Test : Headspun sur Xbox One
Mal de tête
Theo Kavinsky a eu chaud au derrière. Survivant d’un accident de la route particulièrement violent, le britannique se réveille après quelques cinq semaines passées dans le coma. Nous sommes à la fin du mois de janvier, Theo est cloué sur son lit d’hôpital mais ce n’est pas vraiment l’immobilisme qui lui pose souci. Plutôt son incapacité à se souvenir, notamment du jour de l’accident et des circonstances qui l’ont amené à prendre le volant. Sa tête est un véritable bazar. Ou plutôt le lieu d’une hécatombe. Vous pourrez vous en rendre compte directement puisqu’en marge des phases d’histoire en FMV (vidéos avec de véritables personnes avec lesquelles on est amené à interagir à coup de questions), Headspun s’appuie largement sur des mécaniques de jeu de type aventure narrative/point’n’click, dans des environnements en 2D. On incarne alors Ted, la représentation du « conscient » de Theo Kavinsky, qui en bon responsable des activités neuronales va s’efforcer de reconstruire la mémoire du héros pour comprendre ce qu’il s’est passé.
Mais la tache est ardue. Non seulement parce que tous les compartiments du cerveau sont endommagés et que presque plus personne n’est là pour s’en occuper. Eh oui, dans le cerveau vu par Headspun, chaque chose est gérée par un personnage à la forme humaine et le choc causé par l’accident a tué presque tout le personnel. Il va donc falloir y remédier. Mais l’autre casse-tête auquel s’oppose Ted, c’est Teddy, l’incarnation du « subconscient » de Theo Kavinsky. Tout oppose les deux personnages : l’un est centré sur l’aspect rationnel de la situation et n’a d’obsession que pour le rétablissement de Theo en vue de le ramener illico au travail. Apparemment, Kavinsky venait de décrocher un bon poste à Londres quelques temps avant l’accident. Teddy de son côté aimerait faire émerger à nouveau le Theo qui aime s’amuser, qui aime prendre la vie du bon côté et sait surtout mettre en valeur son talent de dessinateur. Qu’importent les obstacles et le péril de la précarité annoncée ; pour Teddy, Theo devrait vivre de sa passion. Point.
Cette opposition quelque peu -et volontairement on imagine- exagérée donne lieu à de nombreuses discussions entre les deux personnages et le reste des équipes qui composent ensemble le cerveau de Theo. Les dialogues (non doublés et rédigés intégralement en anglais) sont riches et plutôt bien écrits. Aimer lire fait partie du job dans Headspun. Mais il faudra aussi entretenir son rôle de manager avec pour objectif donc celui de remettre en route un maximum des capacités cérébrales de Theo Kavinsky. Pour faire simple, le cerveau prend la forme de bureaux d’une société quelconque, avec son personnel, son service RH, celui de la recherche et du développement, sa zone de repos ou encore sa cantine (ici, un bar). Mais comme nous sommes dans un cerveau, on retrouve aussi l’imaginaire, la salle des rêves sous forme de cinéma et bien évidemment la bibliothèque contenant toute la vie de Kavinsky. Bref, tout est cuit et il faut reconstruire, pas à pas, à mesure que le mystère de l’accident s’épaissit. Rendez-vous alors dans la salle de contrôle.
Ici, on dispose d’un temps limité que représentent les heures pendant lesquelles Theo est éveillé, pour mener à bien les actions qui contribueront à la remise en service de toutes les zones du cerveau. Sous son aspect rebutant à cause peut-être d’un certain manque d’explications, le système de gestion proposé par Headspun est finalement assez simple : il faut embaucher du personnel auprès du service RH et l’assigner ensuite à la reconstruction des lieux, pièce par pièce. Pour ce faire, il est nécessaire de disposer de NC pour « neuro-crédits ». Cette monnaie d’échange s’obtient pendant la journée en faisant faire à Theo plusieurs exercices, physiques ou mentaux, prenant la forme de QTE. Assez simples -voire simplistes- et très généreuses, ces actions nous permettent rapidement de remettre sur pieds le cerveau de Kavinsky et bout à bout, d’en découvrir les secrets. Le tout comme toujours ponctué de dialogue écrits entre Ted, Teddy et les autres « membres du staff ».
La progression est passablement lente, marquée surtout par une ambiance sonore horriblement monotone. Les couloirs du cerveau sont aussi animés que ceux d’un service gériatrie la nuit. On valide des objectifs, on appelle au boulot des employés qui se déplacent avec une lenteur déconcertante et la seule véritable récompense vient au moment de débloquer l’une des 15 fiches de souvenirs de Theo, synonyme de progression de l’intrigue. Mais le véritable ennui, c’est que Headspun est comme le cerveau de Kavinsky : endommagé. Truffé de bugs qui empêchent de valider une action (actuellement, on peut terminer le jeu mais il est impossible de compléter 100% des objectifs !), qui forcent à sortir de la pièce et d’y revenir pour débloquer une ligne de dialogue et une lisibilité du curseur aux fraises, Headspun déçoit. C’est plutôt joli, l’idée est originale, c’est accessible quand ça marche mais les bugs sont tellement nombreux que finir le jeu devient un chemin de croix. Cela est d’autant plus dommage que l’histoire n’est pas inintéressante, notamment dans ses derniers instants.
Et la partie FMV dans tout cela ? C’est, paradoxalement, l’autre gros raté de Headspun. En bons amateurs du genre et avides d’en découvrir toujours plus dès qu’il est question de FMV, nous avons rapidement déchanté. Le recours à la vidéo est ici réduit au minimum syndical et pas franchement aidé par le choix de faire apparaitre cette section dans un petit encadré, à l’intérieur du cerveau de Theo. On croise seulement trois acteurs qui font leur job de comédien de série Z (personnellement, je n’en attends pas plus, ça fait partie du charme du FMV), dans un environnement unique et sont finalement assez peu souvent sollicités. C’est dommage parce qu’en soignant cet aspect, Headspun aurait pu compenser, en partie au moins, ses grosses carences et son manque de finition sur l’aspect « jeu ».
+
- Concept hybride original
- Textes bien écrits
- Scénario pas inintéressant
-
- Des bugs à foison
- Impossible de viser les 100%
- FMV réduit à son minimum
- Progression facile mais lente et peu généreuse
- Ambiance sonore monotone
- Anglais intégral