Test : Splinter Cell : Chaos Theory sur Xbox
Sam Combattant de la liberté
Le scénario de Chaos Theory commence par l’enlèvement d’un mathématicien par une milice sud-américaine. Rien de bien méchant de prime abord, mais il se trouve qu’il est l’une des deux seules personnes capables de comprendre les algorithmes de Philip Masse quelques années plus tôt (le cyber-geek du premier épisode qui a créé un über-virus capable de paralyser une grosse partie d’un pays en un temps record). A l’autre bout du monde, la tension monte entre le Japon et la Corée du Nord (appuyée par la Chine) et là, les moustaches de Lambert se mettent à friser. Sam est donc envoyé dard dard au Pérou pour enquêter. Ses nouvelles aventures vous mèneront également au Panama, aux Etats-Unis, en Corée du Nord ainsi qu’au Japon dans des niveaux plus hallucinants les uns que les autres, mais nous y reviendrons plus tard.
Désormais, avant chaque mission, vous aurez droit à un briefing plus étoffé qu’avant où Lambert, épaulé de spécialistes, viendra vous donner vos ordres. Vient ensuite le choix de l’équipement : bourrin, discret ou un mix des deux. Oui, maintenant vous avez la possibilité de choisir comment vous souhaitez jouer à Splinter ; d’une part, le manque de discrétion n’est plus aussi lourdement sanctionné qu’avant (même si la guerre ouverte n’est pas ce qui est le plus recommandé), mais tous les nouveaux mouvements de Sam ainsi que ses gadgets permettent d’aborder chaque situation d’une manière différente. De plus l’efficacité de Sam a été revue à la hausse. Si par le passé, certains joueurs ont pu être frustrés par la difficulté de réaliser certains actions qui semblaient pourtant simples (dispatcher un ennemi isolé pouvait par exemple se révéler fastidieux par moments), ça ne sera plus le cas ; de tel sorte que le challenge ne résidera plus vraiment dans l’exécution, mais dans la planification de la marche à suivre, et ça c’est vraiment intéressant. Au rayon des nouveautés, un fusils à pompe, la possibilité de faire sauter les serrures, d’enfoncer les portes, un système de visée moins aléatoire, une jauge de bruit en plus de celle de visibilité, pouvoir pirater les ordinateurs et certaines portes à distance, un brouilleur d’appareils électroniques, un coup de poing qui assomme vraiment, le craquage inversé en faisant le cochon pendu et surtout un couteau… (aussi pratique pour éliminer les gardes discrètement que pour ouvrir de nouveaux passages). Bref, la liste des ajouts est trop grande pour être évoquée en détail ici, ce qu’il faut retenir, c’est qu’il y en aura pour tout le monde !
Mais la liberté d’action accrue de Sam ne s’arrête pas là, on la retrouve aussi dans la résolution des objectifs. Si certains seront vitaux pour mener à bien votre mission, d’autres seront secondaires. Libre à vous de les mener à bien ou non, tout en sachant qu’ils pourraient bien devenir essentiels par la suite. A cela s’ajoute les objectifs dits d’opportunité, que l’on vous communique sur le terrain, et qui ont pour seul intérêt de vous inciter à fouiller chaque recoin des niveaux.
Bref, trucidez joyeusement (le meurtre est quasiment toujours autorisé), soyez une ombre ou un prédateur discret, faites de Sam ce que vous voulez, seule la note attribuée en fin de mission en sera affectée. Avec toutes ces nouvelles possibilités, on pourrait croire que la difficulté aurait été largement revue à la baisse, et dans un sens c’est un peu vrai, d’autant plus qu’il est possible de sauvegarder à n’importe quel moment. Une concession non cachée au grand public. Cependant il appartient désormais au joueur de se fixer ses propres challenges (croyez moi, au niveau de difficulté expert, finir un niveau sans toucher un seul ennemi n’est vraiment pas une partie de plaisir), de se faire sa propre idée de qui est Sam Fisher. De plus les choix moraux présentés au joueur ici et là auront surtout pour but de renforcer cette sensation, à défaut d’avoir un réel impact sur votre mission.
Rien que du lourd
Toutes ces innovations apportées au gameplay auraient cependant déséquilibré le jeu si d’autres aspects n’avaient pas été sérieusement renforcés. Et du côté de l’IA, on a assisté à un grand bond en avant par rapport aux précédents épisodes. Certes, tout n’est pas parfait, il y aura toujours quelques bugs, quelques rares situations absurdes, et l’on n’atteindra jamais le même niveau de stress que dans le mode versus lorsque l’on se demande si l’on a été repéré. Mais quand même, il est impressionnant de voir les gardes réagir différemment en fonction du niveau de menace qu’ils ressentent. Faites juste un peu de bruit, et il viendra inspecter à l’aide d’une flare ou d’une lampe torche. Si par contre il a eu l’impression de voir quelqu’un, il appellera des collègues en renfort pour l’aider dans ses recherches. Et lorsque vous êtes repéré, ils iront se mettre à couvert à des endroits stratégiques, en lançant parfois des assauts destinés à vous contourner. Sur le papier, vous me direz que c’est souvent ce que l’on dit à propos d’une bonne IA, mais je vous assure que sur le terrain, on ressent vraiment ces améliorations. A noter que si vous arrivez à retourner dans le noir, il sera désormais possible de leur échapper. Le système de niveau d’alerte fait son retour sauf que maintenant, 3 contacts visuels ne signifie plus « game over » (parce que sinon, on serait dans un jeu vidéo ???), désormais le niveau 4 correspond à la « base alert » où tous les gars sont alertés de votre présence et ils vous attendront de pied ferme bien campés sur leurs positions. Par contre si vous arrivez à être discret et à choper un ennemi par derrière, il aura souvent quelque chose à vous dire (marrant comment un couteau sous la gorge peu rendre plus bavard), que ce soit le code d’une porte, des détails sur votre environnement, ou même encore des renseignements essentiels sur l’accomplissement de votre mission. A noter aussi que le jeu ne triche plus quant à la découverte des corps : ils resteront portés disparus s’il n’était pas scripté qu’un autre garde passe dans le coin. A noter également des petits clins d’oeils : si un ennemi repère une caméra glue, ou s’il vous entend siffler, il vous fera savoir qu’il ne se fera pas duper aussi facilement, alors qu’en fait vous avez profité d’avoir capté son attention pour attaquer d’un angle différent.
Abordons maintenant le level design. Si cet aspect a toujours été l’un des points forts d’Ubi, force est de constater que l’on a atteint un autre niveau en terme de complexité et de liberté de mouvement. On nous avait promis du vrai multipath (pas comme dans Pandora, hein), et force est de constater que cette fois, c’est bel et bien une réalité. Certes, il y aura toujours des passages obligés et certaines portes seront toujours irrémédiablement fermées. Cependant, on a ici vraiment l’impression d’évoluer dans de véritables structures, avec la possibilité d’éviter des portions entières grâce à un chemin alternatif trouvé astucieusement. Mention particulière au niveau de la banque et du silo de missile, de véritables bijoux. D’autant plus que maintenant, il est possible de consulter la carte 3D du niveau à n’importe quel moment sur son PDA, ce qui est quand même pratique pour se repérer, surtout lorsque le point d’exfiltration n’est pas indiqué clairement. Sam a aussi la possibilité de ramper dans les gaines d’aérations, qui étaient jusque là la chasse gardée d’un certain Snake. A noter également une interactivité plus poussée avec le décor, que ce soit pour mieux passer inaperçu, ou justement pour trouver ces nouveaux chemins battus.
M’as tu vu ?
Techniquement, le nouveau moteur graphique fait des merveilles. Et si la série a toujours été connue pour ses qualités visuelles, il se pourrait bien que Chaos Theory soit le jeu le plus abouti de la Xbox. En effet, difficile de croire qu’une carte graphique dépassée avec la résolution d’une tv puisse rendre un tel résultat. Certes, certains préfèreront l’esthétisme d’un Oddworld, le brio d’un Dead or Alive ou encore le côté flashy d’un « Balo 2 ». Mais là, le travail accompli force le respect. Si Ubi a toujours maîtrisé les effets de lumières, les jeux d’ombres sont ici encore plus impressionnants que par le passé, plus aucune trace de pixel (bon, à moins de zoomer à fond avec ses jumelles). Les textures sont tout simplement bluffantes, d’un photoréalisme à couper le souffle. Les animations, autre point fort de la série, sont encore plus impressionnantes : que ce soit lorsque Sam se rapproche d’un ennemi en adoptant un style plus félin et en mettant la main sur son couteau, ou encore lorsqu’il s’arrête net en plein mouvement lorsque l’on lâche le stick (un cauchemar à coder selon le développeur concerné) ou bien aussi lorsque Sam se débarrasse d’un garde d’une façon qui variera en fonction du décor avoisinant. Et je ne parle même pas des effets de particules ou de tous les autres termes techniques en « -ing ». Et ce ne sont pas les quelques bugs mineurs qui feront leur apparition cà et là (une main qui va traverser un mur, la lumière d’une lampe torche qui sort de nulle part, un pied qui ne semble pas toucher une marche), d’autant plus que ceux-ci ont toujours été présents dans la série, mais qu’ici leur nombre a été considérablement réduit. En bref, visuellement, ce jeu te prend par derrière, te retourne et te déchire l’arrière train, le tout dans le noir, bien sûr…
Côté son, là aussi rien à dire, Ubi n’a pas lésiné sur les moyens. Le jeu d’acteur est haut de gamme, surtout en vo où il est un plaisir d’écouter Michael Ironside (Sam) et Denis Haysbert (Lambert, et accessoirement le président Palmer dans la série 24) se donner la réplique. D’autant plus que les dialogues sont toujours très bien écrits, intenses par moments, drôles et bourrés de clins d’œil à d’autres. Mais surtout, les NPC disposent d’un vocabulaire bien plus étoffé, ce qui évite d’entendre toujours la même chose. La musique, composée par Amon Tobin, ravira les fans du genre et contentera les autres, d’autant plus qu’elle sait parfaitement s’adapter à la situation.
A deux c’est mieux
Passons maintenant à la grande nouveauté de ce troisième épisode, à savoir le mode coopératif jouable en écran splitté (bof, bof), en Lan ou bien sur le Live. Les fans de la série réclamaient depuis longtemps quelque chose de ce genre et ils ne seront pas déçus. En effet, partager les aventures d’un espion tel que Sam avec un ami est particulièrement grisant. Reliées à la trame principale de Chaos Theory, les 4 missions coop (plus le niveau tutorial) vous proposent d’incarner deux espions débutant travaillant en équipe. Les mouvements à deux s’exécutent très facilement et sont particulièrement plaisants, d’autant plus qu’ils s’avèrent nécessaires à la réalisation des objectifs. Se faire la courte échelle, balancer l’autre par dessus un mur ou sur un adversaire, faire descendre l’autre en rappel, autant de choses qui nous ont fait saliver pendant des mois, et il faut dire que nous ne sommes pas déçus. Même si le framerate prend une sacrée dose, que l’IA ne semble pas assez performante par rapport au solo, que les bugs graphiques sont plus nombreux, que la durée de vie est plutôt courte, et que la reconnaissance vocale n’est pas vraiment au point. On dira qu’il s’agit d’un premier essai et qu’il reste globalement réussi. Cela laisse cependant présager de très bonnes choses pour la suite. D’autant plus que le level design est lui à la hauteur et que les multiples possibilités offertes permettent quand même de rejouer les 4 niveaux plusieurs fois sans trop se lasser.
La puiiisance du collant !
Pandora avait introduit un nouveau mode complètement inédit : deux espions à la maniabilité proche de celle de Sam, deux mercenaires en vue subjective ; un gameplay d’une complexité et d’une profondeur rarement égalées. Le revers de la médaille, une courbe d’apprentissage plus raide que la descente de Boris Yeltsin. Si cette fois quelques efforts ont été faits pour favoriser l’apprentissage des petits nouveaux, à savoir un tutorial obligatoire avant même d’arriver sur le Live, une petite visite guidée de chaque niveau, ou encore la possibilité de consulter la carte à tout moment ; il faudra quand même s’accrocher, surtout face à joueurs expérimentés qui ont le gameplay du versus de Pandora dans les pattes depuis plus d’un an. Certes certains changements on été implémentés. Les joueurs de SCPT se répartissaient en deux catégories : les bourrins courant partout en cherchant à étrangler les mercenaires tout en leur lâchant des tonnes de fumigènes, et les classieux, invisibles et silencieux grâce aux nombreux pièges sonores lâchés aux points stratégiques se débarrassant de leurs adversaires grâce aux caméras glues. Si la deuxième école était bien plus complexe à maîtriser, elle s’avérait bien plus efficace à long terme car elle ne jouait pas sur le lag. Il semblerait que les développeurs d’Annecy aient privilégié cette deuxième approche dans le mode story (un mix des différents modes de jeu de Pandora) en surboostant les mercenaires au corps à corps. Les espions seront désormais forcés d’être bien plus discret sous peine de se retrouver humiliés sous le poids d’un soldat surarmé. Pour ce faire, ils disposent d’un camouflage optique particulièrement efficace. Mais leur plus grand atout reste la taille des cartes revues à la hausse. Si les maps de Pandora étaient déjà très complexes, les 6 inédites de Chaos Theory atteignent un autre niveau. Plus grandes, plus ouvertes, plus complexes encore, elles surpassent n’importe quel niveau du mode solo en terme de design, et il faudra passer plus d’une centaine d’heures dessus avant d’en comprendre toutes les subtilités. Sur les 5 maps reprises de SCPT, seul le musée a connu certains remaniements, les autres étant quasiment identiques à un ou deux détails près (l’ajout de la caméra des mercenaires). Au passage, espérons que nous aurons droit par le biais d’un téléchargement au retour des autres cartes de Pandora, car à mon goût ils n’ont pas choisi les meilleures. Mais revenons à l’équipement, si les joueurs utilisaient quasiment toujours le même dans le précédent opus, ici le choix sera bien plus cornélien tant les possibilités tactiques offertes sont grandes. De plus la nécessité de jouer avec le(s) même(s) partenaire(s) ne s’est jamais faite autant ressentir. Heureusement, le versus de SCCT dispose de toutes les fonctionnalités du Live 3.0, dont la gestion des clans, ce qui facilitera à n’en pas douter la recherche de parties intéressantes. Il y a également deux autres modes de jeu : le deathmatch où les bourrins pourront s’en donner à cœur joie car les mercenaires se retrouvent privés de la plupart de leurs accessoires et de leurs mouvements au corps à corps, et le disk hunt, un mode qui semble encore un peu anecdotique face aux deux autres.
Il est cependant regrettable de constater que le lag est encore trop présent pour un jeu qui se joue à quatre, et qu’il y a encore trop de bugs (mines qui buggent, respawn impossible…), dont certains qui avaient été gommés de Pandora. Cependant on peut compter sur Ubi pour nous arranger tout ça, en espérant ne pas avoir à attendre 10 mois comme ce fut le cas pour SCPT.
S’il est encore trop tôt pour vraiment prendre pleinement la mesure de ce nouveau mode versus, il nous a laissé une très bonne première impression, tant au niveau des nouvelles maps que des ajouts au gameplay. Et nous ne manquerons pas de revenir dessus dans un dossier très complet que nous comptons rédiger, lorsque l’on aura eu suffisamment de temps pour vraiment retourner les cartes et les stratégies possibles dans tous les sens.
N’oubliez pas de jeter un oeil à l’interview exclusive de Mathieu Ferland, producteur du jeu, qui nous en dit plus sur le développement .
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- De la haute volée, vous allez en prendre plein les mirettes
- Malgré toutes les innovations, elle reste semblable à celle des précédents épisodes, prise en main instantanée.
- Un solo d’une quizaine d’heure possédant une rejouabilité certaine, un mode coop de cinq heures environ, et un mode multi inépuisable
- Jeu d’acteur super, bons dialogues, et une musique qui colle parfaitement à l’ambiance, que demande le peuple ?
- Du Tom Clancy, encore une fois rondement mené et sans surprises.
- A moins d’être vraiment allergique à Splinter Cell, il est impossible de ne pas se retrouver sur le cul. Indispensable, point barre.
- Vous aurez du mal à trouver mieux et seuls une poignée de jeux sont capables de faire aussi bien.
- Une très bonne interface, une durée de vie énorme, un intérêt immense, mais qui demandera un investissement à la hauteur de ces qualificatifs pour pouvoir en profiter pleinement.