’il a sous les yeux grâce à un petit QCM.

Zoomer sur la tête de la victime fera par exemple apparaître un sous-menu demandant de choisir entre plusieurs possibilités, comme « homme adulte, femme âgée, adolescent ». Un écusson sur le blouson de la victime peut déterminer son métier, tout comme le sang séché sur le sol peut indiquer si la victime a été transportée ou non, si elle a rampé ou s’est faite traîner, et ce selon l’interprétation même du joueur. Une bonne conclusion augmente ses points d’agent, qui détermineront de la qualité des prochaines améliorations à débloquer. La grande classe en d’autres termes, enfin en accord avec une des parties presque oubliées du premier Condemned.

Certains niveaux se concentrent même sur cet aspect de compréhension et d’analyse de l’histoire, avec parfois un petit jeu de questions/réponses avec des supérieurs insistants qui donnent vraiment l’impression d’être en charge d’une enquête dynamique. Enfin, les outils médicaux légistes (dont l’utilisation est simplement conseillée par l’apparition d’une petite icône à l’écran) sont accessibles à tout moment dans l’inventaire, essentiels pour prendre des photos, suivre un chemin de sang séché ou encore capter des ondes précises avec le spectromètre.

Un aspect enquête policière pour une fois pas bradé et vraiment intéressant, qui sert le sujet du soft de fort belle manière. Des enquêtes bien menées alliées à de bonnes réponses aux questions des collègues, en plus de bons résultats lors des combats face aux ennemis, font gagner des points qui permettent de gagner automatiquement diverses améliorations physiques, allant du poing américain à la semelle anti-bruit, en passant par divers rajouts pour les jauges de vie et de combo.

Ethan-asié

Car de l’expérience et des petits bonus physiques, il va en falloir pour arriver au terme de l’aventure, par ailleurs légèrement plus corsée que celle de son aîné. L’histoire, avec ses multiples embranchements tout droit sortis d’un épisode d’X-Files et ses rebondissements bienvenus, se pète en plus le luxe d’apporter une multitude de décors (ce qui faisait furieusement défaut au premier Condemned) en plus d’apporter une bonne variété dans les situations. Parfois simple proie qui doit fuir dans des scènes d’une rare intensité, parfois au contraire réelle machine à tuer qui doit désamorcer une série de bombes dans un endroit bien gardé, le joueur va pouvoir verser pas mal de litres de sueur, et pas seulement à cause de l’ambiance angoissante du soft.

Le suspense et l’horreur se côtoient, en plus d’une partie action pure bien plus présente que ce que l’on avait l’habitude de voir dans un Condemned. Dès la deuxième mission du titre, on se retrouve dans une escouade, accompagné de deux autres malabars, et ce avec un fusil mitrailleur à lunette dans les mains. Pour l’anecdote, les tremblements d’Ethan ne cessent qu’après l’absorption du contenu d’une bonne bouteille d’alcool. La classe. Ces passages de FPS plus classiques, à la Call of Duty, tout en restant plutôt rares, ponctuent nerveusement certains moments-clés de l’aventure. Pas de quoi changer la donne en tout cas, puisque plus de 80% du jeu se fait en arrachant des murs, comme à l’ancienne, des armes toujours temporaires car destructibles.

C’est bien là finalement que Condemned 2 impressionne et séduit, comme il peut décevoir : avec une mise en scène de plus haute volée et des séquences d’action plus intenses par rapport à ce que l’on pouvait trouver dans le Condemned d’origine, le nouveau titre de Monolith assure plus de spectacle, d’action, de rebondissements et d’explosions. Un côté qui sent fort la testostérone et qui risque de déplaire aux plus puristes et conservateurs des joueurs. Condemned 2 suinte donc la « suite à gros budget », et ce en délaissant peut-être le ton davantage intimiste du premier, au profit de plus de diversité aussi bien dans les lieux à arpenter que dans les situations à surmonter. Pas de quoi en faire un jeu tout public cependant, tant les scènes bien gores et le ton résolument adulte se sont eux aussi amplifiés, à l’instar des méandres du scénario. Certaines pistes, considérées comme fausses pour perdre le joueur à l’époque de la première aventure, reviennent sur le devant de la scène et feraient presque croire que cette suite était prévue depuis le début. Dommage que l’ensemble soit un peu trop confus et que certains rebondissements narratifs se révèlent être gros comme une maison.

Les nouvelles aventures d’Ethan demandent en tout cas plus d’investissement, et peut-être une sensibilité autre, pour être vécues à leur juste valeur. Mais le fait est que l’aventure solo de Condemned 2 sent bon l’aboutissement d’un concept, pour une campagne de qualité beaucoup moins soporifique que celle de son prédécesseur. L’intérêt du mode Xbox Live, anecdotique au demeurant, ne dépendra que de la patience des participants et sur leur faculté à lancer des vannes pas drôles pour égayer les rencontres. Les modes Bum Rush et Crime Scene ont le mérite d’être divertissants, pas de quoi non plus y passer des heures. Un petit bonus pas super intéressant, à part peut-être pour les responsables marketing de chez Sega.

Dans les bas-fonds puants d’une cité labyrinthique, Condemned 2 : Bloodshot sent la suite à gros budget avec toutes les qualités et les petits défauts que cela sous-entend. Graphiquement mieux foutu que son aîné, et dopé par un gameplay enfin en parfait accord avec le sujet traité, le rejeton alcoolisé de chez Monolith assure également plus de spectacle, ce qui peut faire regretter le ton plus intimiste et singulier du premier épisode. Reste que les diverses et minimes imperfections n’ont pas de quoi encrasser ce Condemned nouveau, finalement plus proche de la grande voie lumineuse que du trou infernal du non-sens et de l’oubli.

+

  • Un gameplay enfin au niveau des ambitions du jeu
  • Un scénario recherché…
  • Mise en scène schizophrénique
  • Sons et graphismes de qualité
  • Variété des situations et niveaux

-

    • … Parfois même un peu trop confus
    • Quelques saccades
    • Live anecdotique
    • Le niveau final
    • Un sous-titrage français scandaleux