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Project Zero : Le Masque de l’Éclipse Lunaire

Survival Horror | Edité par Koeï-Tecmo

7/10
One : 09 March 2023 Series X/S : 09 March 2023
08.03.2023 à 14h01 par - Rédacteur

Test : Project Zero : Le Masque de l'Éclipse Lunaire sur Xbox One

Je dis oui, oui, Wii

Project Zero : Le Masque de l'Éclipse Lunaire -ou plus simplement Project Zero 4- demeurait jusqu’à ce jour l’ultime chainon manquant de la saga en occident. Sorti en 2008 en exclusivité sur Wii et au Japon uniquement, Project Zero 4 a longtemps cumulé les attributs d’un titre que l’on pensait ne jamais pouvoir expérimenter. Un crève-cœur heureusement évité pour les amoureux de cette saga d’épouvante, qui voient finalement leur patience récompensée : Project Zero 4 est désormais disponible sur les consoles Xbox.

Avant de devenir essentiellement le support favori des quadras en quête de forme physique et des amateurs de danse/karaoké, la Wii a été une honnête source d’inspiration pour les développeurs. Tous ou presque ont voulu embrasser cette technologie pour donner un nouveau visage à leurs jeux, un quelque chose de plus à des sagas qui existaient parfois déjà. C’est ainsi que Project Zero, série installée depuis trois épisodes comme une référence dans l’art de faire peur à la façon nippone, se tourne vers la Wii. Le développement est mené conjointement avec les studios Grasshopper Manufacture à qui l’on doit quelques titres singuliers tels que Killer 7, No More Heroes ou plus tard Lollipop Chainsaw. La Wii doit alors servir de support à une nouvelle façon de jouer à Project Zero, il en sera l’exclusif. Au-delà de ses commandes qui cherchent naturellement à s’adapter aux particularités de la Wii, Project Zero 4 symbolise l’évolution en mettant de côté les traditionnelles caméras fixes. Comme Resident Evil 4 en son temps, Project Zero passe l’objectif derrière l’épaule. Un changement risqué quand on a passé trois épisodes sur Playstation 2 (dont deux également sur Xbox) à faire sursauter les joueurs à grand renfort de caméras bien placées. Peu de joueurs en dehors du Japon ont toutefois eu l’opportunité d’en vérifier l’efficacité, le jeu étant alors cantonné à une sortie sur l’archipel. Sans traduction quelconque, bien évidemment.

Près de quinze années après cette sortie intimiste, nous voilà donc enfin en possession d’une version occidentale de Project Zero 4. Il faut croire que le portage du cinquième épisode, opéré en 2021 après de longues années d’exclusivité sur WiiU, a été suffisamment bien accueilli pour motiver Koei-Tecmo à nous proposer Project Zero 4. Disponible sur Xbox Series X|S et Xbox One, Project Zero : Le Masque de l’Eclipse Lunaire se dote au passage d’une traduction de ses textes en français, tout en conservant ses doublages en japonais. Voilà qui est bien commode pour comprendre de quoi il est question dans cette nouvelle plongée au cœur des ténèbres. Il faut dire que Project Zero 4 est sur le point de la narration dans le droit fil de ses pairs : peu de paroles, beaucoup de choses suggérées et des dizaines et des dizaines de notes, carnets et mémos qui relatent des événements comme on reconstitue un puzzle. Un puzzle fait de toutes petites pièces aux contours tortueux. Il faut ainsi se montrer patient et observateur pour recomposer la partition d’une tragédie qui s’est jouée des années plus tôt, sur la petite île de « Rogetsu ».

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Rogetsu est un environnement fictif, situé dans le sud du Japon. Un lieu empreint de mysticisme aujourd’hui désert et où se rendent, chacun de leur côté, les trois personnages que l’on est amené à incarner. Ruka, comme Misaki, y viennent pour essayer de comprendre. Pour faire la lumière sur un passé composé de bribes de souvenirs et qui semble les rattraper de la plus brutale des façons. Elles font partie des cinq enfants qui furent enlevées sur cette ile, dans des conditions et pour des motifs obscurs. Retrouvées sauves mais pas vraiment saines d’esprit, elles souffrent d’importantes pertes de mémoire et font état d’une fragilité psychologique extrême. D’où viennent ces images qui traversent fugacement leurs pensées ? Ces personnes, ces sons ? Le besoin de lever le voile se fait d’autant plus impérieux lorsqu’elles apprennent la mort de deux des filles enlevées en même temps qu’elles. Comprendre ce qui a eu cours sur l’ile de Rogetsu est aussi ce qui rythme la vie de Chôshiro Kirishima. Ex-policier devenu détective privé, il est celui qui a retrouvé les cinq filles enlevées, dix ans auparavant. Au fil de leurs recherches chacun des personnages renoue avec le fil des événements, avec celui de sa propre existence, dans un monde où la réalité est souvent plus sordide que l’illusion.

Pour les joueurs n’ayant peut-être jamais approché Project Zero, résumons ce qui fait la spécificité de la saga. Elle emprunte au folklore japonais, aux traditions et coutumes, aux croyances plus ou moins attestées ; la série s’inspire également beaucoup du cinéma d’épouvante nippon pour donner corps à un univers ou le vivant côtoie la mort, où les spectres font partie du décor. A vrai dire, ils sont même plus que cela. Les nombreuses apparitions fantomatiques sont autant d’éléments qui racontent l’histoire de Project Zero. Ils relatent des événements au même titre que les notes sur papier et les quelques enregistrements audio. Les apparitions qui errent sur l’ile de Rogetsu sont des phares dans les ténèbres, nous indiquant fugacement quoi faire et où aller pour progresser dans l’aventure. Leur apparition soudaine au détour d’un couloir ou dans l’interstice d’une porte constitue la mécanique principale de la peur dans Project Zero. Pas d’étalage de violence physique ici, l’aspect horrifique du jeu tient en sa capacité à installer un malaise constant. Si l’on pouvait craindre à l’époque que la fin des caméras fixes puisse dénaturer l’effet de surprise, il n’en est finalement rien. Project Zero 4 joue très bien avec nous, parvenant à nous maintenir sous pression en permanence. La bande-son joue d’ailleurs parfaitement son rôle. Ça craque, ça toque, ça souffle et bim ! Un fantôme apparait.

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La pression qui nous courbe les épaules tient également au fait que, parfois, ces braves fantômes en veulent à notre peau. On combat alors à l’aide de l’objet caractéristique de Project Zero : la « Camera Obscura ». Ce vieil appareil photo a le pouvoir de conjurer les esprits à grand coups de clichés bien cadrés. La caméra passe à la première personne lors de ces affrontements où le timing est essentiel en vue d’infliger un maximum de dégâts. Prendre en photo un spectre à l’instant T, soit au plus près lorsqu’il attaque, permet de réaliser un « cliché fatal » et autorise un enchaînement sans rechargement de l’appareil. La Camera Obscura s’améliore au fil du temps, alors que l’on ramasse des objectifs spéciaux (ralentissement des ennemis, attaque améliorée, enchainement des prises plus rapide par exemple) et que l’on améliore l’attaque, la vitesse de chargement de l’appareil et/ou des films à l’aide de cristaux. Ces cristaux peuvent être trouvés un peu partout lors de l’exploration. De leur côté les points récupérés en combattant ou en prenant les bons clichés des apparitions non-hostiles peuvent être échangés aux points de sauvegarde contre des objets de récupération ou des films plus puissants.

Ces phases de combat à l’appareil photo sont globalement plaisantes, en même temps qu’elles nous étouffent sous le poids d’une attention constante. Quelques indicateurs nous permettent de repérer autant que possible la provenance d’un fantôme prêt à attaquer et ils ne sont pas de trop. Project Zero 4 se déroulant dans des environnements confinés, on est contraint la plupart du temps de combattre sans grande visibilité. La rigidité du personnage ne facilite pas vraiment les choses et on peine parfois à lâcher l’appareil, courir à l’autre bout de la pièce pour mieux se placer en vue d’affronter les esprits. Le jeu n’est pas bien compliqué heureusement, mais attendez-vous toutefois à quelques combats où la difficulté tient plus de la rigidité (voir l’archaïsme) des commandes qu’à la puissance de l’adversaire. Les choses sont toutefois adoucies dans cet épisode par la présence d’un personnage utilisant un autre objet que la Camera Obscura. C’est la « Torche Spirituelle » qui fait son apparition et qui nous invite à combattre à la manière d’un Alan Wake. Visez avec la lampe, concentrez le faisceau et relâchez pour infliger des dégâts. Ca se passe à la première personne, comme pour la Camera Obscura, et bien que la rigidité soit aussi au rendez-vous le système est plus simple, le champ de vision un peu plus grand et donc plus agréable. On a plutôt apprécié ces passage façon Alan Wake, ils apportent un peu de fraicheur aux rencontres hostiles.

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A l’instar de Project Zero 5 auquel nous avions pu nous essayer sur les consoles Xbox dès 2021, Project Zero 4 est un jeu au rythme très posé, à l’ambiance lourde qui fait mouche instantanément. Il se démarque toutefois par des environnements quasi-exclusivement intérieurs, en nombre plus restreint. Cette concentration en fait un atout au regard de sa suite dont on avait pu regretter une certaine répétitivité. Il était certes plus long (quinze heures environ contre douze pour ce quatrième épisode), mais souffrait de baisse de régime. Oui Project Zero 4 est aussi un jeu où l’on avance précautionneusement, où la fonction « courir » a de quoi faire sourire tellement le personnage est lent. Mais il maitrise beaucoup mieux son rythme que Project Zero 5, en évitant de jouer ad nauseam sur les allers-retours. On visite bien sûr plusieurs fois les mêmes pièces du pavillon et de l’hôpital, pour finir par en reconnaitre chaque moulure. Mais la répétitivité est évitée et c’est avec de plaisir que l’on parcoure cette fresque étrange.

Le jeu étant porté depuis la Wii et ses manettes spécifiques, on ressent inévitablement une certaine raideur dans les commandes, notamment pour ce qui est de gérer la caméra. On apprend vite qu’il vaut mieux la laisser se gérer toute seule et la replacer instantanément dans le dos le cas échant, d’une simple pression sur une touche. Il faut bien quelques minutes pour s’habituer à la raideur des personnages et leur grande lenteur, s’y reprendre à deux fois pour examiner un objet. Mais globalement, le jeu se laisse jouer sans gros accrocs. Le constat se transpose également à la partie technique du jeu. Pour un titre de 2008, Project Zero 4 cuvée Xbox se révèle correct. En dépit de courbes parfois disgracieuses et de textures qui manquent de finesse, le rendu visuel sert convenablement le propos horrifique. On apprécie particulièrement comment la lumière de la lune traverses les fenêtres, ou l’effet inquiétant du passage en noir et blanc lorsque surviennent certaines apparitions. Aucun problème de framerate à signaler et du côté des temps de chargement, ils disparaissent dès lors que la partie est lancée.

7/10
En dépit de son âge vénérable, Project Zero : Le Masque de l'Éclipse Lunaire vaut son pesant de sueurs froides. Bien qu’il partage avec le cinquième épisode une évidente lenteur et une certaine rigidité, Project Zero 4 s’avère au moins aussi prenant et au passage, mieux rythmé. Au-delà de la satisfaction de pouvoir découvrir enfin ce petit morceau d’horreur que l’on pensait inaccessible, on prend plaisir à se faire peur selon les codes d’une saga qui maitrise son sujet à la perfection. Le portage est propre, l’ambiance magnifiquement frissonnante. Bref, c’est un excellent Project Zero, un très bon survival horror que l’on conseille aux joueurs qui aiment prendre leur temps. Après quinze ans d’attente, on imagine que c’est votre cas ?

+

  • Ambiance aussi sublime qu’écrasante
  • Rythme très posé mais plutôt bien maitrisé
  • Système de combat traditionnel efficace…
  • … Et bien enrichi par la Torche Spirituelle
  • Portage propre pour un jeu plaisant à regarder
  • Bande-son parfaitement orchestrée
  • Durée de vie convenable
  • Textes en français
  • On ne se lasse pas de la « touche » Project Zero

-

    • Commandes rigides
    • Déplacements vraiment très lents
    • On peine parfois à se mouvoir convenablement lors des combats
    • Mode de narration éclaté qui peut déconcerter