Test : Devil May Cry 5 sur Xbox One
Player May Smile
C’est un peu foutrac à Red Grave City. Dante et les autres ont eu beau les faire pleurer depuis plus de quinze ans, les démons sont coriaces et la ville est un véritable cirque des horreurs. Au beau milieu de la cité, le Qliphoth et ses racines démoniaques passablement envahissantes ; à son sommet, Urizen, un démon surpuissant. C’est face à lui que l’on retrouve Dante et Nero au début du jeu et c’est autour de l’avant et de l’après cet événement voyant les chasseurs se prendre un sérieuse branlée que se développe l’histoire de Devil May Cry 5. Sachez que si vous n’êtes pas ou peu familiarisé avec la saga, une vidéo disponible dans les menus reprend l’essentiel des événements passés. Dante et Nero ont la classe, Trish et Lady assurent le quota sexy (mais guère plus). Si l’on devait mixer tout ça dans un seul personnage, eh bien cela donnerait Nico, jeune femme excentrique, pas tout à fait discrète, surtout lorsque l’on fait appel à elle pour dépenser nos démonites rouges (« l’argent » de Devil May Cry) dans de nouvelles compétences, des améliorations d’armes, de santé ou des orbes de résurrection. Bref, la base.
Mais c’est surtout l’étrange V qui constitue l’ajout le plus important de ce nouvel épisode puisqu’il est le troisième personnage jouable de Devil May Cry 5. Le long de vingt niveaux pour une douzaine d’heures de jeu, on alterne entre les chasseurs de démons (on peut parfois choisir entre un ou l’autre) et si on navigue en terrain plus ou moins connu avec Dante et Nero -mais les nouveautés sont nombreuses, nous allons y revenir-, la prise en mains de V créé une véritable rupture avec nos habitudes beat’em allesques. Le garçon n’est pas intrinsèquement puissant, il est même plutôt faiblard. Avec sa canne, il n’a guère d’autre option que celle d’achever un ennemi. Et pour arriver à prononcer l’extrême onction, il doit s’en remettre aux services des trois démons qui l’accompagnent. Shadow attaque au corps à corps tandis que le bavard Griffon assure la partie à distance, permettant à l’occasion à V de s’éloigner rapidement du danger. Et puis lorsque la jauge dédiée est pleine, le géant Nightmare vient pour un petit moment semer le chaos dans les troupes ennemies. Améliorables simplement comme on le fait avec une arme, les trois démons assurent la baston selon nos ordres, tant que l’on veille sur leur état de santé. Si l’on est trop peu attentif, ils seront inutilisables pendant plusieurs secondes et V deviendra alors encore plus vulnérable qu’il ne l’est déjà à la base.
Cette approche du combat assez déroutante au départ se révèle rapidement plaisante quand les trois forces s’associent sous notre commandement et font pleuvoir les coups. C’est tout de suite très différent de ce que l’on a alors expérimenté avec Nero qui reprend les bases instaurées dans Devil May Cry 4. Lame d’un côté, bras mécanique de l’autre, le jeune fougueux a désormais le choix de l’approche en fonction du type de bras qu’il utilise. Electrifier un ennemi, lui envoyer un patate surpuissante, l’attirer d’un coup vers soi ou l’exploser avec une réplique de l’arme de Mega Man : les possibilités sont nombreuses et varient en fonction de l’équipement que l’on débloque auprès de Nico et que l’on équipe au départ, tout comme au travers de celui que l’on récupère un peu partout dans les niveaux. Ca castagne, c’est dynamique et accessible (avec la possibilité comme toujours d’activer pour tous les personnages les combos automatiques) mais ça n’en demeure pas moins différent de ce que propose Dante. L’éternelle figure du beat’em all des années 2000 retrouve ses quatre styles, changeables à la volée, pour axer le combat sur l’épée, le tir, la défense ou l’esquive. Autour de ce quatuor, Dante obtient progressivement de nouvelles armes (épée plus puissante, lance-roquettes, poings surpuissants nommés « Balrog », chapeau aux effets étonnants sur les démonites, etc) et lorsque l’on approche de la fin du jeu, on dispose alors d’un arsenal d’une rare richesse pour le genre.
C’est là la principale force de Devil May Cry 5 : parvenir à proposer trois approches différentes pour un rythme général qui jamais ne faiblit. Du petit D au superbe SSS, les combos s’enchainent magnifiquement bien, à mesure que l’on appréhende peu à peu les particularités -nombreuses- du gameplay. On se répète, mais rares sont les beat’em all capables d’une telle profondeur alliée à un plaisir, un sentiment de puissance inébranlable. Tout cela est mis en valeur par une gestion de la progression d’une régularité quasi parfaite. Durée des niveaux juste comme il faut, ajout de nouvelles possibilités très régulier, bestiaire distillé avec précision pour déboucher sur des boss qui font le job : Capcom maitrise son sujet et tient le joueur en haleine du début à la fin du jeu. Les derniers niveaux sont d’ailleurs très marqués par une augmentation significative du rythme, où tout s’enchaine à vitesse grand V (uh uh) pour se conclure sur un affrontement peut-être timide visuellement mais à l’exécution dantesque (uh uh bis). Pas d’énigmes ou d’allers-retours à la recherche de clés ABCD, de très (très) petits passages de plateformes : l’accent est mis sur le combat et la narration, par ailleurs très bien soutenue par des cut-scenes de toute beauté.
Beau, Devil May Cry 5 l’est assurément. Fluide aussi. Testé ici sur Xbox One X et écran 1080p, le jeu de Capcom n’a connu qu’un seul et unique ralentissement en quinze heures de test. Un seul. Graphiquement, le RE Engine démontre une nouvelle fois ses vertus avec un titre d’une netteté implacable et animé à la perfection. Mais il y a tout de même deux ombres au tableau. La première concerne l’aspect visuel du jeu : très beau donc, artistiquement cohérent mais au final pas suffisamment inspiré pour que les environnements engendrent de l’émoi chez le joueur. Si les débuts dans la ville sont convaincants, à défaut d’être mémorables, les choses s’enlisent dans la seconde moitié du jeu, largement dominée par des environnements extrêmement redondants, sans éclat. Au sortir de l’expérience, on se souvient parfaitement en avoir apprécié chaque seconde pour le fond mais on ne saurait vraiment vous dire quel a été le lieu le plus marquant sur la forme. D’une certaine manière, Devil May Cry nous refait le coup de la redondance du quatrième épisode. L’autre écueil est à aller chercher du côté du placement de la caméra, pas toujours optimal, surtout lorsque l’on locke un ennemi particulièrement mobile.
Malgré tout, on retient essentiellement le plaisir procuré par un beat’em all à la fois accessible et profond. Si les nombreux ennemis, variés et bien inspirés, ne font aucun cadeau et la barre de vie descend rapidement, même en normal, le système de continus est intéressant et autorise tout un chacun à profiter de l’aventure. Ainsi, en cas de défaite, on peut soit utiliser une démonite de résurrection, soit passer par le paiement de démonites rouges, dont le montant augmente à chaque fois que l’on y a recours dans un niveau. Un bon compromis, en somme. Avec ses trois personnages différents, ses missions secrètes et très nombreuses habiletés à débloquer, Devil May Cry 5 est un jeu qu’il est de bon ton de boucler plus d’une fois. On y trouve même une fonctionnalité en ligne, dont on regrette sa relative timidité : excluez tout de suite l’idée d’inviter des amis pour parcourir le jeu mais vous aurez l’occasion, si vous le souhaitez, de parcourir certaines portions de certains niveaux en même temps qu’un autre joueur qui, quelque part dans le monde, en est rendu au même point que vous. C’est peu, mais c’est toujours cela de pris. On terminera ce test par une bonne note et c’est du côté sonore que l’on va la trouver. Si vous êtes allergique aux doublages japonais, vous serez heureux de savoir que ceux en anglais sont tout bonnement excellents (et sous-titrés en français bien sûr). Mais dans tous les cas, votre aventure sera portée par des musiques dont l’intensité varie selon la situation rencontrée et dans notre cas, on doit dire que l’on a apprécié le mix entre riffs saturés et beats de techno sous acides. En un mot : Jackpot !
+
- Gameplay d’une grande richesse…
- … Et multiplié par trois personnages
- V, l’ajout qu’il fallait
- Rythmé du début à la fin
- Adapté à tous les profils de joueurs
- Bande-son au point et dans l’esprit de la saga
- Drôle, décalé, complètement WTF
- Techniquement irréprochable…
-
- … Mais radin pour la variété des lieux
- Caméra pas toujours au point
- Multijoueur très timide