Interview SC Chaos Theory
Mathieu Ferland, merci beaucoup d’avoir accepté cette interview.
Le mode solo
XM – Outre les graphismes qui sont tout bonnement hallucinants,
ce qui frappe le plus dans ces nouvelles aventures de Sam Fischer, c’est la
liberté d’action dont le joueur bénéficie. Quels ont été les motivations et les
challenges de ce changement de direction ?
Mathieu Ferland – Les premières motivations étaient de
d’abord corriger les différents problèmes connus de SC1 et SCPT, notamment le
principe d’essais/erreurs et les gameover souvent un peu frustrants. Pour y
parvenir, il ne suffisait pas de seulement changer nos règles pour les alarmes.
Nous avons plutôt opté pour un système beaucoup plus ouvert, où le joueur a
davantage de flexibilité. Pour couronner le tout, nous avons ajouté la
possibilité de sauvegarder en tout temps. La tension est déjà très forte dans le
jeu, et cette option change radicalement les décisions prises par le joueur. En
effet, plutôt que de rechercher le prochain Checkpoint sans prendre de risque,
le joueur se permet d’oser davantage et par le fait même, découvre le jeu dans
toute sa splendeur.
XM – L’un des gros reproches formulés à l’encontre des deux
premiers chapitres était la linéarité des niveaux. On a senti qu’un effort avait
été fait dans le phare (le premier niveau). Pouvez vous nous dire quelques mots
sur le level design et si l’on peut s’attendre à plus de chemins différents tout
au long du jeu ?
MF – Le phare est la première mission et nous avons
voulu limiter les possibilités. Dès la 2e mission (Cargo), l’environnement est
beaucoup plus ouvert (c’est un bateau après tout !). Certaines missions le sont
davantage, mais nous avons constaté qu’il ne faut pas aller trop loin, car à
chaque fois qu’on ouvre des options, il faut fournir les outils de navigations
nécessaires, les dialogues pertinents etc… Il faut s’y retrouver après tout…
C’est une structure qui nous a obligé à relever de nombreux défis créatifs. Mais
au final, on est très content, car le jeu permet d’être rejoué et rejoué tout en
apportant un niveau de challenge pertinent.Je pense que nous avons mis le
doigt sur un équilibre intéressant en matière de non-linéarité, tant pour les
environnements que pour l’accomplissement des objectifs.
XM- Prince of Persia 2 (développé lui aussi par Ubi) a
également connu de nombreux changements destinés à l’étoffer et à l’ouvrir à un
plus large public ; le pari fut gagnant. Pensez-vous avoir réussi la même chose
avec SCCT ?
MF- Je pense que oui. Sur SC1 et SCPT, nous nous
sommes entêtés à forcer le joueur à jouer d’une manière la plus furtive
possible. L’IA et les mouvements de Sam n’étaient pas pleinement adaptés pour
les scènes de combats. Étant donné que les jeux de type « stealth » restent un
marché assez ciblé, nous avons tenté d’élargir notre marché en permettant cette
fois aux joueurs qui aiment tirer partout de pouvoir le faire. L’IA est solide
et va pousser les joueurs à se dépasser. Toutefois, nous avons su inciter les
joueurs à demeurer furtifs et les récompenser en conséquence. Ainsi, les joueurs
qui ne font que tirer partout vont manquer une bonne partie du scénario et une
bonne série d’objectifs, en plus d’avoir un pourcentage de réussite plus faible,
voire nul à la fin de chaque mission. Donc tout le monde y trouve son compte,
mais d’une façon différente. Au final, les vrais gagnants sont ceux qui
arriveront à terminer le jeu en jouant des 2 façons.
XM – Dans SCCT, l’infiltration n’est plus forcée comme elle
l’était précédemment, grâce notamment aux nouveaux mouvement et à l’arsenal de
Sam, qu’avez vous fait pour « inciter » le joueur à rester un minimum discret
?
MF – Le scénario constitue une très bonne récompense à
jouer l’infiltration discrète. Les dialogues sont drôles, et les créations de
nouvelles opportunités sont nombreuses. Il n’est pas rare de découvrir des
objectifs en bonus ou des informations qui permettront de prendre de l’avance
sur la prochaine mission. Au fur et mesure qu’on avance et surtout, lorsqu’on
rejoue, on réalise aussi que certaines scènes grandioses impliquant des ennemis
ne peuvent pas se passer si le joueur a pris soin de tirer sur tout le
monde.
XM – Dans Pandora Tomorrow, il y avait à quelques reprises des
choix moraux que le joueur devait prendre (ex. tuer l’agent du Mossad ou non).
Peut-on s’attendre à en retrouver plus dans Chaos Theory, et quelle incidence
auront-ils sur le déroulement des missions ?
MF – Tout à fait. On essaie de laisser certains choix
au joueur via notre personnage principal. Je vous laisse le soin de découvrir
par vous-même les incidences qui en découleront.
Les
modesmultijoueurs
XM – La grande nouveauté de SCCT, c’est bien sûr le mode
coopération, jouable en écran splitté sur une console ou via le Xbox Live. Comme
il s’agira de niveaux complètement à part (bien que relié à la trame générale du
jeu), pouvez vous nous dire si vous avez abordé leur conception de manière
différente de la campagne solo, et si oui, nous expliquer les challenges
rencontrés, notamment en terme de level design et l’IA ?
MF – Oui, le design a été fait d’une manière différente
que le solo, car il nous fallait d’abord bien maîtriser le solo avant de
s’attaquer au coop. Le coop est en réalité une série d’ingrédients que nous
avons ajoutés au solo, de manière à stimuler les opportunités coopératives et à
inciter la communication. Il nous a fallu aussi modifier l’IA pour la rendre
plus intéressante à 2, et surtout plus challengeante. Ensuite, nous avons pu
débuter les missions coop. L’approche est très différente, car il faut penser à
2, développer pour 2 et être créatifs pour 2 !
XM – Après avoir testé la version beta sur PC, il semblerait
que l’accent ait été mis encore plus sur l’infiltration dans le nouveau mode
story, grâce à un level design compliquant la tâche des mercenaires ainsi que de
nouveaux gadgets et mouvements. Les fans d’action pure et dure, par contre,
pourront se régaler en mode deathmatch. Pouvez-vous confirmer cela ?
MF – C’est tout à fait juste. Les nouvelles
possibilités offertes aux mercenaires sont très intéressantes. Que ce soit le
nouveau mouvement pour insulter l’ennemi ou encore la possibilité de détruire
l’environnement… que de bons trucs.
XM – Le mode versus possédait l’un des gameplay les plus
profond (en plus d’être novateur) assurant des parties différentes à chaque fois
ainsi qu’une durée de vie très longue. La contrepartie était une courbe
d’apprentissage extrêmement rude qui en a découragé plus d’un. Qu’est-ce qui a
été fait pour remédier à cela ?
MF- Il existe désormais de très bon tutoriaux
permettant aux joueurs de comprendre plus rapidement les mécaniques de jeu ou
encore de découvrir les zones les plus stratégiques sur chacune des missions. On
force aussi les joueurs qui ont peu d’expérience à joueur ensemble afin de
maintenir leur engagement, et aussi pour éviter des déséquilibres frustrants
lors des parties.
XM – Le fonctionnement du mode versus rend presque obligatoire
le fait de jouer régulièrement avec les mêmes partenaires. Qu’en est-il dans
SCCT ?
MF- On espère que les tutoriaux vont contribuer à
accélérer le niveau d’expérience, et ainsi offrir plus de
flexibilité.
Regrets, téléchargements, hors
sujet
XM – SCCT est maintenant terminé, pouvez-vous nous dire quels
éléments ont été abandonnés en cours de route (il y en a forcément) ? Lequel
regrettez vous le plus ?
MF – En fait, comparé à SC1, on a laissé très peu
d’éléments en cours de route, ce qui fait de SCCT un accomplissement très
important pour l’équipe, procurant une très grande satisfaction. On est allé au
bout de nos ambitions et on a rarement eu cette occasion. Les éléments qui ont
été mis de côté l’ont surtout été dans un souci de cohérence des systèmes de jeu
ou parce que ça devenait des éléments trop puissants. Par exemple, Sam aurait pu
avoir un « land warrior » lui permettant de tirer sur ses ennemis sans lui-même
s’exposer au danger, grâce à une caméra optique…Il devenait trop
difficile de balancer l’IA avec des outils aussi puissants et on a laissé tomber
l’idée.
XM – Des extensions sont sorties pour les autres licences Tom
Clancy (Rainbow Six et Ghost Recon), à petit prix, avec une courte campagne solo
et un contenu multijoueur conséquent. A quoi peut-on s’attendre pour la série
des Splinter Cell ?
MF- Pour le moment, nous nous concentrons sur des
titres complets. SC est aussi un synonyme d’innovation, et chaque titre se doit
d’être à la hauteur en ce domaine.
XM – Pour finir, LA question aussi importante qu’absurde et
dénuée de sens : dans une bagarre qui l’emporterait : La bestiole dans l’armure
verte ou le vieux grisonnant en collants ?
MF- Sam gagnerait car ses habitudes alimentaires sont largement plus
équilibrées.
Merci Mathieu Ferland d’avoir répondu à nos questions et
bonne chance avec la sortie de Tom Clancy’s Splinter Cell Chaos Theory, et
…bonnes vacances !
Interview réalisée le 25 mars