Jeux

Aeon Flux

Action/Aventure | Edité par Majesco Entertainment | Développé par Terminal Reality

2/10
360 : 14 avril 2006
21.04.2006 à 18h09 par |Source : http://www.xbox-mag.net/

Test : Aeon Flux sur Xbox

A force d’appliquer le principe élémentaire du « rien ne se perd, tout se transforme » et, en conséquence, de détourner le cours naturel des choses, la race humaine a fait de sa connaissance le vecteur de sa propre perte. Encore aurait il fallu écouter José Bové et sa clique de faucheurs de pieds de maïs lorsqu’ils clamaient haut et fort qu’il faut arrêter de consommer des substances génétiquement modifiées. C’est à partir de ce triste postulat que démarre notre histoire : imaginons un futur – genre en 2011 – où l’industrie biochimique s’intéresse à nos aliments. Seulement une mauvaise mutation libère un virus sacrément mortel baptisé sobrement « maladie industrielle »… quand la technologie s’en mêle, les scénaris prennent une tournure apocalyptique.

Y’en a marre du cassoulet en boîte !

Avant qu’elle ne soit éradiquée en 2015 grâce au vaccin du chercheur Trevor Goodchild, la maladie a décimé près de 98% des terriens, ne laissant éparses que quelques cinq millions d’âmes. Cinq années plus tard, les survivants forment une unique colonie appelée Bregna – laquelle se scindera en deux parties après une série de conflits entre 2030 et 2105 et donnera naissance à une seconde cité-état : Monica. C’est à ce moment précis que nous prenons le train en route tandis que nos nouveaux frères ennemis s’affrontent à coups de gadgets électroniques après la sécession des deux camps. Les Monicans – désireux de mettre un terme à la propagande des Breens et aux agissements pernicieux de leur gouverneur (le scientifique susmentionné) – envoient en dernier recours des agents OGM (puisque eux aussi organismes génétiquement modifiés – le résultat n’étant pas toujours probant vu que ça frise parfois la foire aux monstres avec, en vedette, Sithandra la femme aux quatre mains). Tout droit sortie de son univers mi-bande dessinée mi-film d’animation, la pulpeuse et carnassière Aeon Flux ne tarde pas à infiltrer un pseudo défilé de mode où se rencontrent – et très accessoirement s’affrontent – les meilleurs combattants de Bregna : un prétexte fallacieux qui nous donnera surtout l’occasion d’infiltrer les laboratoires secrets de la firme Goodchild dans la peau de la tueuse à la combi noire. Si jusqu’ici la trame se tient à peu près autant que moi après cinq verres de tequila, l’histoire se corse puisque les sept épisodes / niveaux de cette saga vont se dérouler durant une période de 306 ans – rassure toi cependant ami lecteur, notre héroïne ne se momifie pas au fil de temps. En réalité, elle meurt et renaît indéfiniment et sera, à tour de rôles, partisane de l’un ou l’autre clan. Le même procédé sera accordé à Trevor Goodchild, l’ennemi juré avec qui elle entretient une relation en dents de scie et passionnelle suivant la ville qu’elle défendra. A ce marasme scénaristique s’ajoute le fait qu’on ne sait jamais pourquoi on est là, ni ce qu’on est supposés y faire – surtout si l’on s’en tient aux objectifs embryonnaires qu’on nous fournit (« pénétrer le labo du méchant », fantastique vu que tout le niveau s’y déroule, on ne va pas aller se commander un lait grenadine non plus or encore « affrontez la combattante Una », comme elle court vers nous en pointant une arme et en hurlant, il est difficile d’imaginer qu’elle nous fait une danse de la pluie). De prime abord, on se dit que ne suivront que les petits futés qui ont regardé la série sur MTV et face à un personnage ni attachant, ni charismatique ainsi qu’à un manque de dialogues dans le soft, la première impression est déconcertante et l’on s’emballe autant que devant le hachis Parmentier datant de trois jours à la cantine.

Big brother is borring you

Aeon Flux est, en réalité, un concept cosmos transgénique comme dirait André Manoukian avec ses allures futuristes très années 70 et ses environnements en forme de flippers géants aux couleurs bariolées. Les rares antagonistes qui s’y croisent semblent être issus d’un rêve d’enfant – du draculéen et albinos Trevor à la jeune sœur très éthérée (voire insipide) Una en passant par la Manieuse – la chef supposée de la rébellion monicane, sans omettre des hordes d’ennemis clonés à l’IA plate comme une limande. On en vient presque à se demander où sont passés les cinq millions de réfugiés tant les décors sont déserts, reflétant un peu plus cette lourde impression d’absence et de morne plaine comme dirait l’autre. Pourtant quelques gadgets viennent nous chatouiller les narines et l’on admet, que de ce côté-là, les créateurs nous ont pondu des idées originales et innovantes comme l’utilisation des Orbs (petits robots sphériques télécommandés) et des rouleurs (conteneurs sphériques) ici assimilés à des mini-jeux. Les premiers permettront la prise de contrôle à distance de certains appareils afin de déconnecter des systèmes de sécurité ou de contrôler une tourelle mais leur faible durée de vie sera la plupart du temps sujet à des « contre la montre » pour les amener d’un point A à un point B en évitant les tirs ennemis. Les seconds prennent la forme d’un transport d’un genre nouveau où se glisse l’héroïne pour accéder à certains endroits protégés par des champs de force – requérant une nouvelle fois d’éviter lasers et autres pièges. La sensation de « flipper » n’en est que renforcée du coup, un aspect toutefois sympathique mais mal dosé car, si les combats sont souvent extrêmement courts, il sera monnaie courante de refaire vingt essais pour aller mettre votre boule au bon endroit. De l’univers cyberpunk, le titre a tiré des armes futuristes pas mal dans leur descriptif mais sommaires question usage. La belle se fera la belle justement grâce à son F.U.G, un automatique s’attribuant quatre types de munitions (les fléchettes, les projectiles magna pratiques pour les robots, les ondes de choc et les puissantes zingers) mais l’arme n’accepte qu’un type de munition à la fois et n’a pas besoin d’être rechargée – les balles se ramassant dans les niveaux. Dans la même veine, l’amazone bionique utilisera un grappin pour monter sur une plateforme ou en descendre suivant les circonstances, avec effet de glisse dans le vide, l’arme à la main, plutôt stylé. Toutefois, le joujou ne s’active pas à votre guise et nécessitera des points d’ancrage pré-définis, en octroyant tout de même une petite attaque par les airs lorsqu’un ennemi se situe en dessous. Chaque génération du super agent nettoyant devant être « renseignée » sur son environnement, la tueuse s’avalera des capsules de communication pour intercéder avec ses alliés ainsi que des capsules dîtes « rens », sortes d’implants cérébraux qui propagent des souvenirs par séquences vidéos ou éléments audio.

C’est du cubico cribouillage abstrait

Au rayon des combos enchaînés et autres acrobaties inhumaines, Aeon Flux apparaît en tête de gondole. Les amateurs de virevoltes apprécieront une panoplie de mouvements variée mais carrément pompée sur la série des Prince of Persia. Tellement inspirée d’ailleurs que les géniteurs ont même repris les angles de vues parfois tordus de la trilogie persane. Du saut de barres en barres (ici mouvantes toutefois) à la possibilité de courir à la verticale (avec rebond arrière) ou à l’horizontale contre un mur, en passant par les agrippés le long des rambardes, les allusions ne manquent pas. N’en demeure pas moins une fluidité très féline dans sa conception, appréciable sans doute mais mal exploitée. D’une part, la rapidité est telle qu’elle en devient aussi maniableque de tenter un salto arrière sur une plaque de beurre, du coup les pirouettes sont souvent à proscrire lors des phases de combat en hauteur sous peine de choir. En sus, les combos sont altérés par un décalage qui, après une chorégraphie maniérée histoire de se la péter devant l’adversaire, ne permettent pas de se replacer correctement rapidement et tirer un coup de pied sur un objet pour l’envoyer en pleine figure s’avère rédhibitoire. D’autre part, le titre souffre d’une linéarité suscitant quasiment des automatismes – impression doublement rendue par la présence d’une flèche à l’écran qui désigne l’endroit où aller et par un design qui ne se prête nullement à l’exploration. Constamment, le joueur ira à gauche parce que c’est barré à droite et remplira le seul objectif requis parce qu’il n’y a rien d’autre à faire. Au final, la sensation de jouer un robot sans la rigidité métallique et ceci malgré quelques dialogues plutôt pauvres qui n’approfondiront pas le personnage principal ; toutes ces possibilités restent donc en suspens dans des environnements dont le minimalisme aurait plu à Piet Mondrian, le roi de l’assemblage des carrés. Les textures blafardes des extérieurs et le manque de détails finiront d’achever ce vague goût de mollesse qui traîne en dépit des mouvements rapides de la demoiselle. Pourquoi un tel constat ? D’abord le déhanché outrancier ne suffit plus à vous cataloguer en tant qu’icône sexy des jeux vidéo, surtout si le caractère est creusé aussi profondément qu’une cuillère dans un Petit Suisse et puis le cycle infernal de mort et de résurrection de l’héroïne clonée ne contribue guère à un attachement quelconque. Ensuite, le soft n’entre dans aucune catégorie précise : ni vraiment jeu d’action, ni jeu d’exploration, ni space opera, ni cyberpunk, le titre s’inscrit davantage dans le genre plateforme avec bonus à ramasser ici et là. Cette perspective met mal à l’aise lorsque l’on a visionné la bande annonce musclée du film qui, lui, se déroule à partir de 2415 après l’énième retour à la vie de notre agent.

Aeon Flux s’auto-pénalise à cause d’un manque de finition flagrant qui affecte les graphismes, la modélisation des protagonistes, la richesse des niveaux et une bande son sans réelle envergure. Il s’inscrit dans la gamme des jeux peu évidents à appréhender car tournés principalement vers un public déjà préparé et ne s’y retrouveront probablement que les fans de la série. Le titre n’en demeure pas moins conceptuel avec son ambiance proche d’une série de science fiction des années 70, ses décors Ikea du futur et son style similaire à un T.R.O.N. C’est un peu comme un Rubi Cube, ça énerve mais on recommence avant de le jeter par la fenêtre.

+

  • Quelques objets insolites plutôt bien trouvés
  • Les amateurs d’acrobaties s’en donneront à cœur joie

-

    • Aucune liberté n’est offerte au joueur
    • Des combos difficiles à placer malgré un effort de fluidité
    • C’est le plat pays niveau graphismes, IA et personnages
    • On s'ennuie à mourir en jouant !

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