Test : Crimson Dragon sur Xbox One
Salamèche ou ça le fait pas ?
Descendant officieux de sa lignée auréolée Panzer Dragoon-esque, Crimson Dragon ne se contente pas de partager son dénominateur commun en la personne de Futatsugi Yukio, il en utilise tout d’abord les mécanismes et codes développés par son illustre créateur depuis deux décennies. Dans la peau d’un jeune surdoué ayant en guise de monture un dragon qui suit un rail invisible façon Space Montain, le joueur doit se servir des pouvoirs de son fidèle destrier afin d’annihiler et esquiver les assauts répétés de la faune locale. La maniabilité, simple, ne s’empêtre pas dans les manœuvres inutiles. Le stick gauche sert à déplacer son dragon autour du fil imaginaire qui le mène jusqu’à la fin du niveau, alors que le gauche bouge le réticule de visée. Trop sensible pour être précis dans la configuration par défaut, nous vous conseillons vivement de faire un petit saut dans les options afin de régler sa vitesse.
« Ce côté très morcelé qui se dégage des escarmouches de cette campagne fait indéniablement penser à un jeu étrangement calibré au marché des smartphones, d’autant plus que les missions, très courtes, n’excèdent rarement les cinq minutes de vol »
En plus des gâchettes pour changer de pouvoir/tirer et esquiver, notons la présence d’une touche permettant de déclencher une attaque Berserk (dans le cas où notre joueur est accompagné d’un homme de main) et de quoi accélérer et freiner, particulièrement utile lors des rares passages où l’on dispose de son dragon sans que ce dernier ne soit aimanté à son rail fantôme. Très proche des Panzer Dragoon à de rares exceptions près, cette jouabilité souffre cependant d’un souci lié à la caméra qui, parfois, ne peut tourner proprement à 360° autour du héros. Il est, par exemple, impossible de chercher des ennemis dans son réticule en pivotant la caméra sur la droite du dragon si le jeu prévoit que cette manipulation doit se faire par la gauche. Lors des passages où l’angle de vue contrôlé par la machine s’amuse à effectuer des tonneaux et où le dragon emprunte des boyaux aux virages serrés, il est difficile, voire impossible, de vraiment faire ce que l’on veut avec le système de visée. Dur, pour un shoot.
Du côté de la progression générale, le joueur doit principalement avancer de mission en mission, sélectionnables via un menu attitré. Un système qui tend à rompre la linéarité liée au genre, puisque certaines conditions pour débloquer de nouveaux niveaux obligent le joueur à refaire d’anciens chapitres, afin de récolter des items accessibles via la destruction de créatures particulières. Ce côté très découpé en mondes qui donnent accès à des missions ne sera pas du goût de tous tant la narration se prend du plomb dans l’aile. Futatsugi nous avait habitués à bien mieux de ce côté-là. Pour terrasser la faune agressive locale, le joueur peut choisir un dragon et/ou des pouvoirs liés aux éléments que sont le feu, l’électricité et le vent, octroyant bonus ou malus selon le type de monstres de la mission sélectionnée. Heureusement, un petit tableau récapitulatif avant de se lancer dans un niveau permet de savoir en un coup d’œil si le dragon choisi est le meilleur pour affronter les locaux, et ainsi procéder – ou non – à des réglages de dernière minute. Le comble, c’est qu’une option permet de changer son dragon et ses pouvoirs à la volée dans une fenêtre accessible après le tableau récapitulatif.
« Lors des passages où l’angle de vue contrôlé par la machine s’amuse à effectuer des tonneaux et où le dragon emprunte des boyaux aux virages serrés, il est difficile, voire impossible, de vraiment faire ce que l’on veut avec le système de visée. Dur, pour un shoot »
Cela signifie qu’il est nécessaire de revenir en arrière afin de vérifier ce fameux récap’ et ainsi s’assurer que nos nouveaux choix ne sont pas trop mauvais. Notons enfin la présence d’un magasin octroyant aux chasseurs que nous sommes la possibilité d’acheter de nouveaux dragons, pouvoirs, et d’autres babioles permettant de revivre en cas de mort, de booster le gain d’XP de son chaton, ou encore de devenir temporairement plus résistant ou plus offensif via l’utilisation lumineuse d’ampoules. L’évolution des dragons est une étape en tout cas très importante qu’il ne faudra pas ignorer afin d’éviter de s’arracher les cheveux lors des passages clés. Nous vous conseillons par exemple de faire évoluer au max un dragon pour le boss final. Ce n’est en tout cas pas la présence d’un perchoir permettant de nourrir et d’admirer ses dragons qui peut apporter un semblant d’originalité au tout. Purement factuel, il ne permet aucunement de faire développer un lien entre le joueur et ses montures écaillées.
Les Panzer Dragoon furent de grands shoot, et Futatsugi fut un grand créateur. Crimson Dragon, lui, se fait bizarrement remarquer par la petitesse des éléments qui le composent. Fallait-il y voir un signe énonciateur avec le bébé dragon octroyé à la fin de l’épisode Orta ? L’histoire, narrée par des écrans fixes sommairement crachés par After Effect ou racontée par des hologrammes de quelques frames, n’est qu’un prétexte pour partir en mission sans qu’à aucun moment le joueur ne se sente vraiment impliqué. Les missions en elles-mêmes sont découpées en plusieurs objectifs. Il sera par exemple parfois demandé d’esquiver les coups, de tuer tous les ennemis, de ramasser toutes les balises ou encore d’annihiler un boss avant la fin d’un chrono. Ce côté très morcelé qui se dégage des escarmouches de cette campagne fait indéniablement penser à un jeu étrangement calibré au marché des smartphones, d’autant plus que les missions, très courtes, n’excèdent rarement les cinq minutes de vol.
« Autrefois enchanteur et un rien steam punk, l’univers de Panzer Dragoon grandement emprunté dans ce Crimson n’en demeure plus que l’ombre de lui-même »
Rien de très grave au premier abord, puisque cela permet d’être mis en relation très souvent avec le score de ses amis, même si l’accumulation de tous détails rangent très rapidement Crimson Dragon dans la catégorie des « p’tits jeux » sans grande ambition. Du côté de la profondeur du gameplay, les pouvoirs des dragons se comptent en trois grandes familles : les lasers rapides qui nécessitent d’être lockés sur un ennemi avant d’être lâchés vers lui, les missiles à tête chercheuse, lents, mais qui ne nécessitent pas d’être précis, et enfin les pouvoirs de zone, qui permettent de cramer lentement la faune se trouvant dans un grand réticule de visée. Devant parfois être rechargés avant d’être de nouveau utilisés, ces pouvoirs permettent de diversifier la façon d’appréhender les affrontements, malgré un système de jauge discutable pour certains.
Autrefois enchanteur et un rien steam punk, l’univers de Panzer Dragoon grandement emprunté dans ce Crimson n’en demeure plus que l’ombre de lui-même. Non pas que l’inspiration soit mauvaise et que le bestiaire soit fondamentalement décevant, mais l’impression qui se dégage du spectacle de tous ces éléments assemblés est globalement mauvaise, malgré des musiques somptueuses qui rythment le périple avec goût. Les affres de l’Unreal Engine mal exploité refait surface, si bien que la plupart des décors semblent provenir d’un Fatal Inertia de Koei. Les textures sont ternes, les effets spéciaux quasiment inexistant, la modélisation de la faune comme la flore ne fait aucunement honneur aux capacités de la Xbox One – voire même Xbox 360. Les niveaux sont petits et reflètent à eux seuls l’incroyable manque d’ambition de cette production, que le rail qui oblige à faire des allers-retours tente vainement de cacher. Un lac de jour, le même au crépuscule, des grottes, une forêt, le joueur n’aura rarement l’occasion d’être surpris dans sa découverte des lieux vus et revus.
« À l’instar des chips au vinaigre, son petit prix et sa saveur d’antan sauront toucher les connaisseurs et faire fuir les autres »
Heureusement que les deux derniers chapitres qui sont d’une grande qualité viennent apporter un peu de dynamisme et d’originalité au tout. Le plus regrettable demeure que ce sur-découpage empêche au final de commencer à un point A pour finir à un point B totalement différent, comme cela était par exemple le cas dans un Panzer Dragoon Orta où il était possible de commencer dans une grotte humide pour terminer dans une vallée luxuriante. Avec un Kinect qui ne sert à rien – le comble lorsque l’on sait que ce Crimson était avant tout pensé pour l’accessoire – et une technique à la ramasse, le bébé de Futatsugi n’a rien de « next gen ». Malgré quelques bonnes idées comme le fait de pouvoir recruter des amis pour l’aventure solo ou partir en escarmouche avec deux autres amis via le Live, Crimson Dragon ne répond pas à nos plus folles attentes. À l’instar des chips au vinaigre, son petit prix et sa saveur d’antan sauront toucher les connaisseurs et faire fuir les autres.
+
- Musiques somptueuses
- Des sensations à l'ancienne
-
- Techniquement décevant
- Manque d'ambition à tous les niveaux
- Maniabilité indélicate