Test : The Grand Tour Game sur Xbox One
Clarkson, on lui répond.
Le temps comme les scandales ne semblent avoir aucune emprise sur Jeremy Clarkson. La voix de Forza Motorsport 4 cartonne toujours en 2019 avec l’émission The Grand Tour, en compagnie de « l’escargot » James May et du « hamster », Richard Hammond. A l’occasion du lancement de la troisième saison de leur show, le trio d’animateurs/pilotes/comiques nous arrive sur Xbox One avec The Grand Tour Game. Mais alors que notre esprit eut de prime abord un réflexe de rejet envers cette sortie, se disant qu’au fond tout cela fleurait bon le jeu à licence sans grand intérêt, une analyse un peu plus approfondie de la proposition faite par The Grand Tour Game a joué son rôle d’ESP et nous a remis sur le droit chemin de la curiosité qui depuis toujours, nous caractérise. Développé par Amazon Games, le titre du jour se pose comme un jeu de voitures « épisodique » où l’on a l’occasion de revivre les émissions de The Grand Tour et d’y participer, manette en mains. Voilà qui semble alors plutôt intéressant.
Chaque semaine, à l’occasion de la diffusion de The Grand Tour, un nouvel épisode du show est ainsi ajouté à son pendant vidéoludique que nous avons eu l’occasion de tester. A l’heure où sont écrites ces lignes, la saison 3 vient de débuter et le jeu propose, en plus de ce premier épisode de la cuvée 2019, du contenu relatif aux deux précédentes saisons. Mais alors Jeremy, comme est-ce que cela fonctionne ? Prenons par exemple l’épisode de lancement de la saison 3 dans les rues de Détroit, où la fine équipe fait s’affronter trois muscle cars autour de diverses épreuves. Le jeu alterne des (longs) extraits de l’émission avec des phases de jeu et contre toute attente, The Grand Tour Game n’est non seulement pas avare en vidéos mais il exécute de façon très naturelle la transition entre présentation et course. C’est propre, c’est cohérent, ça fonctionne. Conceptuellement, The Grand Tour Game est brillant.
Franchement, autant y aller franco, les deux pieds sur le champignon : le format adopté est bluffant d’efficacité, aidé évidemment par la grande qualité du programme télévisuel dont il est l’adaptation. Pour autant, et c’est là le paradoxe qui précède généralement le retour à une triste réalité, on imagine que ce type de construction s’adresse avant tout aux fans, en même temps qu’il doit être bien redondant de revoir précisément -certes de manière condensée- ce que l’on a visionné devant son écran via Amazon Prime il y a peut-être quelques heures. Du coup, pour moi qui n’avais pas vu l’émission, la découverte du thème a été un vrai plaisir ; mais si cela avait du être consécutif au visionnage de The Grand Tour le même jour, il est plus que probable que la touche avance rapide aurait filé comme une Mc Laren. Aussi est-il conseillé de laisser passer un peu de temps entre le visionnage pour les abonnés et la prise en mains de la manette.
Oui c’est un peu idiot quelque part et l’ennui c’est que l’on ne peut pas véritablement se reposer sur le contenu relatif aux deux premières saisons pour combler l’éventuelle attente. Alors qu’il est acquis que la partie Saison 3 va s’enrichir chaque semaine pendant les trois mois à venir, les Saisons 1 et 2 ne comptent qu’un épisode chacune. Il y aura-t-il des ajouts de ce côté-ci ? On l’espère, parce qu’il y a clairement des choses à exploiter tant les facéties du trio ont été déployées de manière débridée depuis 2016. C’est d’ailleurs ce que l’on regrette (pour le moment) avec The Grand Tour Game : les épreuves se bornent pour l’instant à nous mettre aux commandes de véhicules « traditionnels », sur des routes bien goudronnées. On retrouve certes de belles choses parmi les quinze voitures disponibles au lancement, entre «Sainte Trinité», BMW M2, hybrides et une fusée 100% électrique, made in Croatie, dont se souviendra longtemps Richard Hammond. Mais où sont les virées en pleine nature ? Où se cachent ces splendides horreurs bidouillées au coin du feu, quelque part entre le désert du Mozambique et la jungle colombienne ?
On aurait pu se contenter des virées sur le circuit d’Algarve, dans les rues de Détroit, sur une petite portion de route en Suisse ou en Californie. Oui, « petite », parce que pour la plupart, les courses sont très courtes. On excède rarement les deux minutes mais à sa décharge, The Grand Tour Game s’emploie à varier au maximum les objectifs avec des courses, du contre-la-montre, du drift, du dragster voire même des affrontements qui prennent des airs de Mario Kart en autorisant quelques « power up » et « armes » d’un genre nouveau. Un coup de turbo, un lâcher de fumée rose baptisée barbe à papa, voire carrément l’envoi d’un SMS qui vient masquer l’écran de l’adversaire : on ne lésine sur rien pour jeter de l’huile sur le feu. C’est d’ailleurs du côté du multijoueur local, possible jusqu’à quatre, que tout cela prend vraiment du sens. Oui, on aurait pu faire avec tout cela car même si elle a ses défauts, cette conception du jeu de courses a le mérite de tenter quelque chose. Puis il faut reconnaitre que graphiquement, on n’a pas à se plaindre. The Grand Tour Game se place dans la catégorie passe-partout. Ni beau ni laid, le jeu d’Amazon souffre de quelques soucis de lisibilité mais au fond, ce n’est pas le plus important. Le plus grave, c’est probablement le fait d’avoir construit ce concept original et plaisant autour d’une maniabilité venue d’un autre âge. Ignoble, à vrai dire. D’aussi longtemps que le jeu de course en 3d existe, d’aussi loin que puisse porter ma mémoire, rarement un jeu n’aura été aussi peu agréable à prendre en mains. Ce n’est pas la légère différence de comportement entre les véhicules à traction, propulsion ou quatre roues motrices qui peut malheureusement combler l’immensité du vide émotionnel qui se dégage du gameplay. Cantonné à la seule vue extérieure, on passe le plus clair du temps à jouer avec une latence incroyable dans la direction (une bonne demi-seconde) et une rigidité à faire pâlir de jalousie un vieux J9. S’en suivent des collisions ubuesques et bien mal sonorisées qui valent pourtant souvent mieux qu’un coup de frein pour espérer gagner dans un jeu à la difficulté on ne peut plus aléatoire.
[Mise à jour 31/01/2019] Saison 3, épisode 2 : Colombia Special
Comme promis, The Grand Tour Game accueille une mise à jour consécutive à la diffusion de l’émission éponyme sur Amazon Prime en fin de semaine dernière. Curieux de pouvoir observer l’évolution de ce jeu mettant en scène le trio infernal Clarkson/May/Hammond, nous avons donc pris un peu plus d’une heure pour tester comme il se doit ce second épisode de la troisième saison de The Grand Tour Game. La mise à jour nous accueille avec une bonne et une mauvaise nouvelle : la bonne, c’est que l’aventure part cette fois vers la Colombie pour mieux sortir des sentiers battus que l’on avait trop foulé jusqu’ici. Trois véhicules plus ou moins taillés pour l’aventure sont au programme : la Jeep Wrangler, le Silverado de Chevrolet et… La Fiat Panda 4×4 (petite dédicace au paternel, grand adorateur de l’italienne). La mauvaise nouvelle, c’est que le jeu d’Amazon n’a manifestement pas sauvegardé tout ce que nous avions fait précédemment. Même pas les statistiques. Si comme nous vous aviez en tête l’idée de revenir vers les quelques courses précédemment mal négociées pour décrocher l’or, il va falloir tout recommencer ! Ce problème, qui semble remonter au lancement du jeu si l’on en croit divers témoignages de joueurs, n’a donc pas été réglé avec la récente mise à jour. Développeurs, si vous nous lisez, vous savez ce qu’il vous reste à faire avant la diffusion du prochain épisode.
Passée cette déception, on apprécie néanmoins de retrouver cette formule show TV/jeu vidéo qui fonctionne une nouvelle fois à merveille. Les transitions entre un format et l’autre sont parfaites et, offroad oblige, on a enfin droit au petit grain de folie qui manquait à The Grand Tour Game pour son lancement. Il est toujours question de faire la course bien sûr, mais on expérimente aussi la traversée périlleuse d’un pont où il faut faire preuve de dextérité pour s’en sortir dans les temps. D’autres fois, après avoir participé à une rapide séance de capture de photos animalières (sans grand intérêt mais au moins cela apporte un peu de diversité), il est question de rejoindre rapidement cinq points d’observation disséminés sur une petite zone. Si rien n’est difficile ici, ce genre d’épreuve apporte un brin de stratégie bienvenu pour qui vise la médaille d’or. Dans l’ensemble, et bien que rien ne vienne révolutionner un gameplay qui conserve sa malheureuse rigidité, on apprécie pour cet épisode 2 la volonté de sortir du cadre unique de la course. Certes cela a ses limites et conduit parfois à de belles erreurs, comme lorsqu’il est question avec May et sa Panda de semer Hammond au volant du Silverado… En vue inversée. Oui, cet angle infâme qui n’a jamais -ou presque- réussi à aucun jeu vidéo.
En bref, cet épisode ne fera certainement pas aimer The Grand Tour Game à ceux qui n’avaient pas adhéré jusqu’ici mais si les défauts dans le fond restent les mêmes (les courses sont vraiment vite pliées), on ne peut nier avoir pris un certain plaisir coupable à suivre les trois stooges et leur humour aussi peu fin qu’irrésistible dans leur périple colombien.
+
- Concept original et efficace sur la forme
- Vraie déclaration d'intérêt envers les fans
- Durée de vie très correcte
- Variété des épreuves appréciable…
-
- … Mais à l’intérêt discutable pour beaucoup
- Maniabilité rigide au possible
- Collisions complètement à la rue
- Procure avec cela peu de plaisir manette en mains, un comble
- Certains circuits reviennent trop souvent...
- ... Et sont trop courts pour le multijoueur
- Une seule caméra disponible