Test : Prince of Persia 3 : Les Deux Royaumes sur Xbox
Nous foulâmes le sol que nous avions meurtri par nos larmes et par le sang
Il est mentionné dans Les Ennéades que l’âme produit ses actes l’un après l’autre, dans une succession toujours variée ; avec un nouvel acte, elle engendre ce qui suit. Bien outrageux fut pourtant le désir du prince de vouloir libérer les sables ancestraux qui contrôlent le cours des évènements. Bien courageuse fut son ascension au sein de l’île du Temps mais fatale fut sa décision de laisser vivre l’impératrice. Comme nous le conte Kaïleena « il ne voulait pas me sauver moi mais cherchait à se sauver lui-même » – toujours en quête de rédemption, notre héros ne calcula pas à nouveau les conséquences de ses choix et, en se débarrassant du Dahaka et en arrachant l’impératrice à un sort programmé, il allait annuler les évènements du premier volet et ramener à la vie son plus grand ennemi. Ainsi, la boucle se boucla conférant à cette trilogie une leçon moralisatrice et un retour à la source même du problème. Par le biais d’un scénario ingénieusement orchestré et manœuvré, les créateurs nous relatent une fable digne des considérations des grands penseurs, jouxtant entre ce que nous entreprenons et ce que le Destin nous réserve. Est t’on toujours rattrapé par son passé ? Le jeu nous apporte une réponse à la fois complexe et toute en finesse tandis que nous y sommes confrontés dès le départ avec, sous nos yeux, Babylone la belleà feu et à sang et cette amère sensation de mauvais présage. Peu de repos est, en réalité, octroyé à notre prince qui, de retour sur sa terre natale, se trouve face à un paysage de désolation là où les fiers marchands persans exposaient leurs richesses autrefois. Dès les prémices du jeu, sa douce compagne est rendue captive et nous nous lançons dans une aventure qui nous laissera littéralement à bout de souffle de par ses très nombreuses scènes alternant acrobaties vertigineuses et combats périlleux.
Tout blesse. Le souvenir est une plaie purulente
Tout l’art de la série réside dans le fait d’innover dans la continuité puisque sans jamais trahir l’essence même de ce succès. Au fil du temps, le joueur a vu un jeune prince naïf et plein d’entrain se transformer en un être cynique et sombre car écrasé par le poids de ses actes antérieurs mais cet ultime épisode nous ramène à un héros plus mature bien qu’encore trop impétueux. Face à une ville ravagée, il devra affronter une double libération : celle de son peuple et la sienne. La mort de Kaïleena libérant à nouveau les sables du Temps, notre héros va cette fois-ci en porter les stigmates en son propre for intérieur. Première nouveauté, le joueur est amené à endosser le rôle de deux princes ce qui engendre deux gameplays à la fois compensatoires et différents. Par bien des aspects, Prince of Persia 3 : Les deux royaumes se rapproche davantage du premier opus ; par exemple, à l’architecture et à l’ambiance gothique du second se sont substitués des décors plus orientaux et majoritairement en extérieur. La retranscription de la capitale de Babylonie, et dont Alexandre – autre grand conquérant – en fit son royaume, se montre désarmante avec son charme envoûtant et ses multiples dédales. La ville mythique ne fait d’ailleurs pas office que de décor, elle est au cœur même de l’intrigue telle une déesse dont le bras protecteur sera un refuge pour notre héros. Dans Babylone, c’est aussi bien par les bas fonds que par les toits que vous évoluerez d’où des vues en plongée et contre-plongée qui permettront d’apprécier pleinement les nombreux détails architecturaux, rehaussés par des angles de caméra toujours audacieux et parfois gênants pourtant pour entreprendre une pirouette.
Mon fils cherche toi un autre royaume car celui que je te laisse est trop petit pour toi
Ainsi s’exprima autrefois Philippe de Macédoine en s’adressant à son fils. Ainsi notre prince repart avec panache affronter cette nouvelle salve d’ennemis dont quatre majeurs donneront du fil à retordre. La palette de mouvements déjà largement fournie s’étoffe avec l’arrivée de gestes et d’acrobaties avec, pour particularité, que certains ne seront propres qu’au prince noir. Il est, par exemple, doté d’une arme sous forme de chaîne à pointes terriblement efficace lorsqu’elle tournoie pour éliminer plusieurs adversaires. Outre des coups tels l’Ouragan d’agonie, la Trombe de pénitence ou le Typhon des tourments, cette arme va permettre des prises et des tractions pour tirer vers vous des blocs de pierre afin de déclencher une ouverture de porte et de s’agripper à divers éléments du décor en l’utilisant comme sorte de corde. En prenant les deux personnages, c’est plus de 80 combinaisons offensives et défensives et mouvements qui viennent enrichir votre façon de jouer. Cette multitude d’actions ne sert, en revanche, pas à simplement alimenter le tableau des combos : dès le départ, vous aurez à faire preuve d’agilité et de souplesse pour venir à bout d’un combat. La difficulté, hautement accrue dans ce troisième volet, ne vous allouera pas de combattre à la dague (d’autres armes vous attendant par la suite) sans risquer de périlleuses acrobaties. Soyons clairs, les ennemis sont grands, forts et vous attaquent à plusieurs en même temps d’où la nécessité de s’extirper avec vivacité et de ne pas relâcher l’attention. Il en résulte d’ailleurs le gros et seul bémol du titre, à savoir une dureté de mise dès le commencement et qui ne saura être surpassée que par ceux qui aiment refaire quinze fois la même scène (un minimum parfois) vu que le joueur ne peut sauvegarder à tout moment. A ce sujet, le principe demeure le même puisqu’il s’agit de trouver des fontaines pour regagner de la vie et procéder à une sauvegarde sachant que certaines fontaines sont assez éloignées les unes des autres.Ne devient pas le roi des rois qui le voudra et le soft peut, malheureusement, rebuter certains joueurs qui manqueront de patience car même le niveau « facile » est vraiment élevé et frustrant.
Du temple d’Istar à la Tour de Babel : les beautés de l’Orient
Chaque épisode de la vie du prince fut une invitation au voyage et celui-ci n’échappe pas à la règle, avec en sus une orientation plus culturelle et plus proche des origines du héros. Le soft prend des allures d’introspection et dévoile un prince différent et plus intéressant que précédemment. La licence Prince of Persia est avant tout un label de qualité où chaque composant est étudié soigneusement, des graphismes superbement soignés et agrémentés à l’énorme panoplie de mouvements, en passant par une bande-son comprenant certes peu de dialogues mais à la musique toujours aussi magistrale. Des éléments du passé, on retrouvera les nombreux pièges à passer et l’énorme interaction avec l’environnement bien que le titre souffre d’une certaine linéarité qui ne gâche cependant pas le plaisir de jouer. A ces considérations s’ajoute la possibilité de désormais pouvoir contrôler un char qui nous fera vivre des courses fluides et fort périlleuses – une option qui a un charme fou ! – et de procéder à des attaques éclairs (principalement lorsque l’on est juchés au dessus d’un adversaire). Les animations lisses comme du savon (exceptés quelques ralentissements d’une seconde en cours de combats), les tons chatoyants, l’exotisme ambiant, les affrontements complexes, la diversité des ennemis et créatures soulignent un travail profondément étudié et joliment mis en avant par une histoire dont le livre se referme sous nos yeux en attendant de meilleurs hospices pour notre prince.
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- Des animations impressionnantes
- Une panoplie de mouvements largement remplie
- Des décors somptueux et détaillés
- Peut être le plus intéressant des trois
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- Un style très cinématographique
- Une difficulté bien trop élevée
- La nécessité de rejouer souvent pas mal de scènes