Test : Eternity: The Last Unicorn sur Xbox One
Goddamn Unicorn
Jusqu’ici, les choses se passaient plutôt bien dans le monde des elfes, des nains et des arbres qui parlent. Tout le monde vivait heureux et grâce à leurs pouvoirs magiques, les quatre licornes sacrées avaient fait aux elfes l’inestimable cadeau de la vie éternelle. Mais ! Depuis les ténèbres, le mal est de retour et frappe là où ça fait mal : trois des quatre licornes sont abattues et la dernière, bien mal en point, nécessite une grande aventure pour être sauvée. Heureusement, comme dans chaque conte du genre, il existe une élue. Une elfe dont la destinée est celle de sauver l’ultime licorne et tout un peuple par la même occasion. C’est au cœur d’un temple ancien, au centre d’un monde au bord du précipice de la dévastation que débute la quête d’Aurehen. Quelques minutes plus tard, elle rencontre Bior, guerrier viking en proie au désespoir après la perte du reste de ses compagnons de route, avec lesquels il venait tranquillement coloniser ces terres. C’est aux commandes de successivement l’un et l’autre que se déroule l’aventure d’Eternity : The Last Unicorn.
Le jeu des brésiliens de Void Studios est singulier à bien des égards. Présenté comme un RPG à tendance action, il est plutôt ce que l’on qualifierait de Dark Souls néo-rétro. Pourquoi néo-rétro ? Parce que dans Eternity : The Last Unicorn, les caméras sont fixes, comme c’était le cas dans Resident Evil premier du nom, Onimusha et autres Project Zero. Quant au côté Dark Souls, il dépasse la typographie après chaque boss vaincu, la façon dont est affichée la barre de santé de ceux-ci ou encore la présence de feux de camps pour sauvegarder ; le tout dans un monde où les zones sont interconnectées et où les raccourcis d’un à l’autre s’ouvrent progressivement. C’est bel et bien du côté de l’approche stratégique donnée au combat et à la prépondérance de l’esquive que s’opère le parallèle. Parce que comme dans le jeu de From Software, il y a matière tous les deux pas à se faire décrocher la mâchoire en deux coups d’épée.
Qu’on se le dise, Eternity : The Last Unicorn est un jeu très difficile. Même si le gain de niveaux vient renforcer les personnages, on demeure le plus souvent un sac de frappe potentiel pour les gobelins, araignées, magiciens morts-vivants et autres géants. C’est d’autant plus vrai lorsque l’on constate que l’on ne dispose d’aucune liberté sur la façon dont les statistiques du personnage augmentent : à chaque passage, attaque et défense prennent des points, et voilà. On regrette de ne pas pouvoir aller plus loin pour s’offrir un focus sur la défense ou la vitesse par exemple. Cette évolution linéaire et forcée est rageante car elle s’applique de la même façon pour deux personnages imposés mais dont les capacités ne sont pas franchement équilibrées. Vous pensiez que l’elfe serait plus rapide et le viking plus puissant ? Eh bien non. Bior cumule toutes les qualités et progresser avec lui s’avère bien plus facile qu’avec Aurehen qui semble toujours trois crans en-dessous des ennemis.
Grinder, grinder, toujours grinder : voilà le credo du viking et encore un peu plus celui de « l’elfette ». On ne peut donc pas s’appuyer sur la personnalisation de la progression, pas plus qu’il n’est possible de customiser son équipement. En avançant on découvre une arme alternative pour chaque personnage, mais l’une comme l’autre relève plus de l’accessoire à utiliser à l’instant T. On peut améliorer la puissance des lames, oui, mais pour obtenir suffisamment de cristaux, il est encore une fois nécessaire… De grinder. Quelques objets sont à la disposition du joueur, de la feuille de soin au bonus d’attaque ; certains peuvent par ailleurs être développé à l’aide des ingrédients ramassés à la pelle sur les corps des ennemis vaincus. Reste que la fabrication réussie dépend d’un niveau de probabilité dont le comment et le pourquoi restent très flous. En bref, aussi vrai qu’il apparaît old school avec ses caméras fixes, Eternity : The Last Unicorn la joue également très sobre sur son aspect RPG.
Mais là n’est pas vraiment le problème. Les vrais soucis relèvent du game design et de la finition. S’il faut à ce point se concentrer sur le renforcement du personnage, c’est avant tout parce qu’à aucun moment on ne sent en véritable capacité de faire face avec le « skill » accumulé. La courbe de progression est vite annihilée par des angles de caméra foireux pour une lisibilité de l’action aux antipodes de l’exigence que le jeu veut imposer. Surtout, la multiplication des bugs de collisions démonte toute possibilité de gérer les combats avec une véritable stratégie. Coups d’épée qui passent au travers, esquive qui voit le personnage bloqué dans le vide et incapable de porter un coup pendant quelques secondes, mais évidemment tout à fait disposé à se faire fouetter : les défaites bêtes et violentes s’enchainent. C’est pataud, ça manque d’impact, c’est bordélique dès qu’il y a plus de deux ennemi… Accrochez-vous bien.
Vient alors l’heure de la défaite, pour constater que le point de contrôle n’est pas toujours très bien placé. Alors on rage, parce qu’il va falloir reprendre un passage peut-être bien pénible, un passage que l’on a déjà peut-être arpenté plusieurs fois déjà. Parce que oui, Eternity : The Last Unicorn est le genre de jeu qui aime bien vous faire faire soixante allers-retours par objectif, en plaçant les ennemis au même endroit. Comble de la répétitivité, chaque passage avec un personnage se débute à partir du point où on l’avait laissé la fois précédente. A quelques variations près, on se retrouve alors à passer exactement aux mêmes endroits avec le combattant A que ceux découverts quelques instants auparavant avec le héros B. Avec tout cela dans un habillage qui semble, comme les caméras, venu de l’ère Playstation (ce qui représente plus un constat qu’une façon de critiquer), des musiques répétitives, des bruitages grossiers et l’absence totale de dialogues parlés (on a droit à des textes pompeux au possible), on constate très vite le raté que représente Eternity : The Last Unicorn. L’univers n’est pas inintéressant et dans notre cas, on était plutôt intéressés par le fait de retrouver un titre old school sur la forme. Mais pour le rendre valable, il aurait vraiment fallu soigner le fond.
+
- Concept intéressant sur le papier
- Textes en français
- On aime retrouver des caméras fixes…
-
- … Sauf quand elles sont à ce point bancales
- Terriblement difficile et frustrant
- Des bugs qui gênent la capacité à se défendre correctement
- Structuré de la plus répétitive des manières
- Deux personnages pour un grand déséquilibre
- Aspect RPG léger et dirigiste
- Univers sonore monotone
- Textes (vraiment) pompeux