Test : Le monde de Narnia - Chapitre 2 : Prince Caspian sur Xbox 360
Ripitchip, Nikabrik… Rat-plapla ?
Tout va mal chez les Telmarins, ces humains qui vivent encore dans le monde de Narnia. Le tyrannique roi Miraz martyrise sa myriade de sujets, et les créatures féériques qui peuplaient autrefois le royaume ont disparu. Tambour battant, le jeune Prince Caspian souffle dans une corne magique appelant quatre enfants vivant à notre époque à la rescousse. Son maléfique oncle Miraz veut en effet se débarrasser de lui pour permettre à son nouveau-né de fils de trôner sur Narnia à sa place. Balèze. Ce petit résumé est à prendre comme un bonus, puisque la première moitié du jeu fait revivre au joueur ces événements manette en main. En décidant de retracer tant bien que mal les points forts du film, les développeurs de chez Traveller’s Tales espèrent clairement toucher avant tout le noyau dur des fans de l’œuvre originelle. Dans ce même ordre d’idée, les scènes cinématiques en temps réel telles qu’on les connaît se font plutôt rares, puisque remplacées la plupart du temps par des extraits de l’œuvre cinématographique elle-même. Un procédé qui a un peu vieilli, il faut bien l’admettre, surtout lorsque les vidéos ne sentent pas forcément bon l’encodage parfait. Si le scénario du film se tient, la mise en scène de cette adaptation penche clairement vers le catastrophique, faute à des pirouettes et autres libertés hallucinantes prises par les développeurs (parfois rapidement expliquées par une cinématique, parfois pas du tout) pour forcer le joueur à ne se retrouver qu’avec un seul autre compère, au lieu de former une équipe de quatre aventuriers comme à chaque début de niveau. Voilà de quoi bien plomber le game design du titre, même si l’on n’en attendait, il faut l’avouer, pas grand-chose au demeurant.
Au premier abord donc, un trip pour fan avant tout, ce qui n’est finalement guère étonnant pour un jeu à licence. Tout au long de l’aventure, le joueur va devoir diriger à tour de rôle les différents héros du film qui sont dans son équipe. Une simple pression sur la touche Y à côté d’un de ses camarades permet de contrôler ce dernier et ainsi de disposer de ses différentes aptitudes. Le nain peut par exemple se faufiler dans des espèces de gros trous à rats, alors qu’un autre personnage aura la capacité de tirer à l’arc, ou de grimper après certains murs à l’aide de son grappin. Vu l’intelligence artificielle moribonde, inutile de préciser qu’il faille toujours se débrouiller tout seul, même si les divers acolytes dirigés par la machine encaissent formidablement bien les coups ennemis, les ralentissant ainsi de précieuses secondes. On se retrouve alors souvent à utiliser le plus costaud du groupe (ou le plus rapide) pour avancer, n’utilisant ses compères que pour ouvrir telle porte grâce à une de ses facultés. Heureusement que le mode coop, qui permet jusqu’à deux joueurs de prendre part à l’aventure, corrige en partie ce défaut. La vue légèrement aérienne (à la LEGO : Indiana Jones pour ne citer que lui) et les divers affrontements pourraient faire penser à une sorte de Diablo-like au tout venant, mais il n’en est strictement rien. Les affrontements, bien que nombreux, ne font pas gagner d’expérience, et il n’y a aucune possibilité de personnalisation de son personnage. Pour la profondeur, on repassera. Non, il s’agit bizarrement plus d’un jeu de recherche avec des énigmes faiblardes que d’un réel soft d’action/aventure classique.
En effet, l’histoire, découpée en six chapitres principaux, ne se risque jamais à surprendre le joueur et le plonge dans une sorte de léthargie abrutissante. Le jeu pourrait se résumer en la possession d’un membre de l’équipe pour rechercher un objet comme un levier permettant d’ouvrir une porte, actionner le mécanisme en martelant la touche A, puis avancer jusqu’à la salle suivante qui demandera à peu près la même dose de réflexion ahurissante pour s’en sortir. Bien sûr, il y a quelques variations, comme trouver un bout de bois puis du feu pour ne pas se faire taquiner par des créatures de l’ombre, faire défoncer des portes par des géants ou des ours chargeurs, ou encore poser des poids sur des dispositifs au sol pour maintenir une porte ouverte. Reste que dans son grand ensemble, les « énigmes » du titre ne varient pas vraiment, et se révèlent d’une incroyable répétitivité. Les scènes d’action quant à elles auront beaucoup de difficulté à sortir le joueur de sa torpeur, puisque trop brouillonnes et très itératives, malgré quelques bonnes mais minimes surprises dans le tout dernier niveau de l’aventure. Un bouton sert à attaquer (à l’épée et à l’arc, si le personnage en possède un), un autre à se protéger, et puis c’est tout. Un peu juste pour vraiment s’amuser sur les champs de bataille, malgré quelques bonnes idées ponctuelles comme la possibilité de monter sur le dos des géants pour les diriger et ainsi tout bousiller façon Rampage, ou de grimper sur des espèces d’aigles mythiques pour se déplacer plus rapidement d’une tour à l’autre dans certains niveaux. Avec de la bonne volonté, on pourrait se dire que finalement, ce soft est avant tout réservé aux accrocs de l’univers du film, accrocs ayant un âge ne dépassant pas la douzaine d’années bien sûr, ou accrocs ne connaissant pas grand-chose aux jeux vidéo, pour s’amuser un minimum.
Prince casse-pied
Seulement voilà, même avec toute la bonne volonté du monde, difficile de sortir ce Narnia du tas de composte maléfique dans lequel il s’embourbe. Si l’on peut excuser la grande simplicité des affrontements et des énigmes, surement pour toucher un public toujours plus large et jeune, impossible de passer à côté des lourdeurs inexcusables que le soft accuse. Déjà, pour un jeu à licence, comment pardonner le fait que les acteurs du film n’ont pas prêté leurs voix pour doubler les personnages du titre ? L’ambiance en prend un sacré coup, puisque l’on se retrouve avec des cut scene plus proches des sketches de Chaplin que de l’aventure épique tonitruante, avec des personnages muets qui ne communiquent qu’avec des gestes et des « hmpf » dignes des plus belles explosions de joie de Kenny. Graphiquement parlant, ce Narnia se contente du stricte minimum, aussi bien dans le level design que dans la modélisation et l’animation des personnages (même si l’on peut noter quelques boss sympathiquement bien recomposés). Les niveaux se suivent et se ressemblent, faute à une palette de textures désespérément pauvre et des univers trop communs (forêt, grottes et château fort, super), sans pour autant que le jeu puisse être qualifié de moche, certains tableaux étant plutôt agréables à regarder. La caméra désastreuse qui parfois n’arrive même plus à cadrer des parties du décor n’aide pas non plus à redresser la barre. Le seul point vraiment positif de la technique générale vient des musiques du soft, largement empruntées au film il est vrai.
Le monde de Narnia demande également au joueur de trouver des coffres, puis d’utiliser des clés collectionnées auparavant et cachées dans différentes parties des niveaux pour les ouvrir et ainsi débloquer des succès dans les menus du jeu, comme des vidéos making of sur la manière dont les monstres ont été animés (dans une ambiance très « jeu fait dans un garage » à pisser de rire). Enfin un peu de défi ? Pas vraiment malheureusement, puisque le fait de sortir d’une salle puis de rentrer de nouveau dedans fait apparaître à chaque fois les divers bonus pourtant ramassés au préalable ! En gros et pour schématiser, il suffit de trouver une clé dans une pièce, puis de sortir de cette dernière pour y rentrer de nouveau la seconde d’après, pour voir la même clé de nouveau là, pouvant être ajoutée à la collection des héros ! En répétant l’opération une centaine de fois s’il le faut, le joueur pourra ouvrir la totalité des coffres du jeu sans même se fouler un petit peu en essayant de dénicher les clés cachées. Aïe aïe aïe. Cette facilité incroyable se ressent à tous les niveaux, puisqu’une mort au combat replace le joueur au même endroit quelques instants plus tôt avec sa barre de vie dans son intégralité, sans qu’aucun autre malus ne vienne se faire sentir. On l’aura compris, Narnia est un jeu fleuve un poil trop bateau, ce qui pourra grandement décevoir les fans qui pensaient pouvoir revivre avec une certaine intensité la découverte et les combats présents dans l’œuvre cinématographique. Ils auront plutôt la chance d’assister à des escarmouches minables, et à trouver des leviers pour ouvrir des portes tout en tuant tous les gardes qui essayent de sonner l’alerte. La grande aventure, qu’ils disaient…
Comment ne pas ajouter également dans la liste des gros défauts le manque d’optimisation flagrant et impardonnable pour un jeu vendu à ce prix et sur une telle génération de console ? Chaque changement de pièce demande en effet un temps de chargement bien trop long pour ce qu’il est décent d’attendre sans broncher, surtout pour des salles minuscules qui ne demandent clairement pas beaucoup de ressources à la console. Le plus drôle, c’est que chaque action importante d’un personnage (comme actionner un mécanisme) coupe littéralement le jeu pour que la caméra s’attarde sur l’effet du dispositif (l’ouverture d’une porte généralement), avant qu’elle ne revienne finalement sur le héros incarné par le joueur, le tout avec un magnifique fondu au noir qui coupe même la musique ambiante. Difficile de demander au joueur de se sentir impliqué. Alors oui, peut-être que cette « astuce » permet aux plus jeunes joueurs de bien comprendre ce qu’a eu pour effet l’enclenchement d’un mécanisme, mais la solution proposée est clairement loin d’être la bonne tant elle rompt le rythme déjà bien mou du genou du titre. C’est d’ailleurs ce constat général que l’on peut étendre à tout le jeu en guise de conclusion. Le monde de Narnia, à force de tout faire pour être trop accessible, s’écroule, ne laissant dans ses ruines encore fumantes que des concepts dépassés et pourris, ainsi que le souvenir d’un jeu à licence de plus, qui plus est bien raté.
+
- L’ambiance sonore
- Le mode coop bienvenu
- Les vidéos bonus
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- Tout le reste