Jeux

Contra Rogue Corps

Action | Edité par Konami | Développé par Konami

2/10
One : 24 septembre 2019
30.09.2019 à 11h16 par

Test : Contra Rogue Corps sur Xbox One

Bien lire avant de signer

C'est un retour surprise, autant pour la licence Contra que pour l’éditeur Konami qui semblait cloisonné à la seule édition d’un PES annuel. Jusqu'ici, Contra Rogue Corps donnait l’impression d'être soit un fond de tiroir embarrassant sortant discrètement pour éviter une perte de licence, soit un jeu improbable condamné avant sa sortie à l’échec commercial pour finir par devenir culte au fil du temps. A voir maintenant ce qu’il en est, après l’avoir subi de près.

L’histoire prend place après celle des Contra originaux, suite à la victoire des humains sur les envahisseurs aliens. Elle nous narre la contamination totale d’une ville via un portail extra-terrestre dégueulant sur terre une armada de monstres aux faciès et dégaines aussi improbables que leurs victoires finales. Pour ne pas arranger les choses, l’air est totalement contaminé par un virus rendant immédiatement fou le moindre soldat déployé sur place, lui donnant l’impression d’avoir des dents qui lui poussent dans les paupières (sans rire, c’est dans l’intro). Le seul espoir de l’humanité réside dans les «Jaeger», mercenaires d’élites immunisés on ne sait trop comment des effets du virus et bien décidés à se remplir les poches en massacrant du moche à la pelle.

Cette fine équipe de beaux gosses est donc composée de Kaiser, archétype du Nick Fury badass avec une foreuse à la place du bras gauche, Miss Harakiri qui ne fait pas dans l’ouverture de booster Pokémon mais partage son corps avec un envahissant alien rappelant fortement Krang, l’ennemi des Tortues Ninja. Puis vient GB, pour Grosse Bête, scientifique piégé dans un corps cybernétique à la forme d’un Panda, mais qui est toujours obligé de faire caca. Dernier de la classe, Gentleman est un mutant insectoïde qui a toutes les bonnes manières d’un Rothschild couplées aux habitudes alimentaires de Seth Brundle. Hormis pour leur design plutôt drôle et réussi, les variations entre les personnages se feront principalement sur leurs duos d’armes à feu, que vous pourrez ensuite changer ou améliorer dans l’hideux HUB central, ainsi qu’autour de leurs capacités spéciales. Capacités qui ont toutes le mérite d’êtres plus ou moins inutiles à leurs façons. De l’arme surchargée de Kaiser qui ne dure pas plus de quelques secondes aux tourelles de GB qui se font détruire avant même de toucher le sol, en passant par le portail d’énergie de Gentleman qui fonctionne sur à peine quelques centimètres ; jusqu’à la surpuissance de la miss, qu’on a vraiment du mal à différencier de la puissance de tir normale. Vous n’avez plus qu’à choisir entre la peste et le choléra avant de partir au front.

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Une fois lancé dans la moiteur du champ de bataille, difficile d’être indulgent avec un gameplay, qui parait sortir tout droit des premiers jeux en 3D prenant en compte les doubles sticks analogiques. Vous n’aurez aucun contrôle sur la caméra, le stick gauche sert à se déplacer, le droit à bloquer une direction de tir tout en vous déplaçant. Si le principe est aussi vieux que simpliste, il ne poserait pas le moindre problème s’il ne souffrait pas d’un temps de latence à peine croyable. C’est bien simple : on ressent directement le temps de changement de direction, ce qui permet de mettre la moitié des tirs à côté de la cible lorsqu’elle est seule à l’écran. Le lock avec le stick droit est encore plus affecté par la latence et vous ressentirez la peine que subi le vieux Captain America privé de son sérum du super soldat lorsqu’il doit affronter les troupes de l’Hydra.

Pire encore, le système de munitions basé uniquement sur des armes en surchauffe nous plonge constamment dans la galère, avec une arme inutilisable pendant de précieuses secondes, sans aucun moyen pour pouvoir se défendre. Bien évidemment, dans leur volonté d’empêcher le joueur de s’amuser une seule seconde avec leur soft, les développeurs n’ont pas pris en compte l’idée d’ajouter une attaque au corps à corps. Cela permettrait notamment de se sortir des situations les plus virulentes avec des dizaines d’ennemis qui vous tombent dessus, ou d’avoir un minimum de répondant pendant le refroidissement de l’arme. N’oubliant pas qu’il est toutefois un titre bien dans son époque, vous pourrez profiter avec Contra Rogue Corps d’un inévitable dash, aussi court que passablement inutile et d’un coup fatal au corps à corps nécessaire à l’exécution d’un certain type d’ennemi. Inutile également et dotée d’une animation aussi longue que ridicule -lorsqu’elle n’est pas carrément victime d’angle de caméra buggée- une super bombe pourra également être envoyée pour canaliser un peu l’ardeur des foules. Mais curieusement, ces bombes pourront avoir un effet hyper dévastateur à un moment et taper complètement à côté le coup d’après. Pour ajouter l’insulte à l’injure, sachez également que les sauts sont eux aussi de la latence de l’enfer, sans parler des distances que l’on peine souvent à bien évaluer.

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Au fil des missions, vous récupérerez également argent et objets vous permettant d’améliorer votre équipement et votre personnage via des greffes chirurgicales. En plus des habituelles prises de niveaux, évidemment. Rien de fondamentalement original mais nécessaire à la progression dans les niveaux, induit par la relative difficulté du jeu. Autre épreuve, il faudra subir l’horrible HUB et les menus sortis du pire cauchemar du joueur souhaitant aller à l’essentiel. Rempli de sous-menus de craft et de pages entières d’objets débloqués, on ira la plupart du temps à l’essentiel en choisissant la première amélioration venue, sans observer de réelle différence lors des phases de combat.

Pensant peut-être que Contra Rogue Corps est intégralement taillé pour le jeu solo, le loup blanc solitaire se rendra rapidement compte que l’onanisme derrière la vision des Japonais de Toylogic est un long chemin parcouru d’embûches. Déjà, les tirs ennemis font des dégâts légèrement abusés et vous laisseront trop rapidement avec une jauge de santé au plus bas. Heureusement, cela est compensé par des bonus de santé assez généreux. Par la suite, vous vous rendrez rapidement compte que deux des personnages jouables, c’est-à-dire Miss Harakiri et Gentleman, sont pensés avec leur équipement d’origine pour le soutien et n’apporteront que des soucis et des crises de nerfs au pistolero solo. Et puisque l’adage jamais 2 sans 3 prend ici tout son sens, vous pouvez rajouter à votre peine un compte à rebours très serré pour chacune des missions. Il ne faut donc pas trop traîner ou prendre le temps d’explorer les décors, de toute façon dénués d’objectifs annexes ou collectibles, au risque de vous retrouver avec un game over alors que vous entamiez la dernière jauge de vie d’un boss. Puisqu’un thé est toujours plus agréable agrémenté de harissa, vous devrez bien évidemment recommencer l’intégralité de la mission à zéro en cas d’échec. Petite précision également : il est totalement impossible de mettre le jeu en pause, même en sélectionnant le mode de jeu hors-ligne. Pratique, n’est-ce pas ?

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C’est évidemment à ce moment précis que le lecteur dubitatif se laisse aller à son commentaire favori : « oui, mais c’est avant tout un jeu multi ». Parlons donc des modes multijoueur. Jouable à 4 sur un même écran, mais uniquement après avoir débloqué le rang 2 des missions, Contra Rogue Corps vous fait prendre le risque de perdre rapidement tout contact avec vos amis après les avoir convaincu de vous rejoindre dans ce joyeux bordel. Bien évidemment, le jeu n’étant pas avare en déceptions, n’espérez pas parcourir la campagne en multijoueur local. Seul le mode exploration, qui cache en fait des combats en arènes, sera disponible sous cette configuration. Pour explorer la campagne à plusieurs, il est évidement possible de rejoindre un salon de jeu en ligne pour faire la connaissance de joueurs du monde entier ; mais après une bonne demi-heure d’attente et devant l’impossibilité de trouver ne serait-ce qu’un joueur pour nous accompagner, nous avons dû également faire une croix sur cette possibilité. Reste celle d’affronter les joueurs en colère et regrettant leur achat dans des arènes en player vs player permettant à 8 quidams de gentiment se foutre sur la gueule. Malheureusement, le constat est sans appel. Un samedi après-midi, la semaine de sa sortie, les salles sont totalement vides de joueurs. Difficile de les en blâmer, tant il y a de chose plus intéressantes à voir dans la vie, comme réparer un évier qui fuit ou observer par sa fenêtre un sac plastique emporté par le vent.

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Une fois n’est pas coutume, la technique est un parfait reflet du gameplay. Déjà pourvu d’une direction artistique atroce, renforcée par des cinématiques en images fixes qui feraient passer le plus mauvais des dessinateurs édités par Avatar Press pour Brian Bolland, Contra Rogue Corps affiche en plus d’une palette de couleurs baveuses renvoyant directement à la définition des jeux de l’ère PS2. La modélisation des ennemis et des décors est évidemment à l’unisson et la pauvreté du level design, qui se contente de copier-coller des arènes fermées les unes après les autres, n’arrange rien à la misère artistique totale des décors. Amateurs de nanars vidéoludique, soyez rassuré, tous les clichés du genre son bel et bien présents. Des tonneaux explosifs aux voitures en flamme, jusqu’à l’escalier renversé et les chemins bloqués par des tas de gravats.

On peut toutefois avoir un minimum de tolérance pour les boss, qui n’ont certes pas des gueules de porte-bonheur mais qui on le mérite de faire parfois sortir un éclat de rire aussi bref que le temps d’amusement que l’on prend sur le jeu. A l’unisson, la partie sonore est également une perle de moments stressants. Des musiques d’ascenseur diffusées en boucle dans le HUB central, en passant par les bruits de talons de Miss Harakiri et les petits couinements, un brin émoustillants, lors des dash de Gentleman. Petite cerise sur l’énorme gâteau de crottin qu’est le jeu : la technique fait évidemment peine à voir. Déjà bloqué à 30 FPS, même sur Xbox One X, le framerate se permet en plus de descendre en dessous lors de certains combats de boss. Pire que tout, la finition bancale est source de plantages fréquents, renvoyant immédiatement au dash et vous obligeant à recommencer une mission à zéro alors même que vous étiez au tableau récapitulatif des scores. Oui, c’est du vécu et ça met bien les nerfs.

2/10
On y a cru. Très brièvement certes, mais on y a cru. Il faut toutefois très peu de temps pour se rendre à l’évidence : Contra Rogue Corps n’est pas du tout le revival du double A nanar, aussi bourrin et stupide que jouissif. A moins que votre bonheur ne se trouve dans le massacre à rythme industriel et décérébré de sacs à point de vies horribles dans des décors hideux et répétitifs, vous pouvez facilement passer votre chemin pour jouer à n’importe quoi d’autre que ce ratage total et surtout même pas drôle.

+

  • Design des persos sympa
  • On peut le subir à 4
  • Les ennemis se collent à l’écran comme dans Turtles in Times sur SNES

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    • Direction artistique : Valérie Damidot
    • Level design : Le Corbusier
    • Game design : Tomas de Torquemada
    • Conception sonore : David Guetta
    • Réalisation cinématique : Bruno Mattei