Test : Shin Megami Tensei V: Vengeance sur Xbox Series X|S
Démons et des bas
Si les franchises Shin Megami Tensei et Persona sont souvent associées, c’est avant tout car elle partage le même univers. Plus que ça même, le premier Persona est en réalité un spin-off de la franchise historique d’Atlus, qui a finalement vu ses suites devenir plus populaire que le matériau d’origine. Il faut dire que Shin Megami Tensei se traine une réputation de jeu austère destiné en priorité aux fans des JRPG, là où Persona se veut nettement plus accessible, avec un univers qui s’inscrit dans le quotidien d’une bande de lycéens. Pourtant, le début de ce Shin Megami Tensei V: Vengeance laisse tout d’abord penser que le développeur japonais va nous embarquer dans une aventure avenante en abordant des thèmes très actuels comme les nouvelles technologies et les réseaux sociaux, avant de rapidement retomber dans son atmosphère oppressante, à l’histoire alambiquée, pour un résultat qui divisera forcément les joueurs, sans épargner les amateurs de JRPG.
Alors que des rumeurs racontent que des monstres s’attaquent aux humains, un incident à la station Shinagawa embarque notre héros dans l’Outre-Monde, là où Tokyo est dévasté et recouvert d’une épaisse couche de sable. On y fait rapidement la rencontre d’Aogami, un proto-démon amnésique qui ne tarde pas à fusionner avec le personnage principal pour devenir un Nahobino et offrir ainsi suffisamment de puissance au joueur pour parcourir ce monde désolé en confrontant les démons qui s’y trouvent, dans des combats au tour par tour. On regrette tout de même assez vite que le jeu ait fait le choix de mettre le scénario de côté. Si Persona peut parfois être critiqué par ses dialogues intempestifs, à l’écriture toutefois irréprochable, Shin Megami Tensei V semble avant tout destiné à ceux qui ne prêtent pas beaucoup d’attention à l’histoire, et ne se poseront pas de question à être trimballé d’un lieu à l’autre sans plus d’explications.
Pour ceux qui ont fait le jeu original, il faut tout de même noter que cette version sous-titrée Vengeance propose une petite nouveauté en tout début de jeu puisque le joueur peut choisir entre deux options, ce qui aura quelques conséquences minimes en jeu. De nouveaux démons sont également disponibles, ainsi que de nouvelles zones à explorer, ce qui rallonge encore un peu la durée de vie qui approchait déjà la cinquantaine d’heures à l’origine. Les développeurs nous promettaient également des graphismes dignes de la nouvelle génération de consoles et il faut bien avouer que de ce côté-là Shin Megami Tensei V: Vengeance est une belle déception. Pas de résolution en 4K, un peu d’aliasing par endroit et des décors qui manquent franchement d’inspiration, à croire que les développeurs se gargarisent dans le côté très austère de la franchise. Heureusement le tout reste très fluide, ce qui constitue malgré tout une maigre consolation. On aurait bien aimé une petite révision au niveau du chara-design des personnages humains au passage, bien trop commun en l’état, et qui laisse pointer parfois un petit sentiment de désaffection.
Et ce n’est pas franchement mieux en termes de gameplay. Même si le scénario nous renvoie de temps en temps dans le Tokyo actuel, il faut bien avouer que l’exploration de l’Outre-Monde ne procure aucun plaisir, la faute à un level-design terriblement quelconque, et une carte qui voit se superposer de nombreux icones jusqu’à en devenir presque illisible. Pas de rencontres aléatoires ici, comme dans Persona les ennemis se déplacent librement sur la carte. On y retrouve d’ailleurs les mêmes démons que dans la série à succès d’Atlus, et un système de combat qui incluent à peu près le même type de postures offensives, avec les attaques physiques, les magies offensives, les magies de support et les soins. Compte tenu de la difficulté rencontrée durant les batailles, surtout en mode difficile, les magies de support et les soins deviennent rapidement indispensables, et il convient de bien choisir les membres de son groupe afin de ne pas enchainer les déroutes.
Car il suffit d’un petit rien pour que ce qui se présentait comme une victoire facile se transforme en défaite écrasante. Shin Megami Tensei V: Vengeance reprend le principe du «One More», ce qui signifie qu’il est possible d’attaquer une fois de plus à partir du moment où l’attaque réalisée se transforme en coup critique ou si on s’en prend à la faiblesse de l’ennemi. Un avantage qui se transforme en inconvénient quand vient le tour du groupe d’en face, capable également de profiter des mêmes atouts. Cela signifie qu’il faut généralement être bien préparé à l’avance, en adaptant le groupe aux forces et faiblesses ennemies, ce qui oblige aussi à farmer auprès des mêmes types de démons si on veut éviter de changer de configuration toutes les trois minutes. Comme dans Persona, il n’y a pas de système d’ATB (Active Time Battle), les membres du groupe attaque à la suite, avant que le groupe adverse ne fasse de même une fois que le joueur a épuisé tous ses coups. Globalement le système parait tout de même beaucoup plus lourd, et ce ne sont pas les combats de boss qui y changent quoi que ce soit. Parfois étonnamment simples et souvent longs et fastidieux, on note un vrai déséquilibre dans l’ensemble, ce qui n’est pas sans générer des moments de frustrations intenses.
Il faut donc lorgner régulièrement vers l’aspect stratégique du jeu, et notamment le recrutement des démons. Comme dans Persona là encore, il est ainsi possible de négocier avec les ennemis en plein combat afin de les ajouter au groupe. Cela donne parfois quelques dialogues assez marrants, avec des démons qui peuvent se montrer durs en affaire en vous réclamant divers objets, ou des Points de Vie avant d’accepter de vous rejoindre. En débloquant des portails telluriques, on peut également accéder au Monde des Ombres, un lieu qui rappelle la Chambre de Velours et qui permet de fusionner des démons pour en obtenir de nouvelles sortes, souvent plus puissants. Impossible en revanche de réaliser une fusion pour récupérer un démon avec un niveau plus élevé que notre héros, ce qui oblige là encore à farmer pour obtenir le résultat souhaité. Le système reste toutefois très intéressant pour qui veut prendre le temps d’améliorer son groupe et le préparer avant un combat de boss dont on connait les forces et faiblesses.
Des compagnons de route temporaires sont ajoutés puis retirés du groupe à mesure de la progression, sans jamais nous laisser le temps de les connaitre réellement et donc de les apprécier. A noter que chaque montée de niveau octroie des points de compétences assignés automatiquement dans diverses catégories habituelles pour le genre (force, vitalité, chance, …), et qu’un point doit être attribué manuellement pour façonner le héros à notre manière de jouer. Celui-ci peut d’ailleurs récupérer des attributs grâce à des essences de démons, ce qui permet de lui offrir une immunité à un type de magie par exemple, ce qui se révèle souvent salvateur face aux boss. On peut aussi évoquer la jauge de Magatsuhi, qui se remplit en combat et qui donne le droit d’utiliser un buff généralement intéressant comme la capacité de se protéger d’une magie sur la prochaine attaque ennemie, ou de réaliser des coups critiques sur un tour. Un concept intéressant mais qui ne parvient malheureusement pas à donner suffisamment de rythme à l’ensemble. C’est d’ailleurs la même chose avec les phases de lune, capables de modifier l’attitude des ennemis en combat, pour un principe finalement trop peu exploité pour en faire un point auquel on prête réellement attention en jeu. Dans la volonté des développeurs à proposer des choses un peu différentes, on trouve pas mal de quêtes annexes, mais aussi la chasse aux Mimans (50 par régions) qui force à fouiller chaque recoin de la map. De quoi relever un peu l’intérêt de l’ensemble, sans pour autant éviter la déception générale.
+
- Fusions de démons intéressantes
- Négociations sympathiques
- Très relevé en mode difficile
- Ambiance musicale agréable
- Traduit en français
-
- Scénario pas super bien amené
- Combats peu intéressants et déséquilibrés
- Level-design quelconque, map parfois illisible
- Chara-design pas fou
- Techniquement décevant